La retraite retardée

Une conférence s’est tenue hier entre l’Elysée et les chefs d’Etat des cinq pays africains du groupe « G5 Sahel » sur la présence de l’armée française dans le Sahel. Il a été annoncé le maintien de cette force étrangère dans la zone sahélienne. Alors que dans le même temps les Etats-Unis d’Amérique ont acté le retrait de leurs troupes d’Afghanistan en négociant avec les rebelles talibans, leur donnant ainsi les clés d’un retour prochain au pouvoir à Kaboul, la France retarde encore le moment inévitable où il lui faudra évacuer le Sahel. Les arguments sont toujours les mêmes et surtout le mantra « en protégeant le Sahel du terrorisme religieux, on protège la France ».

L’occident n’arrivera pas à « pacifier » l’Afrique sahélienne et encore moins à y instaurer la démocratie. Cela fait des décennies qu’il essaye, avec le succès que l’on constate. Les armées locales excellent dans la technique du coup d’Etat, mais fort peu dans la défense de leurs pays, et ce malgré les milliards d’euros déversés sur elles par l’Europe ainsi que des centaines de « conseillers techniques » censés les former sur place. Cela ne marche tout simplement pas. Probablement la présence des forces militaires françaises empêche, au moins provisoirement, les religieux de prendre le pouvoir à Bamako et dans les capitales avoisinantes, mais, à moins de les y laisser à vie, ce moment viendra un jour, de gré ou de force.

La junte militaire malienne au pouvoir est d’ailleurs encline à négocier avec ces groupes religieux et sécessionistes, si elle n’a pas déjà commencé à le faire. Les populations locales, très naturellement, commencent à contester et rejeter la présence armée de la France dans leurs pays. Il se murmure que les chefs militaires français sont réalistes sur l’impossibilité d’atteindre leurs buts de guerre. Les citoyens français se demandent eux-aussi pourquoi des soldats meurent dans ce désert et s’il est bien nécessaire d’y dépenser autant de sous. Toutes les conditions sont réunies pour entamer ce repli… qui vient d’être repoussé à plus tard !

Un repli ordonné marquera évidement une défaite, comme celle des Etats-Unis en Afghanistan ou en Irak, mais permettrait de façon réaliste de redéployer l’armée française sur des tâches plus efficientes comme le renforcement de la protection du territoire national, et de peaufiner la tactique du « cassage de gueule » consistant en des opérations extérieures coup de poing en tant que de besoin si les intérêts vitaux français sont menacés, mais en renonçant à occuper durablement des pays tiers. Cela n’a jamais fonctionné, ni en Algérie, ni au Vietnam, ni en Angola, ni au Mozambique… et il y a très peu de chances que cela fonctionne au Sahel.

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