The White Stripes – 2007/06/11 – Paris le Zénith

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Icky Thump le dernier disque des White Stripes ne sera en vente que la semaine prochaine dans les bacs parisiens mais déjà l’on sait que sa couverture est en noir et blanc, une première pour ce groupe qui a fait du rouge et blanc sa marque de fabrique. Faut-il s’attendre à une révolution ? Cette soirée au Zénith prouvera qu’il n’en est rien. Et pourquoi d’ailleurs faudrait-il changer quoi que ce soit à ce duo incroyable qui nous délivre un rock pur forgé aux sources du blues ?

Le fond de la scène est tendu d’une immense toile rouge unie sur laquelle les musiciens joueront aux ombres chinoises comme unique light show. Mais nous ne sommes pas la pour la débauche technologique simplement pour écouter et voir la réincarnation de Jimmy Hendrix en extra-terrestre blanc venu de l’Ouest : Detroit, USA. Et le blanc débarque tout en rouge accompagné de Meg qui s’installe derrière ses futs. A peine les lumières éteintes, la guitare rouge et blanche siffle déjà des feulements de saturation sous les arcanes gonflées des toiles (rouges…) du Zénith parisien.

Le son brut du groupe envahit l’atmosphère comme une épaisse fumée de sous-bois enflammés, humide et grasse qui pénètre les tympans pour s’y déposer en strates indélébiles. Après notamment un redoutable Dead Leaves, il faut attendre le quatrième morceau du show pour découvrir le titre éponyme du disque Icky Thump qui est enchaîné avec Effect and Cause, autre nouveauté pour laquelle Jack a ressorti une vieille électroacoustique au bois constellé de zébrures, une de ces guitares qui a traîné dans les bars du Tennessee (les White’s habitent Nashville) et arbitré des bagarres d’ivrognes.

Après cette première envolée, le public est déjà à genoux alors que Jack poursuit son combat de gladiateur pour maîtriser les hurlements de sa guitare qui vit son propre destin sous les doigts de fée qui terminent les biscoteaux d’athlètes émergeant du T-shirt rouge moulé.

De la chevelure noire en bataille de Jack qui lui cache le visage, monte une voix aigüe et maîtrisée aux accents hard-rockeux mais à l’inspiration tellement blues dans ses vibratos et ses menaces qu’elle en fait le fils spirituel de Muddy Waters et B.B. King. Si ça n’était pas encore évident pour certains, il est désormais clair que ce garçon a replanté l’étendard de la musique américaine si haut que peu de musiciens de sa génération pourront aller le chercher.

I Think I Smell A Rat déclenche un ouragan avec ses riffs qui claquent sous le dôme comme des éclairs, c’était sur White Blood Cells en 2001 comme The Same Boy… Sans répit Jack accroché à sa guitare parcourt la scène rouge où il alterne les micros face au public, ou sur un orgue d’anthologie peint en rouge vif dont il joue pendant que les accords de ses cordes vivent leur vie dans un délire de larsen sur-saturé, ou encore à coté de Meg White, aussi souriante sous sa frange de cheveux noirs qu’elle est violente sur ses peaux. Complice de toujours elle assure la rythmique de façon désarmante mais oh combien efficace. Et il n’y a pas besoin de plus, elle fait ce qu’il faut.

Retour au calme provisoire avec Cold Cold Night chanté sur le devant de la scène par Meg à qui le public fait un triomphe en se demandant encore comment ce petit ange qui susurre avec tant de délicatesse :

Come to me again/ In the cold cold night/ You will know that it’s warm inside/ And you’ll come run to me/ In the cold cold night

est capable de batte le beat de Icky Thump ? Les démons du Mississippi certainement !

Ball And Biscuit pour terminer le premier set et puis les rappels qui annoncent l’apothéose de Seven Nation Army joué devant un Zénith qui sent venir sa fin : And I’m bleeding, and I’m bleeding, and I’m bleeding/ Right before the lord/ All the words are gonna bleed from me and I will think/ No more/ And the stains coming from my blodd/ Tell me go back home.

Tout n’est plus que sueur et déchaînement, stupeur et tremblement, lorsque Jack et Meg debout sur les enceintes tentent d’apaiser le brasier qu’est devenu le Zénith en se prenant en photo devant les spectateurs, au Polaroïd dont ils jettent les épreuves dans la foule. Jack offre des roses à Meg et ils repartent sereinement après nous avoir délivré le message de la grande Amérique, celui de racines violentes et ambigües, créatives et dissolues, multiples et exceptionnelles, irriguées par le sang du Rock ‘n’ Roll qui a engendré les plus belles pages de la musique de notre temps ! C’est bon, c’est bon, c’est bon.