Comme souvent, à situation équivalente, la France va dépenser plus d’argent public (celui des contribuables) que d’autres pays occidentaux pour essayer d’amortir les effets économiques dramatiques de la crise sanitaire en cours. De prêts garantis par l’Etat en fonds de secours d’urgence, de mesures de chômage partiel en annulations de charges, les contribuables français se sont engagés dans des dépenses considérables, qui vont peser sur les finances publiques pour des décennies. Comme toujours en France, les revendications sociales sont fortes et même accrues à la suite de cette crise. Durant la période de confinement, ceux qui ont fait leur travail sur le terrain veulent des augmentations de salaires pour risques pris (personnel soignant, employés des magasins de distribution alimentaire, éboueurs, etc.), ceux qui ont été mis en chômage partiel (financé par l’Etat et non leurs employeurs) se verraient bien poursuivre ainsi jusqu’à que le risque soit complètement circonscrit et ceux qui sont d’ores et déjà sans emploi émargent en masse à l’assurance chômage.
Tout le monde se plaint, tout le monde critique, tout le monde attaque l’Etat, chacun en veut plus pour sa corporation et se scandalise qu’elle ne soit pas considérée comme prioritaire et pendant ce temps les contribuables se sont fouiller les poches sans même s’en apercevoir. Les experts de plateaux télévisés regardent leurs courbes d’audience, sondent l’humeur de Mme. Michu sur l’Hydroxychloroquine et l’interroge : « Etes-vous en faveur de l’augmentation des salaires du personnel soignant ? Oui-oui-oui » en oubliant la question conséquente : « Etes-vous prête à payer plus de cotisations sociales ? Non-non-non ! ».
En réalité le robinet des aides publiques est déjà largement ouvert et coule à flot. Le chroniqueur a pu constater qu’il a été crédité en 8 jours du chômage partiel de son employée de maison, que l’association d’insertion qu’il conseille a obtenu la garantie de l’Etat pour un prêt bancaire de 30 000 euros sur simple déclaration sur le site Internet de la Banque publique d’investissement (BPI), qu’un petit commerçant qu’il aide dans sa gestion a touché deux fois 1 500 euros d’aide en avril et en mai compte tenu de la fermeture de son magasin (soit plus que son salaire mensuel), etc. Il serait peut-être opportun que quelques journalistes regardent un peu plus loin que la niche fiscale dont ils bénéficient indûment, pour constater, chiffrer et relater ce qui fonctionne dans notre pays au lieu de chercher sans relâche à mettre en difficulté leurs interlocuteurs politiques.
Les décideurs français sont à l’image de leurs électeurs et gèrent une crise, incroyable il y a encore 6 mois, comme ils le peuvent. Il y a certainement des erreurs commises, il y a des changements de pieds, il y a des questions sans réponse un jour dit, il y a des décisions prises qui ne satisfont pas tout le monde, il y a 26 000 morts connus à ce jour (sur une moyenne annuelle d’environ 650 000 en régime de croisière) mais la situation est gérée sans doute pas plus mal que dans les pays avoisinants. La seule chose que cette crise ne semble pas en voie de régler est le pessimisme tapageur des français, leur propension à se plaindre de tout et leur réflexe pavlovien à critiquer tout le monde sauf eux-mêmes.