L’assemblée générale des Nations Unies (ONU) a voté ce 23 février une résolution demandant le retrait des troupes russes de l’Ukraine. 141 sur des 193 Etats membres se sont prononcés :
- 7 ont voté contre – Russie, Biélorussie, Syrie, Corée du Nord, Mali, Nicaragua, Erythrée
- 32 se sont abstenus, dont la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud
- Et donc 102 ont voté pour
Cette résolution mentionne qu’elle « exige de nouveau que la Fédération de Russie retire immédiatement, complètement et sans condition toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues du pays, et appelle à une cessation des hostilités » (https://news.un.org/fr/story/2023/02/1132607)
Le délégué russe s’est exprimé au cours du débat précédant le vote pour rappeler la position de son pays, c’est-à-dire celle d’une « guerre contre l’Occident pour la survie, pour l’avenir de notre pays et de nos enfants, et pour notre identité » et celle de « la renaissance du néo-nazisme en Ukraine et la glorification de criminels du nazisme » qui justifierait aussi le combat russe.
Rien de nouveau à ce stade, une partie de ce que dit la Russie, avec excès bien entendu, n’est d’ailleurs pas tout à fait inexact mais son péché originel restera d’avoir déclenché la guerre et que son armée et ses milices se comportent sur le terrain comme des forbans sans foi ni loi ce qui, vu de « l’Ouest collectif », est contraire au droit international, mais pour les pays qui la soutiennent et ceux qui se sont abstenus (c’est à dire la majorité de la population de la planète) est un mode de gouvernance « normal ». Là est le souci de l’Occident : il est minoritaire en nombre mais semble néanmoins présenter quelque intérêt pour tous ces autocrates et oligarques qui investissent massivement en Occident et envoient leurs enfants dans les universités américaines. La vraie question serait de comprendre pourquoi un oligarque russe dépense des dizaines de millions pour acquérir des villas de nabab à Saint-Jean Cap-Ferrat plutôt que sur les bords de Mer Noire ? Pourquoi un milliardaire chinois rachète à grand frais des vignes dans le Bordelais plutôt que de se lancer la viticulture dans son pays d’origine ?
L’attractivité de « l’Ouest collectif » pour ces régimes autoritaires, dits par fois « illibéraux », reste forte. La guerre d’Ukraine va probablement rebattre les cartes. Déjà les oligarques russes qui l’on put sont allés ancrer leurs yachts clinquants sur les bords de la Mer de Marmara ou dans le Golf persique. La mise sous sanctions occidentales d’un certain nombre de hiérarques russes va probablement leur faire mieux comprendre le concept de « risque politique » : quand on investit à l’étranger, cela peut rapporter plus mais on est aussi soumis aux potentielles humeurs du pays où l’on dépense ses sous, risque qui est moindre lorsqu’on investit chez soi où, cependant, existe un risque fiscal significatif. La Russie pourra toujours investir chez ses nouveaux amis mais il n’est pas sûr que le Mali ou le Nicaragua attisent véritablement l’appétit des investisseurs russes.
L’Histoire dira si l’Occident, même minoritaire au niveau « des valeurs » dans cette guerre d’Ukraine, reste néanmoins le leader en termes d’attractivité, d’innovation et de réussite économique ! En cela, cette guerre sauvage annonciatrice de révisions déchirantes pour le monde de demain, ou pas !
Déclaration du délégué russe
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a souligné qu’il y a un peu plus d’un an, « l’Ukraine et ses parrains occidentaux » ont convoqué la onzième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale des Nations Unies, ce qui a prêté à confusion pour de nombreux États. Depuis lors, de nombreux pays ont compris ce qui s’est passé et ce qui se passe, et le camp occidental a beaucoup plus de difficulté à mobiliser les États Membres de l’ONU en faveur de leur croisade contre la Russie, a-t-il dit. Ceci est également attesté « par un projet de résolution au rabais » qui sera mis aux voix, a relevé le représentant en le qualifiant de « texte antirusse et malveillant ». Il a rappelé que « le régime nationaliste criminel », qui est arrivé au pouvoir à Kiev grâce au soutien occidental par un coup d’État anticonstitutionnel, a mené une guerre sanglante contre les habitants du Donbass dont le seul défaut était qu’ils voulaient rester russes.
Le délégué a relevé que grâce aux révélations bien connues d’un certain nombre de dirigeants occidentaux à la retraite, il ne fait aucun doute que les accords de Minsk, approuvés par le Conseil de sécurité, avaient pour but de préparer l’Ukraine à une guerre contre la Russie. Toutes ces années, le « régime de Kiev » a poursuivi selon lui sa politique inhumaine de bombardement des villes pacifiques des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. Au vu des actes des Occidentaux en Ukraine, nous n’avions pas d’autre choix que de protéger la population du Donbass et assurer la sécurité de notre pays par des moyens militaires, a—t-il justifié. Il a exprimé les préoccupations russes de voir s’étendre l’infrastructure de l’OTAN jusqu’à ses frontières, alors que des déclarations « hypocrites » font croire que c’est la Russie qui est responsable de la destruction des systèmes de sécurité régionaux et mondiaux. Il a rappelé que fin 2021, la Russie avait pourtant avancé un certain nombre d’initiatives de désescalade et de renforcement de la confiance dans la zone euro-atlantique. Nous avons invité les États-Unis et l’OTAN à signer des accords de garanties de sécurité, a-t-il dit. Nous avons donné une chance à la diplomatie, a-t-il poursuivi, soulignant que ces propositions furent rejetées avec arrogance par les États-Unis et leurs alliés. Pourtant, si elles avaient été mises en œuvre, ces initiatives auraient permis d’éviter ce que nous voyons aujourd’hui, a-t-il regretté.
Le délégué a affirmé qu’un an après le début de la phase active de la crise ukrainienne, peu de gens doutent aujourd’hui du fait que la Russie n’est pas en guerre avec l’Ukraine, qui a gaspillé son potentiel militaire dans les premières semaines du conflit, mais plutôt avec « l’Ouest collectif » représenté par les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN et de l’UE. Non seulement ils fournissent armes et munitions à Kiev, mais ils lui communiquent également des informations du renseignement et s’entendent sur des cibles pour les frappes de missiles. Il a dit que ces alliés ont abandonné toute pudeur et fixé un objectif : armer l’Ukraine, infliger une défaite stratégique à la Russie, puis la démembrer et la détruire. Au nom de cet objectif, a-t-il relevé, ils ont fermé les yeux en Occident, et les ferment encore maintenant, sur la renaissance du néo-nazisme en Ukraine et la glorification de criminels du nazisme. Il a ensuite évoqué l’hégémonie des États-Unis et de ses alliés qui ne veulent laisser personne gouverner la planète, parce qu’ils la considèrent comme la leur et seulement la leur.
Quant à notre pays, a expliqué le représentant, nous percevons tout cela comme une guerre contre l’Occident pour la survie, pour l’avenir de notre pays et de nos enfants, et pour notre identité. Une guerre dans laquelle, comme il y a 80 ans, nous avons été défiés par un ennemi insidieux et puissant qui voulait nous soumettre, a-t-il expliqué en évoquant des chars allemands à nouveau envoyés afin de tuer les Russes. Et l’Ukraine, dans tout ce schéma, n’est rien de plus qu’une monnaie d’échange, a-t-il analysé. Selon lui, le texte soumis par l’Ukraine ne contribuera pas à la paix, car il vise plutôt à encourager l’Occident dans ses actions, à donner à nos adversaires une raison de prétendre que la Russie est soi-disant isolée dans le monde. « Cela signifie continuer la ligne militariste russophobe, en se cachant derrière un prétendu soutien des États Membres de l’ONU. » De plus, dans les conditions où beaucoup d’entre vous font face à la pression la plus sévère et le chantage de Washington et ses alliés, a lancé le représentant à l’endroit des délégations, il faut soutenir les « amendements d’équilibrage » qui sont devant vous et qui ont été présentés par le Bélarus. Si ces derniers sont rejetés, alors le projet de la résolution restera tel qu’il est maintenant : unilatéral et dénué de toute réalité, a-t-il conclu.