Arcade Fire nous offre ce soir un concert gigantesque au Zénith après la sortie de son double CD Reflektor, qui assoit définitivement ce groupe dans la catégorie des très grands. La scène est uniformément blanche, le groupe renforcé par une section cuivre et un duo de percussionnistes, il y a des instruments partout sur plusieurs étages. Costumes bigarrés et musiciens joyeux, mélodies et paroles brillantes, profusion d’imagination et de créativité, rythmes endiablés, c’est la magie du Rock ‘n’ Roll dévalant du nouveau monde !
Win vêtu d’un pantalon bleu marine parsemé de yeux de Bouddha, tel la stupa d’un temple népalais, et une veste cuivrée, Regine en robe à paillettes et gants roses laissant pendre aux poignets de longs rubans de même couleur. Le reste du groupe est chamarré, courant déjà en tous sens sur Reflektor joué pour lancer un concert déjà volcanique. Rythmique saccadée, électronique en renfort, une voix portée aux nues, Regine dansant comme une diablesse, Win moulinant sa guitare debout sur les enceintes, le reste de la bande tressautant comme branché sur le courant alternatif ; laissez-vous porter par la vague Arcade Fire !
Un immense écran en fond de scène diffuse des images parfois aussi folles que cette musique. Des mobiles descendent du plafond puis y remontent, suivis par des jeux de miroirs. La scène est un immense capharnaüm au service d’une musique jubilatoire.
Reflektor, la chanson, est suivie de Flashbulb Eyes, deux morceaux du dernier disque, puis retour à Funeral avec un diabolique enchaînement de Neighborhood #3 (Power Out) et Rebellion (Lies)… Le public est déjà debout depuis l’entrée des artistes, y restera jusqu’à leur départ, et reprend sans fin les Lies-Lies–Ouh-ouh-ouh… de Rebellion. Quelle énergie, quel enthousiasme, quelle richesse musicale, et ce dès les premières minutes d’un concert d’anthologie.
Le rythme se calme un peu avec The Suburbs joué au piano par Win, Regine à la batterie et les violons lancinants de cette ballade triste sur des ados de la banlieue, à Toronto ou ailleurs : You always seemed so sure/ That one day we’d be fighting/ In a suburban war/ Your part of town against mine/ I saw you standing on the opposite shore/ But by the time the first bombs fell/ We were already bored/ We were already, already bored/ Sometimes I can’t believe it/ I’m movin’ past the feeling…
Et le concert se poursuit dans une débauche d’électricité et ce désarmant naturel avec lequel joue cette bande de potes-musiciens, soudés par leur art et une joie de vivre, qui transforme les notes en or liquide, et un public parisien en une foule extatique et déchaînée. Ils sont comme ça nos canadiens, ils abattent l’ouvrage comme les arbres dans les forêts du grand Nord, comme les iceberg dans la baie du Saint-Laurent, rien ne résiste à leur extraordinaire enthousiasme, la musique fusionne les multiples instruments avec les voix, les rythmes agitent les corps et donnent le cap ; mais jusqu’où iront-ils ?
Une B-stage est dévoilée pour le rappel sur laquelle se trémoussent deux danseurs grimmés en Daft Punk pendant que le groupe joue Get Lucky des… Daft Punk. Le final sur un divin et inoubliable Wake Up, des canons explosent, couvrant le Zénith de confettis pendant que sur scène défilent des danseurs la tête couverte d’énormes masque en carton-pâte les grimant en personnages de contes de fée. Un final éblouissant pour un concert d’anthologie.
Setlist : 1. Reflektor/ 2. Flashbulb Eyes/ 3. Neighborhood #3 (Power Out)/ 4. Rebellion (Lies)/ 5. Joan of Arc/ 6. Rococo/ 7. Month of May/ 8. The Suburbs/ 9. The Suburbs (Continued)/ 10. Ready to Start/ 11. Neighborhood #1 (Tunnels)/ 12. Ocean of Noise/ 13. My Body Is a Cage (alternate shortened version)/ 14. We Exist/ 15. No Cars Go/ 16. Haïti/ 17. Afterlife/ 18. It’s Never Over (Oh Orpheus) (Régine on B-stage)/19. Sprawl II (Mountains Beyond Mountains) (‘Damian Taylor Remix’ intro)
Encore: Get Lucky (Daft Punk song) (Paft Dunk on B-stage)/ 20. Normal Person/ 21. Controversy (Prince cover)/ 22. Here Comes the Night Time/ 23. Wake Up
Et le chroniqueur passa le début du show à l’infirmerie près de l’entrée des artistes du Zénith pour y accompagner un camarade blessé, l’occasion de faire papote avec un personnel de santé dévoué et sympathique, et d’assister depuis le conteneur infirmerie au lancement de Reflektor, un véritablement tremblement de terre faisant vibrer tout l’environnement. Impressionnant et peut-être un peu trop fort tout de même…
Le camarade claudiquant a été bien soigné ! |