Un mouvement de la jeunesse mondiale (plutôt localisé dans les pays développés) prend fait et cause pour l’écologie et manifeste son engagement par des voies et moyens variés. En Europe, et notamment en France, des lycéens et étudiants font grève tous les vendredis pour défendre la planète. On voit par ailleurs à Paris des associations non gouvernementales attaquer l’Etat français en justice pour « inaction climatique ».
Tout ceci est bien sympathique mais sans doute un peu vain. Certes l’Etat a sa responsabilité pour guider la transition écologique mais celle-ci ne se fera qu’à condition d’un changement des modes de vie et la population mondiale, et celui-ci ne semble pas encore pour demain. Mais dans notre époque de déresponsabilisation générale, on se retourne contre l’Etat lorsque l’on a des revendications quelles qu’elles soient.
A quoi sert une grève des lycéens et étudiants tous les vendredis ? A pas grand-chose bien entendu. Cette jeunesse serait un peu plus crédible si elle restait en classe le vendredi dans ces lieux de savoir, lycées et facultés, financés par les contribuables, mais si, par exemple, elle s’engageait à la place à ne pas brancher ses smartphones chaque semaine le vendredi afin de mettre au repos les serveurs de Facebook et Instagram, ou à aller passer ses vacances dans le Cantal plutôt qu’en Thaïlande ! Et puis les mêmes qui attaquent l’Etat furent les premiers à lui faire abandonner l’augmentation des taxes sur les carburants polluants dans des mouvements divers, des « bonnets rouges » aux « gilets jaunes ». En réalité, on peut craindre que la planète ne change ses modes de vie que lorsque les coûts de la pollution seront réellement facturés aux utilisateurs, individus, collectivités ou nations. Pour le moment, le jeune en grève le vendredi ne supporte pas vraiment les coûts de la montée des eaux ; au contraire, ses vacances à Bali sont de moins en moins onéreuses. C’est seulement lorsqu’il doit payer que le système capitaliste et les citoyens s’adaptent. Ce n’est peut-être pas très moral mais c’est ainsi. Il sera alors peut-être trop tard mais il faut souhaiter que, le moment venu, le changement soit suffisamment rapide pour rattraper le retard. On est en plein conflit entre le court-termisme du système et le long-termisme de l’écologie. C’est théoriquement la grandeur et la noblesse de la politique d’avoir à gérer cette contradiction, mais ce n’est pas facile.