« The Big Short » d’Adam McKay (2015)

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Un film passionnant pour expliquer la spéculation « à la baisse » menée par quelques aventuriers de la finance lors de la crise des subprimes de 2008 qui avaient eu la clairvoyance d’anticiper l’effondrement du marché de ces titres hypothécaires. Comme ils étaient spéculateurs, eh bien, ils ont spéculé et ont gagné beaucoup d’argent. C’est la base de la finance : un jeu à somme nulle, ce que perdent les uns est gagné par les autres, sauf lorsque tout s’effondre, ce qui aurait été le cas en 2008 si les contribuables privés n’étaient pas venus au secours des spéculateurs.

Les noms des vrais personnages sont repris par le scénario, les techniques utilisées sont détaillées (Credit Default Swap [CDS], Collateralized Debt Obligations [CDO], Mortage Backed Securities [MBS]…), mais il est mieux d’avoir un peu de culture financière pour tout suivre, et le déroulement haletant de cette incroyable explosion des marchés due à la rapacité sans limite d’une bande de forbans de la finance se croyant au-dessus de tout et de tous. Le plus extraordinaire dans cette affaire fut qu’ils furent sauvés par les contribuables car ils étaient « too big too fail », la chute de leurs établissements qui aurait été moralement justifiée aurait entraîné encore plus d’inconvénients économiques que leur sauvetage.

Certains des personnages du film affichent quelques états d’âme lorsqu’ils réalisent la manière dont ils s’enrichissent : spéculer à la baisse des titres hypothécaires (CDO) signifie que, si elle se réalise, des millions de petits propriétaires qui eux-mêmes spéculaient sur la hausse de leurs biens immobiliers vont être expropriés, voire ruinés. C’est ce qui s’est passé dans la vraie vie. La morale de l’histoire fut aussi qu’un monde basé uniquement sur la spéculation fait perdre la tête à ses acteurs qui renoncent à tout sens de la mesure, et même à l’intelligence. L’Etat américain n’a pas été non plus sans tâche dans cette histoire car en autorisant, voire favorisant, l’octroi de financements bancaires au « petit peuple » pour lui permettre ainsi de bénéficier de la hausse du marché immobilier, il donnait à ces citoyens un moyen d’arrondir leurs fins de mois sans y contribuer avec des fonds publics, jusqu’à ce que la hausse de l’immobilier s’inverse, ce qui ne devait pas manquer d’arriver, et arriva !

Il fallut une dizaine d’années pour que la planète financière et le marché immobilier récupère ses pertes. Il y eut quelques réformes des marchés financiers internationaux pour cantonner certains excès du monde financier, mais sans doute pas au point d’assainir un système qui porte en lui les germes de crises régulières. Heureusement les contribuables restent fidèles au rendez-vous pour absorber les débordements jusqu’à, peut-être, la super-crise qui fera tout exploser.

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