TESSON Sylvain, ‘Berezina’.

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Sortie : 2015, Chez : éditions Guérin

Sylvain Tesson, raider professionnel, écrivain occasionnel, nous emmène cette fois-ci dans un remake de la retraite de Russie de l’Empereur Napoléon 1er. Russophile et admirateur de l’empereur, il va faire un Moscou-Paris (les Invalides) avec deux side-cars et une bande de potes, le tout en plein hiver, comme il se doit. Le drapeau de la Grande Armée est planté sur l’une des nacelles et le bicorne de l’empereur remplace le casque à l’étape.

C’est l’occasion de retracer l’épopée dramatique de la Grande Armée défaite par l’hiver et les soldats russe de Koutouzov : des centaines de milliers de morts des deux côtés pour en revenir à la situation frontalière de départ et au renversement des alliances, finalement la Russie s’alliera à l’Anglais pour faire tomber Napoléon définitivement.

Tesson profite de chaque étape de ses side-cars pour revenir sur la fuite dantesque des officiers et soldats de Napoléon, melting-pot de nombreuses nationalités. Il s’agit du froid glacial, de pillages, de massacres, de déroute, mais surtout d’énergie vitale pour essayer de sauver sa peau et de rallier la France.

200 ans plus tard le péril est moindre, il s’agit plutôt d’éviter les camions sur les routes enneigées que d’échapper aux raids de Koutouzov. Notre joyeuse bande de raiders franco-russe ingurgite des quantités de vodka gargantuesque (« cristalline comme l’eau de Savoie ») et se réchauffe à l’évocation de la fuite éperdue de Napoléon. La petite bande voue une admiration sans borne à l’empereur, les russes car il leur a permis de le battre, Tesson car il est un symbole de l’aventure tragique et inutile. En nos temps d’individualisme forcené il rend hommage au sens du sacrifice de ces hommes, enthousiastes à l’idée de mourir « … pour une idée abstraite supérieure à nous-mêmes, pour un intérêt collectif et -pire- pour l’amour d’un chef ».

Et puis il vénère l’âme russe, « une capacité à laisser partout des ruines, puis à les arroser par des torrents de larmes », bref, une défaite militaire au cœur de la grande Russie est le cadre idéal pour un récit de Tesson, conquérant de l’inutile.

Le final se passe aux Invalides où la petite bande gare ses side-cars après 4 000 km de route, rejointe par quelques amis. Sous la statut de son héros, Tesson clos son ouvrage :

« Qui était Napoléon ? Un rêveur éveillé qui avait cru que la vie ne suffisait pas. Qu’était l’Histoire ? Un rêve effacé, d’aucune utilité pour notre présent trop petit. »

puis rentre prendre une douche. Un livre sympathique pour mieux connaître un auteur orignal.