Le génocide pratiqué par les khmers rouges au Cambodge vu par une réalisatrice, Roshane Saidnattar, métisse indienne-khmère qui avait 4 ou 5 ans à l’époque et a été exilée avec sa famille vers la campagne pour y travailler pour l’Ankgar, l’organisation maoïste dirigée par Pol-Pot. 35 ans plus tard elle revient sur place avec sa mère et retrouve le village où elle a exercé ses travaux forcés sous la surveillance sanguinaire des paysans locaux qui représentait le « bon » peuple quand les urbains étaient les « mauvais », corrompus par le capitalisme et l’Occident qui devaient expier leurs fautes dans les champs. Un tiers de la population a été exterminée, entre 2 et 3 millions de morts. Le chef de l’Etat de l’époque était Kieuh Sampan, qui a fait ses études à Paris (à la Sorbonne à la fin des années 50, Sartre rôdait encore au quartier latin) comme beaucoup des chefs khmers rouges. Il est interviewé dans le film, retrouvé au fin fond du pays dans une petite ferme où il élève des canards. Il revient sur ces années de folie et affirme qu’il n’était pas au courant des massacres et que son poste était honorifique. Le président du Cambodge ne se serait pas aperçu du massacre d’un tiers du peuple khmer durant les quatre années de son règne ! Il croyait (et croit encore) que le retour aux champs de toute la population était la bonne solution pour relancer l’économie du pays, et un tremplin pour créer une industrie.
Une séquence intéressante est le retour de Roshane et sa mère dans le village où elles ont été « détenues » et les retrouvailles avec leurs « geôliers », qui continuent à travailler dans leurs mêmes rizières. Ces massacres « civils » (Algérie, Rwanda, Cambodge, …), une fois stoppés, entraînent souvent le retour des assassins dans leur milieu d’origine et un hallucinant face-à-face avec les survivants. C’est ici le cas, une fois encore.
Les scènes de reconstitution (dernière mode médiatique des émissions historiques) sont inutiles. Avant la sortie du film, Kieuh Sampan sera arrêté pour être traduit le moment venu devant un tribunal mi-local, mi-international, mais qui a bien du mal à prendre son élan.
Voir le très intéressant compte-rendu de l’historien Raoul Marc Jennar qui a déposé le 14 septembre 2009 comme expert devant ce simili tribunal international.