La cathédrale Notre-Dame de Paris est rouverte au public et rencontre un franc succès. Ceux qui n’ont pas réservé en ligne font la queue dehors et ceux qui sont entrés dans l’édifice mènent une longue procession dans le sens des aiguilles d’une montre autour de la nef telle une longue colonne de chenilles processionnaires bardée d’aïe-phones.
Une partie de cette nef située près du chœur est clôturée et réservée aux fidèles assistant à la messe de midi. Des sacristains informent ceux-ci qu’il est interdit de prendre des photos depuis cet enclos. Bien entendu les fidèles n’écoutent pas et une forêt d’aïe-phones poussent au-dessus de leurs têtes. Les clergymen portant fièrement une polaire sans manches siglée « Notre-Dame de Paris » font la chasse aux photographes-pécheurs pour les rappeler aux règles de la cathédrale mais rien n’y fait et les pauvres pécheurs continuent à suivre les tentations inspirées par le Malin et à accumuler des milliers de photos ratées dans la mémoire de leurs téléphones.
Après trois « Je vous salue Marie » successifs prononcés par le prêtre officiant face à la statue de la Vierge à l’enfant du XIVe siècle, la messe débute, mise en musique avec le petit orgue et un chantre plutôt harmonieux. Pour la quête, les sacristains déploient des paniers munis de lecteur de cartes bleues et pour la communion, un sacristain supplémentaire en jogging-sweat-capuche-baskets gris vient renforcer l’équipe pour distribuer les hosties, même aux photographes-compulsifs-impénitents. Peut-être seront-ils pardonnés !
Après la messe, relativement courte, les fidèles se joignent aux chenilles processionnaires. Ils ont ainsi l’occasion d’admirer les petites chapelles situées dans les collatéraux du vaisseau central de la nef, toutes remises à neuf après l’incendie de 2019. Le tour de chœur et ses magnifiques sculptures en bois retracent les scènes de la vie du Christ. Clou du spectacle, une immense roue d’or dont le centre contient des reliques : un morceau de la croix du Christ et de sa couronne d’épines sauvés des feux de l’enfer en 2019 grâce à la virtuosité des pompiers de Paris. Un vrai miracle !
Vue de l’intérieur la cathédrale a été remise à neuf et bien ravalée. La voute a tenu durant la messe ce qui laisse imaginer que la charpente qui la surplombe a été correctement reconstruite. Du bel-œuvre. A l’extérieur les travaux sont loin d’être terminés si l’on en juge les nombreux échafaudages et barraques de chantier qui subsistent, ainsi que les renforts en bois posés après l’incendie pour soutenir les arcs-boutants de pierre.
Le chantier a avancé plus rapidement que celui de l’assainissement des finances publiques françaises. Une espèce d’unanimité, plutôt exceptionnelle, a émergé de l’opinion publique pour reconstruire cette cathédrale après l’incendie destructeur de 2019. En France on est souvent unanime dès qu’il s’agit de dépenser de l’argent public, des jeux olympiques à la cathédrale de Paris. Peut-être un miracle similaire se produira pour définir l’âge légal de la retraite ?