PéAN Pierre, ‘Main basse sur Alger – enquête sur un pillage / juillet 1830’.

Sortie : 2004, Chez : Plon.

Pierre Péan (1938-2019) est un journaliste d’investigation, plutôt tourné vers la polémique, qui s’est spécialisé dans les relations entre la France et l’Afrique, avant et après la décolonisation. Il nous livre ici sa version de la véritable raison de l’invasion de l’Algérie en 1830 par les troupes commandées par le maréchal de Bourmont, sous l’autorité du roi Charles X. Il apparaît que le dey d’Alger, le plus haut représentant ottoman sur place qui avait autorité sur Alger et une bonne partie du pays, était à la tête d’un trésor assez significatif qui aurait attiré les convoitises de Charles X pour financer ses opérations secrètes contre son opposition menée par Louis-Philippe car la révolte grondait en France et allait aboutir à la révolution de 1830 qui fit tomber Charles X et mena à son remplacement par Louis-Philippe. A priori les fonds volés au dey d’Alger arrivèrent bien tard et ne purent sauver la couronne de Charles X.

Officiellement l’expédition de 1830 fut initiée pour se venger de l’affront diplomatique qui vit le dey « souffleter » le consul de France pour une histoire de dette française (déjà…) non réglée à Alger. Péan affirme que ce ne fut qu’un prétexte car la véritable motivation était de mettre la main sur le magot estimé à plusieurs milliards d’euros en valeur d’aujourd’hui. Une part fut quand même remise au Trésor public et rentra officiellement dans les caisses de l’Etat français, mais une autre partie, non négligeable, aurait été orientée vers les fonds secrets à la disposition du roi, le solde étant pillé par les officiers et les soldats de l’expédition.

La thèse du sac d’Alger est fort plausible, elle n’est d’ailleurs pas incompatible avec celle du coup d’éventail porté par le dey au consul. A l’époque, lorsqu’un empire européen envahissait un pays africain ce n’était pas pour y conter fleurette et d’ailleurs l’Algérie fut annexée à la France au royaume de France en 1834 après une conquête violente.

Par contre, ce que Péan ne dit pas dans son enquête c’est d’où venait ce trésor du dey d’Alger ? Tout à son souci permanent de plonger dans la noirceur de l’histoire de France il semble en oublier que les pratiques ottomanes n’étaient pas non plus particulièrement tendres à l’égard des pays occuppés par l’empire ottoman… Les Barbaresques ont écumé la Méditerranée durant des siècles à partir du XVIe, moitié-pirates, moitié-corsaires, le principe était que des navires musulmans attaquent les bateaux chrétiens, notamment pour y capturer de futurs esclaves. Nombre de villes côtières du nord furent aussi razziées par les Ottomans qui remontèrent jusqu’en Grande-Bretagne et même en Islande pour exercer leur traffic d’esclaves. Alger était l’une des places fortes de la piraterie ottomane. L’origine du magot du dey d’Alger pillé par la France en 1830 n’était sans doute pas aussi blanche que la colombe mais Pierre Péan reste muet sur ce sujet…