Saint-Exupéry Antoine de, ‘Pilote de guerre’.

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Sortie : 1943, Chez : Editions Gallimard.

Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) avait 40 ans lorsque l’Allemagne envahit la France pour la troisième fois en moins d’un siècle. Pilote émérite des premières heures de l’aviation, il s’engage dans l’armée de l’air et sert comme capitaine dans l’escadrille de reconnaissance 2/33. Après l’armistice il s’exile aux Etats-Unis où il écrira une partie de son œuvre, dont « Pilote de guerre », avant de revenir dans l’armée de l’air en Afrique du nord. Sur son insistance, il sera de nouveau autorisé à voler malgré son âge et son embonpoint, pour des missions de reconnaissance. Il sera abattu le 31 juillet 1944 au-dessus de la Méditerranée du côté de Marseille.

Dans ce roman Saint-Ex saisit l’occasion d’un vol d’observation au-dessus de la France, alors que l’armée allemande a lancé son invasion sur l’hexagone, pour laisser divaguer ses pensées : le froid et l’altitude, la protection des nuages, le feu allemand, le risque de ne pas revenir vivant à la base et la terre qui paraît vide à dix mille mètres d’altitude mais qui révèle les signes de la présence de l’homme, de ses réalisations, les routes, les canaux, les convois…

A terre c’est l’exode de la foule qui fuit devant l’avancée allemande. Vu des airs ce sont « des routes noires de l’interminable sirop qui n’en finit plus de couler. » Mais alors que son avion traverse les nuages pour se rapprocher du sol au-dessus d’Arras sa réflexion revient plus près de la terre des hommes, du poids de la défaite pesant sur tous les enfants de France. Quand la notion d’homme devrait être l’essentiel nous avons oublié l’égalité, la liberté, la charité, et nous avons perdu l’homme au profit de l’individu !

S’il avait survécu jusqu’à notre XXIème siècle, le pilote-philosophe serait fort marri de constater combien son constat n’a fait que se renforcer pour conduite la civilisation à sa propre décadence. Comme toujours les écrits de Saint-Exupéry relèvent autant du conte philosophique que du récit ou du roman. Inspiré par la dévastation de la France, écrit dans son exil américain, il en sort une vision plutôt sombre de l’état de l’humanité que viennent souligner les illustrations tragiques de la première édition datant de 1942, de Bernard Lamotte, ami de l’écrivain, magnifiquement publiées dans cette nouvelle édition Gallimard.