Sortie : 2008, Chez : Gallimard / folio 4950.
C’est un livre jouissif que ce roman de Boualem Sansal sur les pérégrinations de deux fils, Français, immigrés algériens de la deuxième génération, à la recherche du passé de leur père. Celui-ci, Allemand, a fait la IIe guerre mondiale sous les couleurs de la SS, avant de se retrouver en Algérie durant la gerre d’indépendance, de devenir un combattant moudjahid dans les rangs du FLN, puis un chef de village respecté dans l’Algérie indépendante avant de finir égorgé par des terroristes islamiques avec sa femme et une partie du petit village où il passait ses vieux jours.
Son fils aîné, ingénieur, parti à la recherche de ce sombre passé, repasse par tous les lieux fréquentés par son père, d’Auschwitz à Istanbul, pour reconstituer le parcours de ce père inconnu. Il ne supportera pas tout ce qu’il découvre. Son petit frère, gamin de la banlieue parisienne envahie par l’islamisme rampant des cités, reprend le flambeau de son frère à la poursuite de l’histoire de ce père trouble. Les deux frères ont rédigé un journal de leurs recherches et le roman s’articule autour de ces documents, le plus jeune découvrant celui de son aîné et le commentant.
Par la voix des deux frères, Sansal ne manque pas de faire un parralèle entre le nazisme et l’islamisme, entre les meurtres des camps d’extermination et ceux des terroristes religieux qui ont mis l’Algérie à feu et à sang durant les années 1990 (avec des conséquence délétères en France). La description de la vie dans les cités de banlieue françaises est souvent désopilante quand on la prend au premier degré, un peu plus inquiétante au second.
Le style de l’écriture est enlevé. La voix du frère aîné est tragique au fur et à mesure où il découvre le passé criminel de son père. Celle du cadet est plus légère et insouciante. Le mélange des deux journaux fait alterner le douloureux et le burlesque, c’est ce qui fait aussi la grande qualité de ce livre sur le sujet éternel des relations franco-algériennes.
Quand on referme l’ouvrage après sa dernière page, on comprend mieux l’acharnement des autorités algériennes d’aujoud’hui contre l’auteur qui a la double nationalité franco-algérienne et qui se rend coupable de lèse-majesté en critiquant ainsi son pays d’origine…