Traduction : Maurice Betz
L’œuvre monumentale (800 pages) de l’écrivain allemand Thomas Mann (1875-1955), prix Nobel de littérature 1929, publiée dans l’entre deux-guerres : l’intrigue se déroule dans un sanatorium en Suisse, à Davos, au sein du petit microcosme des malades de la tuberculose et de leurs soignants, ceux « d’en haut » par opposition à ceux d’en-bas, habitant le « pays plat ».
Hans Castorp, jeune bourgeois allemand, vient à Davos visiter son cousin Joachim venu y soigner sa tuberculose au grand air de la montagne. Il se laissera convaincre par le directeur médical de l’établissement, Behrens, qu’il est lui aussi malade et, finalement, son amicale visite de trois semaines se transformera en un séjour médical de sept années. L’histoire ne dit pas s’il était réellement tuberculeux où s’il s’en est juste fait persuader par Behrens qui avait tendance à considérer tout le monde comme atteint par le bacille, peut-être aussi pour remplir son sanatorium.
Hans va faire connaissance de tout ce petit monde cloîtré en altitude, un révolutionnaire, une femme russe dont il tombe amoureux, un colon néerlandais, le docteur Behrens et sa curieuse vision de la maladie dans l’Humanité, un croyant qui n’a pas mené sa vocation religieuse à son terme… L’occasion pour l’auteur de développer ses vues sur le monde et ses idéologies.
Mann développe un style très analytique, très détaillé, plutôt lent, un peu proustien et toujours plein d’humour. Il décrit par le menu détail et avec une précision hallucinante tous les éléments qui composent cet environnement si particulier des sanatoriums au début du XXème siècle, fréquentés généralement par des gens aisés mais néanmoins attaqués par la maladie qui laisse son cortège de décès. La mort est partout présente même si cachée à l’attention des résidents. L’inactivité de cette population tournée vers elle-même et les soins dont elle bénéficie est propice aux discussions sans fin dans lesquels Mann place sa pensée sur la liberté, l’humanité, le temps, le marxisme, la religion… et la fin qui hante ce roman exceptionnel qui faisant écho à « Mort à Venise » écrit douze années plus tôt.
Les dernières pages voit Hans Castorp dans les tranchées de la première guerre mondiale et l’on comprend que son patriotisme en faveur de la défense de l’Allemagne fut le seul motif qui a pu le pousser à descendre de sa montagne et retrouver la vraie vie du monde « d’en-bas » !