Sortie : 2016, Chez : Editions Robert Laffont.
Cédric Bannel, né en 1966, est un auteur de romans noirs plutôt improbable : énarque, haut fonctionnaire dans les services financiers de l’Etat, parti « pantoufler » dans le privé (Renault), puis entrepreneur créateur d’entreprises financières, champion de karaté, il est aussi passionné par l’Afghanistan qui sert de cadre à des thrillers écrits sur la période guerrière contemporaine de ce pays asiatique et qui rencontrent un succès de librairie.
« Baad » est l’histoire entremêlée d’un commissaire afghan, Oussama, et d’un ancien agent français des services d’espionnage, Nicole. L’enquête du premier, à la recherche d’un tueur occidental s’en prenant à des fillettes afghanes, va percuter les recherches de la seconde en butte aux pressions de la mafia italienne qui a pris sa famille en otage pour la forcer à retrouver un chimiste français inventeur d’une nouvelle drogue ne provoquant pas d’accoutumance.
L’histoire se déroule dans les années 2000, principalement dans le cadre afghan. Bannel nous y décrit un monde fait de sauvagerie, de corruption généralisée, de trafics de drogue, d’égorgements au couteau, de conflits tribaux, de chefs de guerre sanguinaires, de dogmes religieux omniprésents, de misère, de pratiques moyenâgeuses, d’interventions occidentales désordonnées… bref, un monde apocalyptique qui n’est probablement pas très éloignée de la réalité de l’Afghanistan d’aujourd’hui.
Il met en rapport ces modes de fonctionnement avec ceux des mafias italiennes. Certains sont assez similaires quant il s’agit de massacrer, de torturer, de faire chanter, de trafiquer… la seule différence, de taille, étant qu’à Kaboul ils sont pratiqués par ce qui sert d’Etat et de gouvernants à ce pays alors qu’ils relèvent en Italie des gangs mafieux, même si parfois une certaine complaisance étatique a pu être mise à jour dans le passé.
Dans son prologue Bannel écrit :
Au-delà de la trame romanesque et policière, j’espère que les lecteurs partageront mon amour de cet Afghanistan-là, avec ces paysages uniques, sublimes et majestueux, et de tous ceux qui y vivent, si attachants en dépit de la violence, du dénuement et de l’instabilité politique.
Pas sûr que l’objectif de Bannel de faire aimer ce pays à ses lecteurs ne soit atteint, sauf à ceux qui sont attirés par l’enfer terrestre.
« Baad » se termine bien et le « gentil » triomphe finalement des méchants. On voit aujourd’hui que la passion de Bannel pour l’Afghanistan l’a aveuglé car ce qui qui se passe en 2022 dans ce pays, six ans après l’écriture du roman, montre à quel point toute fin heureuse (au sens occidental du bonheur) est définitivement exclue !
Les romans de DOA situés dans le même paradigme étaient plus réalistes et crédibles.