Bashung – 2008/06/11 – Paris l’Olympia

Quatre concerts à l’Olympia à guichets fermés pour Alain Bashung, rocker géant et poète poignant. Calvitie chimiothérapique, vêtu d’un smoking, chemise blanche ouverte, feutre et lunettes noires. Blues Brother tragique, il dirige ce soir une formation très épurée de quatre musiciens, light-show simpliste, la soirée est concentrée sur les mots et la musique, sombre bien sûr, sombre… à l’image de son dernier disque Bleu Pétrole, sorti depuis deux mois.

Artiste accompli, musicien et acteur, il promène sa poésie depuis trente ans sur la scène française, de compositions en films, de collaborations en réflexions. Rocker engagé, ses derniers disques sont des plongées dans la nuit. Le superbe L’Imprudence a donné lieu à la Tournée des grands espaces dont fut tiré un remarquable DVD. Bleu Pétrole est un retour à la simplicité folk brute, fruit d’un travail étroit avec Gaëtan Roussel de Louise Attaque (ces deux là étaient faits pour se rencontrer un jour), mais aussi avec Armand Méliés ou Gérard Manset. On retrouve sur les crédits du disque Mark Plati et Gerry Leonard, musiciens-producteurs de Bowie.

Ce soir le son de la voix est mixé très fort et la salle tremble sous le choc des phrases subtiles qui percutent les guitares acoustiques en une symbiose amère. Bashung est debout ou appuyé sur un tabouret de bistrot, économe de ses gestes, il présente une vraie posture de rocker, qu’il plaque des accords sur sa guitare noire ou déclame ses rimes secrètes. L’essentiel de Bleu Pétrole est servi à une audience émue et les retours sur le passé ne sont pas moins appréciés. La Nuit Je Mens est un sommet, What’s in a Bird, J’Passe pour une Caravane sont reçus avec délice. Deux rappels dont un duo avec Chloé et un bouleversant Angora : le souffle coupé/ la gorge irritée/ je m’époumonais/ sans broncher/ Angora/ montre-moi/ d’où vient la vie/ où vont les vaisseaux maudits.

Bashung nous quitte sur Nights in white satin, une reprise des Moody Blues. Tout le monde pense à son cancer mais l’homme est inchangé : une statue du rock français, érigée solitaire dans un univers fascinant dont il nous entrouvre les portes avec générosité. Et c’est toujours la même féérie du jeu des mots servis sur un lit de notes. D’ailleurs nous avons déjà notre place pour son Bataclan du mois de novembre prochain !