« Valeur sentimentale » de Joachim Trier

C’est un film émouvant que nous livre le réalisateur norvégien Joachim Trier. Une histoire de famille centrée sur deux sœurs aux parcours bien différents, et un père réalisateur sur le retour et absent. Nora l’aînée fuit son père fuyant et consacre sa vie au métier d’actrice. Agnes qui a toujours été dans l’admiration du père est historienne, mariée. Elle a un fils. Leur mère qui était psychologue vient de mourir de maladie. Tout se passe dans une maison de ville norvégienne en bois rouge. Pèse sur cette famille l’image d’une grand-mère qui a été arrêtée et torturée par les occupants Allemands durant la dernière guerre mondiale pour faits de résistance, sans doute dénoncée par des voisins, et qui s’est pendue dans la maison familiale dix années plus tard…

Le père réapparaît à l’occasion du décès de sa femme dont il était séparé, créant le trouble chez ses filles car avec lui reviennent les souvenirs douloureux d’un passé familial à la dérive que chacune a géré à sa façon, le plus souvent en occultant ce père créateur et distant. L’affaire est d’autant plus tortueuse qu’il revient avec un ultime scénario dont il souhaite que Nora soit l’interprète principale. Elle refuse bien entendu et ne le lit même pas.

Mais lors d’une émouvante rencontre avec sa jeune sœur elles vont découvrir que ce scénario est en fait une tentative de rédemption du père vis-à-vis de ses filles, et particulièrement de Nora qui commit une tentative de suicide dans sa jeunesse, évènement resté secret entre elles-deux mais transparaissant dans son mal-être qui n’a donc pas échappé à son père malgré son absence.

Les choses vont se terminer heureusement, la réconciliation arrive et chacun fait un pas vers l’autre sous le regard positif d’Agnes qui, elle, a déjà joué dans un film de son père lorsqu’elle était enfant dans une histoire de guerre où elle assistait à l’arrestation de son frère par les Allemands…

Une histoire filiale, de recherche du père, de sororité, de transmission de traumatisme à travers les générations, bref, une histoire presque banale mais que Trier a su fixer sur la pellicule avec beaucoup de justesse et de sensibilité. Le film a reçu le Grand Prix au Festival de Cannes 2025.