« Arthur Rambo » de Laurent Cantet

par

dans Catégorie :

Un film intéressant inspiré par un fait divers de 2016, l’histoire de Mehdi Meklat, jeune « beur » d’une vingtaine d’années, issue d’une famille modeste originaire « de la diversité », animateur du média « Bondy Blog », chroniqueur sur la radio publique, écrivain. Avec sa bande il diffuse avec énergie et enthousiasme le message d’une banlieue qui bouge et qui réussit. Happé par le tout Paris intello-progressiste qui adore ce modèle, jusqu’à ce qu’une série de tweets nauséabonds refassent surface. En même temps qu’il s’affichait dans le beau monde, notre héros publiait au début des années 2012 des messages antisémites, homophobes, négrophobes, islamophobes ou misogynes, bref, tout le monde y passait et dans un registre pour le moins sans limite.

Le film montre la chute de Karim (Mehdi Meklat à la ville), d’autant plus brutale qu’elle se déroule en direct sur les réseaux dits « sociaux » sur lesquels grenouillent une jeunesse sans profondeur, un smartphone greffé à la main. L’histoire se termine sur la fuite du héros abandonné par son éditeur, sa fiancée, ses amis car il est devenu par trop radioactif. Karim meurt par où il a pêché. A l’écran comme dans la vraie vie Karim-Mehdi plaide le fait que son avatar « Arthur Rambo » (« Marcelin Deschamps » dans la vrai vie) n’est qu’un personnage fictif au travers duquel il « questionne la notion d’excès et la provocation »…

Il est des choses qu’il vaudrait mieux ne pas penser, ou à tout le moins, si on les fait siennes, ne pas publier. Si on les formalise il faut en assumer la responsabilité et affronter l’immanquable polémique qui arrive lorsque l’on est un homme public. C’est ce qu’il a plus ou moins fait car il y a probablement dans Karim-Mehdi aussi une part sombre qui endosse plus ou moins consciemment les écrits de « Marcelin Deschamps ». Karim-Mehdi montre à quel point le talent peut être ravagé par une histoire personnelle trouble, un passé qui ne passe pas. Son dilemme relève sans doute de la psychologie. Sa réussite éphémère dans un milieu aussi prompt à l’accueillir qu’à le rejeter l’a empêché de prendre le contrôle de sa double personnalité qui a finalement explosé en plein envol !