Le départ à la retraite du préfet de police de Paris Didier Lallement n’a pas provoqué beaucoup de réactions de regret ni à gauche qui le considérait comme un réactionnaire, ni à droite qui a estimé qu’il avait échoué dans sa mission de maintien de l’ordre. Au-delà de ces imprécations de circonstance dont le monde politique français est coutumier, ce préfet a mis en place durant son service un changement de doctrine du maintien de l’ordre significatif dont les effets ont été mitigés, non pas tant du fait de la nouvelle doctrine elle-même que par la crainte qu’elle a provoquée chez les dirigeants politiques, patrons de M. Lallement.
La doctrine essayée fut celle du « contact » qui remplaçait celle de la « distance ». En français dans le texte cela signifiait qu’on « rentre dans le tas », au risque de faire des blessés et des morts, plutôt que de chercher à contenir « à distance » les débordements de manifestants ou délinquants en évitant de les affronter en direct pour éviter les dommages sur les personnes.
On a vu lors des émeutes dîtes des « gilets jaunes » en 2019 et 2020 les forces de l’ordre user de tirs de balles en caoutchouc (Lanceur de balles de défense – LBD) ou de grenades de désencerclement contre les émeutiers, casseurs et militants politiques violents dont certains ont été gravement blessés. Bien entendu certains des blessés ont pu n’être que de « pacifiques manifestants » qui ne méritaient pas un tel traitement. Assez rapidement, devant l’étendue des réactions et les débats sans fin sur les « violence policières » le pouvoir politique a pris peur et restreint l’utilisation de ces armes défensives par les forces de l’ordre malgré la poursuite des attaques déchaînées contre la police et les dégradations importantes de bâtiments publics et privés.
Le débat se poursuit aujourd’hui avec le cas des rodéos urbains au cours desquels des gamins paradent en pleine ville sur la roue arrière de leurs motocross. Il y a régulièrement des morts et des blessés, parmi les conducteurs qui roulent bien entendu sans casque mais en casquette sur des deux-roues souvent volés et pas toujours titulaires d’un permis de conduire, mais aussi parmi les piétons qui sont régulièrement percutés par ces pieds-nickelés. La nuisance provoquée par ces rodéos est importante et leur bilan souvent dramatique. Les forces de l’ordre sont assez impuissantes à y mettre fin car elles ont pour instruction de ne pas intervenir directement par crainte de blesser les conducteurs lors de leur éventuelle interpellation au cœur de l’action. On apprend que la police britannique, elle, est autorisée au « contact tactique » contre les motos refusant de s’arrêter. Des vidéos officielles impressionnantes existent qui montrent des voitures de police britanniques percuter des motards et les faire chuter afin de les arrêter. C’est assez efficace à court terme mais on n’est pas encore bien sûr que cette tactique décourage véritablement les délinquants en deux roues.
En réalité, stratégie du contact ou de la distance, le pouvoir politique est confronté à un problème de société jusqu’ici insoluble : l’ensauvagement d’une partie de la population qui ne craint plus grand-chose et certainement pas l’ordre policier ni judiciaire. Des émeutiers aux trafiquants en tous genres, ils affrontent, provoquent et manipulent à leur profit l’Etat de droit qui n’a pas su ou pas voulu satisfaire leurs exigences. Ils n’ont plus peur de rien et poursuivent leur délinquance sans trop d’obstacles réels. Le pouvoir politique n’est certainement pas l’unique responsable de l’émergence de ces populations sans foi ni loi comme on cherche trop souvent à l’en accuser au Café du commerce et sur les plateaux télévisés. La perte d’autorité et la dégradation de l’éducation parentales sont aussi à mettre en cause. Ce mouvement de décadence du pays semble malheureusement une tendance lourde qu’aucun pouvoir de gauche comme de droite n’arrive à inverser pour le moment. Tous sont à la recherche de la solution miracle qui reste à conceptualiser et mettre en œuvre. Vaste tâche !