Commérage et incompétence

L’affaire Société Générale illustre plus que tout autre une remarquable chaîne d’incompétence et de voyeurisme de la presse et des marchés financiers ! Le Daily Mail, torchon britannique, sort une info sur cette banque qui serait « au bord du désastre ». L’information est bien entendu reprise par d’autres journaux sans vérification. Trois jours plus tard et bien que déjà démentie, des traders surpayés la prenne pour argent comptant, ne vérifie rien et surtout pas les chiffres publiés par cette banque, ils n’ont pas le temps et de toute façon ne les comprennent pas, ils vendent le titre qui perd jusqu’à 20% lors de la séance de mercredi dernier pour finir à -14,9%. Les titres des autres banques baissent également significativement, on ne sait jamais des fois que l’information non vérifiée de la Société Générale les concerne aussi…

Une journaliste de Reuters publie un tweet personnel expliquant que cette rumeur serait due à une mauvaise lecture de la fiction de l’été publiée par Le Monde narrant la faillite de l’euro. La presse française adore cette nouvelle information et la fait tourner en boucle, sans plus vérifier ni auprès de ladite journaliste ni auprès du Daily Mail. Libération, Le Figaro l’AFP et d’autres en font leurs gorges chaudes.

Devant l’ampleur du sinistre boursier, les journalistes se souviennent qu’ils ont une carte de presse, que certains sont allés à l’école de journalisme, et commencent à faire le métier pour lequel ils sont payés. Les rumeurs et autres tweets se révèlent infondés. Messieurs les Marchés comprennent qu’ils auraient mieux fait d’analyser la situation plutôt que de lire la presse de caniveau outre-manche avant de se lancer dans de folles et déraisonnées transactions, ils rachètent de la Société Générale, le titre remonte doucement.

En résumé, des journalistes se sont transformés en concierges, des opérateurs de marché en vendeurs d’aspirateurs ; tous les ingrédients du psychodrame étaient sur la table et ce qui devait arriver arriva ! Maintenant les uns s’excusent, les autres enquêtent, d’autres se plaignent, chacun est retourné penaud dans son bureau faire le dos rond devant ses écrans.

Tout ça n’est pas très grave et aurait pu être vrai. La Société Générale s’en remettra, son titre regagnera ce qu’il a perdu, et s’il y a des actionnaires qui ont perdu en vendant dans la panique, d’autres ont gagné en achetant à ce moment. Mais on a atteint le niveau d’un concours de billes en maternelle 1ère année, et encore. Le plus déprimant est que tous ces beaux esprits sont payés pour être intelligents et qu’une nouvelle fois les faits démontrent qu’ils agissent comme un troupeau de moutons décérébrés !