A l’occasion d’une réunion multilatérale tenue à Paris sur le financement des économies africaines post-covid, la République française annonce qu’elle annule une créance d’environ 5 milliards de dollars qu’elle détient contre le Soudan. Cela veut dire que les contribuables français ne recouvriront pas 5 milliards de dollars qu’ils avaient « prêté » à ce pays.
Cette issue était bien entendu assez prévisible et annoncer officiellement cette annulation est une position hélas réaliste. En revanche, la vraie question qui n’est pas posée est de savoir par quels étranges mécanismes des décideurs français ont pu prêter 5 milliards de dollars au Soudan ces dernières années. Ce pays anglophone n’est pas particulièrement proche de la France, s’est illustré par des comportements non démocratiques, une guerre civile terrible qui a amené à la sécession du Soudan du Sud, des razzias de ses tribus esclavagistes dans toute la région, des crimes de guerre, etc. Le Soudan a abrité nombre de terroristes dont le vénézuélien Carlos, qui, finalement, sera enlevé par les services français avec l’accord tacite du gouvernement soudanais en 1994.
Comment a-t-on pu prêter 5 milliards de dollars à ce pays ? Peut-être pour favoriser la vente de produits ou de projets par des entreprises françaises ? Auquel cas il aurait mieux valu subventionner directement lesdites entreprises plutôt que de se donner l’illusion de prêter à un pays failli. 30 ans après le « discours de La Baule » par lequel le président Mitterrand annonçait que la France tempèrerait son aide en fonction de la démocratisation des pays récipiendaires, on découvre qu’elle continue de prêter les sous de ses contribuables à des débiteurs défaillants sur le plan financier comme sur celui de leur gouvernance.
Après cette nouvelle annulation de dette, en faveur du Soudan en l’occurrence, il est urgent que les mécanismes d’octroi de prêts publics, soient revus vers plus de rigueur pour empêcher l’hérésie financière que représente l’octroi d’un prêt au Soudan en 2021. S’il s’avère nécessaire que la France participe au financement du développement de ce pays il est préférable de le faire via les institutions multilatérales ou des dons bilatéraux mais en aucun cas avec les prêts publics qui ne sont que très rarement remboursés. Il est d’ailleurs permis de s’interroger sur la nécessité pour la France de financer le Soudan ? Compte tenu des moyens limités dont dispose la République il serait peut-être plus opportun de concentrer ces financements sur les pays en développement dont nous sommes plus proches.