ALEXIEVITCH Svetlana, ‘Les cercueils de Zinc’.

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Sortie : 1990, Chez : Titre 16

Un nouveau récit documentaire de cette écrivaine biélorusse, cette fois-ci consacré à la guerre soviétique en Afghanistan, un conflit sordide où des gamins ont été envoyés comme « une avant-garde internationaliste » soutenir un pays « frère » pour lui assurer un « avenir radieux » durant toute la décennie des années 80′. L’Union soviétique était déjà moribonde, dirigée par un quarteron de vieillards idéologues et cyniques, qui s’imaginaient encore faire surnager leurs vielles lunes marxisantes.

Il en est résulté une guerre qui a ravagé l’Afghanistan soit disant communiste et laminé une génération de jeunes soviétiques qui y perdra ses illusions pour ceux qui en revinrent. Il y au 20 mille morts soviétiques plus de nombreux blessés, plus d’un million de morts coté afghan, majoritairement civils. L’Union soviétique évacua ce bourbier fin 1989.

Comme à son habitude Svetlana interroge et écoute, d’anciens combattants soviétiques et des mères de combattants revenus ou morts au front. Le résultat est terrible, les soldats décrivent cette planète Afghanistan sur laquelle ils débarquent, non préparés et intoxiqués à la propagande du parti. Sur place ils vivent des heures sinistres et des combats sauvages : ils sautent sur des mines, sont mitraillés par des snipers aussi mobiles que la puissante armée soviétique est inerte, les prisonniers sont massacrés par les résistants islamiques et en retour les commandos soviétiques se livrent à des atrocités. Chacun se bat pour une cause mais il y a un envahisseur et des combattants qui défendent leur terre.

Les soviétiques perdent rapidement le moral, ils sont de plus mal équipés alors ils revendent leurs propres armements à leurs ennemis pour trafiquer, voire s’enrichir avant la quille. On retrouve dans ces récits les souvenirs des soldats américains au Vietnam, ou français en Algérie. Les contextes et les époques sont différents, mais la fin est toujours la même, que ce soit les guerres d’indépendance ou les conflits idéologiques, les envahisseurs repartent panser leurs plaies au bout d’un moment après la signature d’un vague traité de paix ou d’indépendance, bafoué dès qu’ils ont le dos tourné.  Le traumatisme national pour le pays envahisseur/colonisateur met plusieurs siècles à s’atténuer, celui du pays envahi/colonisé est tout aussi durable. Les haines ne s’effacent jamais plus.

Svetlana fait aussi parler nombre de mères orphelines de leurs enfants morts en Afghanistan. Ce sont chaque fois les mêmes cris de douleurs et d’incompréhension face à la mort de leurs petits, souvent dans des conditions effroyables, et tout ça pour quoi ? Pour une déroute.
Les derniers chapitres est consacré aux attaques violentes dont a été victime Mme. Alexievitch de la part d’associations d’anciens combattants qui l’ont accusée, y compris en justice, de les avoir fait passer dans ce livre pour des tueurs-violeurs alors qu’ils défendent n’avoir fait que leur devoir, appelés par la patrie. Ils défendent leur statut de héros mais au fond elle les décrit comme des victimes.

Ces guerres coloniales ont toujours été des désastres, celle d’Afghanistan lancée dans les années 80′ continue aujourd’hui à générer ses effets mortifères sur la planète.

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