Le conflit encours sur le projet de loi « Travail » montre au moins une chose : les syndicats ouvriers savent lire et comprendre ce qu’il y a entre les lignes ! L’objectif général répété en boucle depuis des années par les syndicats patronaux et les responsables politiques est de rétablir la compétitivité des entreprises en baissant le coût du travail. Baisser le coût du travail cela veut dire (i) que l’on va travailler plus pour le même salaire ou autant pour un salaire inférieur et (ii) que l’on va diminuer massivement les prestations sociales financées sur le travail (assurances maladie, chômage et vieillesse), car si l’on veut baisser les prélèvements sociaux il va bien falloir que l’on diminue aussi les prestations sociales financées par ces prélèvements, y compris les retraites.
Baisser le coût du travail cela veut dire une diminution du niveau de vie moyen mais avec l’espoir de voir le chômage reculer et plus de travailleurs revenir à l’emploi. Une fois rétabli le plein emploi les salaires pourraient recommencer à grimper si l’offre de travail est inférieure à la demande. C’est une autre façon de partager le marché du travail : alors que la loi sur les 35 heures limitait la quantité (les heures travaillées) pour mieux répartir les travailleurs sur marché (avec des résultats mitigés) le projet actuel est d’augmenter la demande de travail en en limitant le prix unitaire (celui de l’heure de travail) ce qui devrait ouvrir le marché du travail à plus de chômeurs. C’est une opposition théorique classique entre les tenants de l’Etat qui administre l’offre et la demande (dont le Gosplan soviétique est le pire exemple) et les libéraux qui laissent Monsieur le Marché trouver le point d’équilibre entre l’offre et la demande par le prix (dont les salaires et bonus démesurés versés certains pédégés et fouteballeurs illustre les excès).
Nombre de pays européens ont cherché à baisser ce coût du travail en précarisant l’emploi : en baissant le prix on a accru la demande, c’est un principe assez simple de l’économie libérale, généralement compris de la majorité. Ce qui est beaucoup moins bien entendu, et en tout cas très peu expliqué par les dirigeants et les médias, c’est que baisser le coût du travail veut dire que celui-ci va être moins rémunéré.
Cette fameuse inversion de la hiérarchie des normes introduite dans le projet de loi permettra aux accords d’entreprises de s’imposer à la loi dans certaines conditions et dans des domaines très limités, notamment celui du paiement des heures supplémentaires. Imagine-t-on un seul instant que lorsque de tels accords émergeront ils puissent être plus favorables que la loi ? Evidemment non, ils seront dans leur immense majorité moins favorables et c’est ainsi que l’on baissera le coût du travail.
La CGT et les syndicats contestataires l’ont bien compris et ils se battent avec outrance contre ce projet de loi avec leurs moyens de lutte habituels. Le syndicat patronal est aux abonnés absents, laisse le gouvernement actuel batailler et faire comprendre aux français que leur niveau de vie moyen va devoir baisser pour rétablir la compétitivité des entreprises !
Chacun est dans son rôle en faisant assaut de faux-jetonnerie, de slogans grandiloquents et refusant d’expliquer la vraie vie car la baisse de la rémunération du travail n’est jamais un argument électoral très porteur pour des syndicats ou des gouvernements.
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