Sortie : 1958, Chez : Editions Mondiales.
Jean Hougron (1923-2001) a passé cinq années aventureuses en Indochine à partir de 1947. Commerçant, puis chauffeur de camion, puis planteur de tabac, puis marchand de bière… il parcourut le Laos, le Cambodge, la Chine, la Thaïlande à une période où la rébellion contre la colonisation française commençait à se lever. Il en revint avec des notes qui allaient fonder son œuvre « La nuit indochinoise », une somme de sept épisodes pus ou moins indépendants, dont « Rage blanche » est extrait. Avec Jean Lartéguy, Hougron est devenu l’un des auteurs clés de la vie des colonies françaises dans la seconde moitié du Xxème siècle, toujours entre guerre et commerce, tiraillées entre indépendance et compromission.
Ce roman raconte l’histoire d’un colon français, Legorn, exploitant une ferme dans les hautes vallées du Laos. Dès les premières pages on apprend que sa femme et leur fils sont morts au cours d’une attaque sur la piste les menant de Vientiane à leur village. Il va enquêter pour savoir qui a mené cette attaque : les rebelles du Vietminh ou un colon concurrent de sa vallée.
Et l’enquête nous amène à plonger dans le monde interlope où évoluent colons européens et colonisés asiatiques. Ce ne sont que basses histoires d’intérêts contradictoires, de commerces douteux (le business d’opium n’est jamais loin), de pouvoirs contestés et contestables, mais aussi de courage pour développer des activités dans des conditions difficiles. Il y a de rapides fortunes qui se créent et des faillites retentissantes qui dépouillent. Souvent la vie des acteurs ne tient qu’à un fil.
C’est une espèce de far West asiatique magnifiquement rendu par le style de Hougron décrivant précisément l’atmosphère chaude, humide et malsaine de ces tropiques, perceptible en tournant les pages. Pour sont qui ont déjà été victime de crise de paludisme, sa description de telles crises est stupéfiante de réalisme.
Hougron retrace une époque révolue qui a marqué l’histoire de France et l’esprit d’aventure de certains de ses citoyens, pour le meilleur et, souvent, pour le pire.