L’illusion d’une écologie sans contrainte

Le monde politique français est en train de démonter les aspects écologiques de lois qu’il avait lui-même votées avec une mise en œuvre éloignée du moment du vote. A mesure que se rapprochent les échéances d’application de ces aspects on commence à réaliser qu’ils sont potentiellement contraignants et qu’ils vont donc obliger certaines corporations et même des citoyens à modifier leurs habitudes. Bien entendu ceux-ci se lèvent contre ces nouvelles obligations dont le respect entraînerait des coûts supplémentaires, ou, dans certains cas, seulement des modifications de leurs modes de vie. Bien évidemment, la situation « des plus précaires » est mise en avant pour contester la justification de ces mesures « d’écologie punitive ». Alors chacun utilise ses capacités de nuisance pour faire reculer le gouvernement et le parlement français est en train de démonter ce qu’il avait mis en place.

On se souvient de la révolte dite des « bonnets rouge » en Bretagne en 2013 qui avait réussi à faire abroger le principe d’une « écotaxe », votée en 2008 dans le cadre d’un énième « Grenelle », celui de l’environnement. L’application de cette taxe avait été repoussée à plusieurs reprises avant d’être définitivement annulée devant la violence des agriculteurs et transporteurs bretons, largement soutenus par les autres régions.

Aujourd’hui, dix ans plus tard, les élus sont en train d’abroger les ZFE (zones à faible émission) consistant à interdire les véhicules les plus polluants dans les centres de certaines villes, ou de réintroduire l’usage de certains pesticides dans l’agriculture. Une candidate aux élections municipales de Paris en 2026 (Rachida Dati) a annoncé qu’elle voulait rétablir la circulation automobile sur les voies sur berge transformées en espaces piétonniers depuis les années 2010. Et il en est de même pour toute une série de mesures législatives ou réglementaires de nature écologique.

Ces revirements marquent le manque de constance de parlementaires qui votent des lois le lundi, s’aperçoivent le mercredi qu’elles vont provoquer du mécontentement chez certains de leurs électeurs à forte capacité de nuisance, puis votent leur abrogation le vendredi. Comme souvent en France, les intérêts particuliers priment sur l’intérêt général, un concept qui a à peu près disparu de la pensée des citoyens et de leurs représentants.

Surtout, ils font définitivement tomber la fiction qu’évoluer vers une société plus écologique pourrait se faire sans contrainte. C’est le mensonge qui a été vendu par la politique : « non à l’écologie punitive, vous allez pouvoir continuer à vivre comme avant, rien ne changera et nous allons quand même sauver la planère. » Au pied du mur la France s’aperçoit que ce n’est tout simplement pas possible. Pour le moment on privilégie la facilité plutôt que l’effort. C’est un peu la même histoire avec les déficits des finances publiques…