MERVIN Yves, ‘Joli mois de mai 1944 – La face cachée de la Résistance en Bretagne’.

Sortie : 2013.

Les mémoires d’un militant communiste breton dans les Côtes d’Armor (ex-Côtes du Nord), Edouard Quemper (1925-2015) qui fut jeune résistant durant la guerre. Il mena d’abord quelques actions qu’il qualifie lui-même comme symboliques à l’arrivée des occupant allemands dans sa région fin juin1940. Mais il s’engagea en novembre 1943 dans l’organisation des Francs-tireurs et partisans (FTP, affiliée au Parti communiste [PC]) et pris alors plus de risques. Edouard Quimper ne dit mot du pacte germano-soviétique signé en 1939 et rompu en juin 1941 par l’invasion de l’URSS par l’armée allemande. Ce n’est bien sûr que fin 1941 seulement que les organisations communistes se lancèrent dans la résistance contre les Allemands, puisque jusqu’à juin 1941 ils étaient amis…

M. Quemper mena ensuite une longue carrière de permanent du parti et fut élu dans différentes assemblées : conseil général, mairie de Saint-Brieuc (adjoint aux sports), fédération communiste du département… Engagé avec son parti dans la lutte contre la guerre coloniale française en Indochine, il est arrêté avec son groupe alors qu’ils bloquaient un train transportant des armes pour le corps expéditionnaire en 1950. Ils passent sept mois en prison avant d’être acquittés par la Justice.

Ces changements de cap n’ont pas toujours été faciles à suivre dans les campagnes bretonnes sous occupation allemande. Ceci ajouté aux tendances criminelles de certains individus plus préoccupés de piller ou de régler leurs comptes villageois que de défendre la patrie, permet à l’auteur de clôre son ouvrage par une conclusion lapidaire qui a créé un peu d’émotion, on le comprend.

Le nombre de Bretons tués par la résistance […] serait au moins trois fois plus élevé que les Allemands disparus dans les combats. Cette proportion interpelle. Elle démontre que la Seconde guerre mondiale a été, en Bretagne, une guerre civile avant d’être une guerre de libération et que la résistance a été plus dangereuse pour les Bretons que pour les Allemands.

La résistance communiste, en Bretagne comme ailleurs, suivait les instructions du Parti avec pour objectif de prendre le pouvoir au sortir de la guerre, ce que le Général de Gaulle réussit à empêcher, mais ce qui créa nombre de malentendus, parfois sanglants, sur le terrain et dans les états-majors. Il n’est pas sûr que les dérives décrites soient particulières à la Bretagne.

Le livre est une longue narration de petits évènements documentés par M. Mervin qui a manifestement fait des recherches poussées dans les archives encore disponibles sur cette période trouble. Il évoque également le cas du nationalisme breton qui aurait pactisé avec l’occupant par rejet du centralisme français. Aujourd’hui encore bruissent des rumeurs et des menaces dans les villages bretons qui abritent les descendants des acteurs de cette époque.

La ligne choisie pour ce livre manque un peu de hauteur, d’une vue d’ensemble qui permette de mieux appréhender les enjeux de la résistance bretonne. C’est aussi la raison pour laquelle il a été si fortement contesté à sa sortie en 2013.