La Turquie n’est pas contente

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Lors d’une de ses déclarations faites en Algérie à l’occasion de sa visite « officielle et d’amitié » le président français a évoqué le fait que :

« Beaucoup de réseaux qui sont poussés en sous-main qui par la Turquie qui par la Russie et qui par la Chine, ont un ennemi la France. Et ils ont un agenda d’influence, néo-colonial et impérialiste. Il y a un ennemi simple c’est la France, ça met tout le monde d’accord »

Cet état de fait a déclenché l’ire de la Turquie qui n’aime pas qu’on lui rappelle son passé impérial qui était finalement assez proche du statut d’une puissance colonial. A son apogée au XVIIIème siècle l’empire ottoman, qui a duré six siècles, occupait toute la bande côtière du sud de la Méditerranée, de l’Egypte à l’Algérie, le Moyen-Orient (Palestine, Syrie, Irak, Iran) et une partie de l’Europe (Grèce, Bulgarie, pays balkaniques). L’échec du siège de Vienne l’empêcha d’aller plus loin en Europe. La philosophie de l’occupation ottomane était un peu différente du concept colonial français en Algérie, basé sur une colonisation de peuplement, mais la réalité était bien l’occupation de terres étrangères pour accroître le territoire de l’empire de la Sublime Porte.

Comme tous les empires, l’empire ottoman s’est délité, d’autant plus rapidement qu’il avait pris parti pour l’Allemagne lors de la 1ère guerre mondiale. Il a donc été démantelé. Comme tous les anciens empires gouvernés désormais par des régimes autoritaires et nationalistes, la Turquie d’aujourd’hui est nostalgique de son passé glorieux et cherche à rétablir son influence d’antan.

Le porte-parole du ministère turc des affaires étrangères a publié hier le communiqué suivant :

Il est extrêmement regrettable que le président français, Emmanuel Macron, ait fait des déclarations visant la Türkiye, ainsi que d’autres pays, lors de sa visite en Algérie.

Il est inacceptable que le président français Macron, ayant du mal à affronter son passé colonial en Afrique, notamment en Algérie, tente de s’en débarrasser en lançant des accusations contre d’autres pays, dont la Türkiye.

La Türkiye, qui prône l’amitié plutôt que l’hostilité, et qui figure parmi les partenaires stratégiques de l’Union africaine, développe jour après jour ses relations avec l’Algérie et d’autres pays du continent africain. Ces relations, fondées sur la confiance mutuelle et le principe du gagnant-gagnant, progressent dans le respect de la volonté des pays eux-mêmes.

Si la France est d’avis qu’il y a des réactions contre elle sur le continent africain, elle devrait chercher la source de ces réactions dans son propre passé colonial et dans ses efforts pour poursuivre encore ces pratiques à travers les méthodes différentes, et elle devrait essayer de les réparer. Le fait de prétendre que ces réactions sont causées par les activités des pays tiers, plutôt que d’affronter et de résoudre les problèmes liés à son propre passé, c’est non seulement un déni des faits sociologiques et de l’histoire, mais reflète également la mentalité déformée de certains hommes politiques.

Nous espérons que la France atteindra le plus rapidement possible la maturité nécessaire pour faire face à son propre passé colonial sans accuser d’autres pays, y compris le nôtre.

QR-23, 27 août 2022, Déclaration du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, l’ambassadeur Tanju Bilgiç, en réponse à une question concernant les déclarations du président français, Emmanuel Macron, visant notre pays

C’est un communiqué plutôt malin vu d’Ankara, assez facile à rédiger et qui a dû provoquer une grande satisfaction chez tous les dirigeants turcs. La presse des pays africains s’est empressée de largement diffuser des extraits de ce communiqué qui a certainement aussi enthousiasmé toutes les populations africaines. La France a tout contre elle dans cette affaire et va devoir boire le calice jusqu’à la lie comme prix à payer pour acheter du gaz à son ancien « département d’Algérie » !