Radiohead – 2012/07/11 – Nîmes les Arènes

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C’est enfin l’été et le soleil tape sur Nimes où les Radiohead se produisent depuis hier soir dans les arènes de la ville. Ils ont repris en France leur tournée interrompue au Canada par un effondrement de superstructure durant un sound-check ayant tué un roadie et blessé quelques autres. Le concert d’hier soir a été dédié au disparu.

Depuis la gare de Nîmes et tout au long du chemin vers les arènes, les T-shirts Radiohead ont envahi la ville écrasée de chaleur. Vers 18h un court sound-check anime le centre-ville avant l’ouverture des portes.
Après une sympathique première partie électro-pop canadienne : Caribou, les Radiohead entrent en scène alors que le jour décline, sur une bande mixée de superpositions samplées couches de la voix de Thom ; Ed en chapeau melon et applaudissant, Thom, barbe et catogan, chemise bleue pâle bien proprette, Jonny caché sous un vaste T-shirt siglé d’un énigmatique « 3 », Colin calé entre les deux batteurs, dont Clive Deamer qui officie habituellement avec Portishead et venu en renfort de Phil pour cette tournée. Le light show reconstruit à la hâte après l’accident de Toronto affiche 12 écrans sur lesquels diffusent des images brouillées et saccadés des musiciens et de leurs instruments.

Le show démarre sur le résolument moderne et complexe Bloom qui inaugure leur dernier disque The King of Limbs et marque le ton de ce concert hors norme :

Open your mouth wide/ A universal sigh/ And while the ocean blooms/ It’s what keeps me alive/ So why does this still hurt/ Don’t blow your mind with why.

Le groupe enchaîne sur du plus classique et reposé avec Kid A où Thom se débarrasse de sa guitare et entre deux pas de danse alterne entre clavier et micro vocodé. Sur 15 Steps la nuit est presque tombée et l’on retrouve la mystérieuse légèreté de Radiohead qui nous emmène si loin dans nos rêves. Puis vient The National Anthem sur un déluge de rythme et de lumières qui font vibrer tous les sens d’une audience attentive. Et s’en suit une set-list épuisante, sans un instant de répit, où l’oreille est constamment accrochée par cassures et dissonances sur lesquels plane l’incroyable voix de Thom, à la fois apaisante et furieuse.
Cette voix contrôle l’aspect volcanique de la musique, canalisant son énergie ou déclenchant le feu. Mais elle est parfois aussi, intimiste, éthérée, chaude, nous faisant nous retirer profondément en nous-mêmes, sur Exit Music, Nude ou Codex : Jump off the end/ The water’s clear/ And innocent… Cette voix n’est que pureté et émotion, de loin l’instrument clé du groupe au service de compositions exceptionnelles.

Les autres musiciens ne sont pas en reste, jonglant entre les instruments, avec une palme d’or pour Jonny souvent perdu dans ses ordinateurs ou accroché au bout d’un transistor qu’il répercute dans la sono, toujours caché derrière les mèches rebelles de ses cheveux noirs lorsqu’il extirpe d’incroyables sonorités de ses guitares.

Après deux heures de passion, le show s’achève sur de surpuissantes montées d’adrénaline avec Feral et Bodysnatchers, des morceaux emblématiques de leurs deux derniers disques et de leur complexité musicale.

Mais deux rappels nous donneront une heure supplémentaire de musique et la soirée s’achèvera définitivement sur Street Spirit, retour aux sources de l’album The Bends en 1993, une chanson triste et simple :

I can feel death can see it’s beady eyes/ All these things into position/ All these things we’ll one day swallow whole/ And fade out again and fade out again/ Immerse yourself in love/ Immerse yourself in love.

Voir Radiohead et mourir, ou en tout cas voir Radiohead dans le somptueux site des arènes de Nimes c’est s’endormir intellectuellement plus riche que l’on ne s’est éveillé. Chacun s’égaye alors dans les rue de Nimes avec la conscience d’avoir vécu un moment musical d’exception avec ce groupe qui n’en finit pas d’étonner. Les cinq d’Oxford aux allures de post-adolescents romantiques développent une créativité musicale rarement égalée, un sens de l’innovation technique redoutable qui leur permet de mettre en valeur leur musique d’une façon toujours plus excitante et renouvelée. Le public ne s’y trompe pas qui voue à ce groupe une dévotion éternelle. Radiohead, les Dieux du Rock seront à Paris en octobre prochain ; soyons-y !

Set list: Bloom/ Kid A/ 15 Step/ Morning Mr. Magpie/ The National Anthem/ The Gloaming/ Supercollider/ Codex/ Airbag/ Climbing Up the Walls/ Nude/ Exit Music (for a Film)/ Lotus Flower/ There There/ Feral/ Bodysnatchers
Encore: Treefingers/ Give Up the Ghost/ House of Cards/ Reckoner/ Myxomatosis/ Everything In Its Right Place (True Love Waits intro)/ Idioteque
Encore 2: Street Spirit (Fade Out)
Warm-up: Caribou