Kadhafi est mort après 42 années de dictature et de compromissions. Son régime a trempé dans toutes les combines politico-terroristes de la deuxième moitié du XXème siècle. Il s’est fâché puis réconcilié puis re-fâché avec la plupart des nations du globe. Il a financé un terrorisme sanglant dans toutes ses composantes (anti-Occident, pro-Palestine, Irlande, Corse, etc.), il a participé à la traque anti-Al Quaida pour se refaire une virginité, il a acheté des armes aux uns qu’il a refourguées aux autres, il a imposé ses lubies délirantes à son pays, il a corrompu et compromis les élites libyennes (qui composent aujourd’hui la majorité du nouveau pouvoir révolutionnaire), il a placé ses fils en prévaricateurs assoiffés et successeurs potentiels, il a ouvert des conflits diplomatiques sur des humeurs, pris des otages au hasard de ses impulsions qu’il a revendus selon ses nécessités, il a réussi à faire plier nos démocraties européennes qui, oubliant l’honneur, sont allées mettre un genoux à terre sous une tente bédouine au milieu de nulle part pour quelques illusoires contrats publics. Certaines, notamment la France (hélas ! hélas ! hélas !) envisageaient même de lui vendre avions de combat et centrales nucléaires. Dieu merci nos commerçants en armes n’ont pas eu le temps de mettre en œuvre ces funestes projets.
Kadhafi est mort, c’est ainsi que souvent disparaissent les dictateurs. Il ne pourra plus rendre de compte mais il faudrait tout de même en demander à ceux qui restent, quelque soit le moment où ils auront tourné leurs vestes. Le premier d’entre eux est Moussa Koussa qui est passé à Londres au début de la révolte libyenne avec secrets et bagages, il a dirigé les services barbouzards locaux durant des années et même s’il a œuvré ensuite pour réintégrer la Lybie de Kadhafi dans le concert des nations, il a trempé, voire inspiré, nombre de complots internationaux. Il faut qu’il rende des comptes, même si ceux-ci compromettent les puissances occidentales, plutôt que de passer une retraite paisible au Royaume-Uni.
Le second sur la liste, Abdullah Senussi, risque de passer un plus mauvais quart d’heure car il est resté fidèle à Kadhafi (son beau-frère). On l’a vu ces jours-ci le visage tuméfié aux mains des rebelles, il n’est pas bien sûr qu’il survive jusqu’à un improbable procès local. Il a été condamné par contumace en 1999 à une peine de prison à perpétuité par la justice française dans l’affaire de l’explosion du DC 10 d’UTA. Il est mis en examen par la Cour pénale internationale depuis le début de la révolution libyenne pour « meurtre et crimes contre l’humanité ». Il doit rendre des comptes quelque soient les conséquences que ses révélations auraient pour nos démocraties qui se sont compromises avec lui.