Le quatuor islandais Sigur Rós joue deux soirées au Zénith à guichets fermés. On croyait le groupe mené par Jónsi cantonné à l’avant-garde pour spécialistes, les voici maintenant et depuis déjà quelques années, à l’origine d’un succès d’estime et commercial auprès d’un public international élargi, joyeusement représenté ce soir au Zénith.
La scène est composée de groupes de filins tendus entre plafond et sol, qui vont se torsader selon les morceaux interprétés. L’éclairage est rouge ou vert-laser. Il s’enroule sur les filins donnant à la scène un aspect mystérieux et galactique. Les quatre musiciens sont habillés de noir et démarrent le show sur la ritournelle au clavier de Untitled #1 introduisant leur troisième disque, sans titre, dont on célèbre aussi ce soir le 20ème anniversaire via une réédition remastérisée et qui a la part belle de la set-list du jour. Les Sigur Rós occupent la scène pour deux parties séparées par un entracte.
Jonsi, haut de taille, est sur le devant, jouant le grand prêtre de cette soirée mystique dans sa longue tunique noire. Maniant son archet de violoncelle sur sa guitare il déclenche l’orage avec le son épais de l’instrument lorsqu’il l’écrase sous la mèche de l’archet. Il nous charme avec sa voix de fausset nous emmenant très haut dans les aigus et faisant de cette voix si particulière le cinquième instrument du groupe. Parfois il chante la guitare devant la bouche et sa voix est alors transformée par les multiples traitements de l’instrument. Le claviériste, qui joue aussi du trombone à coulisse, marque l’atmosphère de ses longues et discrètes nappes de claviers, alternées avec des passages de piano aux notes sibyllines. Le batteur et le bassiste sont sur un registre plus classique, marquant confusément la rythmique d’une musique qui n’en n’a guère.
Les écrans de fond de scène diffusent des images, le plus souvent en noir et blanc, parfois floues, de brumes, de fumées qui s’accordent si bien avec cette musique mystérieuse qui envahit le temple du Zénith. On se laisse porter par la magie des compositions, emporter par la grâce et la beauté incompréhensibles de cette production venue du grand Nord. Cette musique sort de l’imagination débridée de ces quatre lutins islandais tellement innovants et c’est un sommet de beauté et de poésie.
Le Zénith en reste pétrifié avant de laisser éclater sa reconnaissance au groupe qui, à la fin du show, revient saluer deux fois en applaudissant à tout rompre les spectateurs enchantés. Sigur Rós reste ancré dans l’avant-garde et aurait tort de s’en éloigner tant il réussit aujourd’hui à la vulgariser sans compromettre. Il mène d’ailleurs une collaboration de longue date avec le groupe Radiohead autre légende de la musique indie qui la met à portée de beaucoup. Quel bonheur d’assister tout au long de ces années à la création de ces artistes toujours en recherche de la perfection !
Setlist : Untitled #1 – Vaka/ Untitled #2 – Fyrsta/ Untitled #3 – Samskeyti/ Svefn-g-englar/ Rafmagnið búið/ Ný batterí/ Gold 2/ Untitled #7 – Dauðalagið/ Smáskifa
Glósóli/ Untitled #6 – E-Bow/ Sæglópur/ Gong/ Andvari/ Festival/ Kveikur/ Untitled #8 – Popplagið
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