Une soirée au cinéma permet de constater que les annonces pour les films à venir sont désormais entrecoupées de publicités commerciales. Cette pratique invasive nouvelle est destinée à forcer le spectateur à ingérer de la publicité commerciale s’il veut regarder jusqu’au bout le programme de ses prochaines séances. A priori la majorité des citoyens n’est pas passionnée par la publicité ; durant les matchs de fouteballe suivis à la télévision depuis son salon M. Michu profite des pauses publicitaires pour aller s’ouvrir une bière ou évacuer les précédentes aux toilettes, s’évitant ainsi le spectacle abrutissant de messages de pub répétés jusqu’à la nausée pour envahir les neurones des gogos et déclencher leurs décisions d’achat au supermarché du coin ou chez leurs concessionnaires automobiles. Avec ce saucissonnage des annonces des prochains films qui seront à l’affiche, les commerçants espèrent ainsi forcer les consommateurs à visionner leurs messages.
Les téléspectateurs exaspérés par la pub, peu nombreux finalement, cherchent à adapter leurs consommations de télévisions et de radios en se limitant aux chaînes le moins possibles envahies par les commerçants. Ce sont essentiellement les chaînes du service public, et encore, celles-ci font-elles malgré tout l’autopromotion de leurs propres programmes et n’échappent pas aux émissions sponsorisées qui permettent de refourguer par la fenêtre les commerçants qui ont été évacués des ondes par la porte.
L’apparition forcée de pop-ups sur son écran de terminal dès que l’on navigue sur un site internet « gratuit » relève du même écœurant gavage. Désormais l’internaute a acquis le réflexe pavlovien de fermer tous ces pop-ups avant de pouvoir commencer réellement sa navigation. L’invasion est plus légère sur les sites payants. Normal puisque sur Internet : « la marchandise est l’internaute lui-même » dont les données de navigation sont stockées et revendues.
Les progrès de l’intelligence artificielle permettent malheureusement d’encore mieux cibler le pilonnage publicitaire des neurones du consommateur. Celui-ci se voit proposer des produits commerciaux choisis en rapport avec les clics qu’il a fait les jours précédents sur des sites vendant des produits similaires. Le chroniqueur a déjà constaté que lorsqu’il écoutait une radio publique sur l’application Radio-France de son téléphone mobile et coupait le son pour s’épargner la voix gnangnan de la nunuche promouvant une autre émission, la publicité abrutissante reprenait exactement au moment où il l’avait coupé deux minutes avant…
On est en plein dans la légendaire phrase d’un ex-pédégé de TF1 (Patrick Le Lay) qui expliquait doctement que l’art du business de la télévision était de vendre du « temps de cerveau disponible des téléspectateurs » aux annonceurs. Cet illustre personnage avait dirigé cette chaîne après sa privatisation et en avait fait une réussite commerciale et un désastre culturel. On est aussi au cœur du système marchand qui nous gouverne : pour produire il faut bien vendre, et pour vendre il faut bien promouvoir quitte à abrutir le consommateur et à provoquer ses non-besoins. Ce système a de bons côtés, il en a aussi de très mauvais desquels il devient de plus en plus difficile de se prémunir. C’est là sa supériorité sur tous les autres !