« La femme la plus riche du monde » de Thierry Klifa

C’est l’histoire de Liliane Bettencourt, jouée par Isabelle Huppert, mise en scène par Thierry Klifa. Un avertissement après le générique informe les spectateurs que ce dernier a pu prendre quelques libertés avec la vérité vraie de cet incroyable feuilleton financiaro-politique, familial et amoureux qui occupa l’actualité française à

la fin des années 1990 avec les aventures de Mme. Bettencourt, héritière de l’empire L’Oréal créé par son père, faisant d’elle l’une des femmes les plus riches du monde.

L’histoire tourne bien sûr autour de l’amitié-amoureuse portée par la vieille dame au jeune homosexuel, photographe-artiste-écrivain, joué par Laurent Lafitte, descendu dans sa vie par hasard et qui va l’enchanter de sa bonne humeur et de ses provocations. Il la distrait du milieu guindé des affaires, du CAC40 et de Neuilly où elle promène sa morgue et son ennui, entre son mari, leur fille unique et toute une valetaille aux ordres. Il la rejoint dans son hôtel particulier en mobylette et pour le remercier de cette joie de vivre dans laquelle il la plonge elle commence à le couvrir de cadeaux, mais les « cadeaux » d’une richissime Mme. Bettencourt se chiffrent en millions d’euros, voire en dizaines de millions… au point d’inquiéter sa fille qui accuse Banier d’abus de faiblesse contre la personne de sa mère pour lui détourner une (petite) partie de son immense fortune. Tout ceci se termine en justice puis finalement se règle dans le secret dans cabinets d’avocats pour éviter trop de scandale public.

Le film croque savoureusement ce conflit entre mère, fille et le trublion Banier, avec les milliards d’euros qui planent sans cesse au-dessus de cette histoire de famille où se mêlent ambition, égoïsme, rancune, jalousie et, pour couronner le tout, un peu de passé collaborationniste et antisémite qui remonte à la surface. Les acteurs dans le film portent des noms différents des véritables personnages mais de façon très transparente. Evidemment on ne sait pas ce qui s’est dit dans les salons feutrés à Neuilly de cette très grande bourgeoisie mais de ce que la justice a révélé on peut imaginer que le film est assez proche de la réalité de la famille Bettencourt. Liliane n’est d’ailleurs pas décrite comme une simple potiche siégeant au conseil d’administration de L’Oréal mais comme une dirigeante qui continua de développer le groupe de cosmétique fondé par son père avant de passer la main.

On s’attendait peut-être à un scénario plus moqueur et ironique, il n’en n’est rien. Malgré quelques passages désopilants comme celui où Liliane, au siège de la compagnie, tape sur un distributeur de boisson pour en extirper une bouteille ignorant complètement qu’il faut d’abord mettre une pièce dans la machine… évidemment, elle n’est pas habituée à payer elle-même ses consommations, le film est plutôt sérieux et précis, sans être méchant, dans son récit de la comédie humaine de cette bourgeoisie d’élite.