Un chef anglo-saxon pour Air France

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Après des mois de recherches et tractations plus ou moins discrètes, Air France, la compagnie aérienne détenue par les contribuables français à travers l’Etat à hauteur de 14,30%, a nommé son futur pédégé qui est l’actuel sous-pédégé d’Air Canada. Plus exactement c’est le groupe Air France – KLM qui a désigné son chef comme l’indique le communiqué officiel :

Le Conseil d’administration d’Air France-KLM, réuni le 16 août 2018, a décidé de nommer Benjamin Smith Directeur général d’Air France-KLM.

Benjamin Smith  est un dirigeant  reconnu du secteur du transport aérien au plan international. Il a joué un rôle majeur au cours des 20 dernières années au sein d’Air Canada, dont il a été un acteur clé du développement économique et commercial, de la transformation, de la création de valeur et de l’engagement des équipes de la compagnie. Il était jusqu’à ce jour President Airlines et Chief Operating Officer d’Air Canada…

Le volet Air France de ce groupe fut plusieurs fois au bord de la faillite au cours des dernières décennies et chaque fois renfloué par les contribuables. Une des causes majeures de cette situation fut, et demeure, la rigidité des syndicats de salariés ne voulant en aucun cas compromettre sur « leurs avantages acquis » et satisfaire aux nécessités de la concurrence féroce apparut sur le marché du transport aérien. Autrefois compagnie majoritairement publique, ces syndicats ont pris des habitudes d’enfants gâtés sachant que les contribuables étaient toujours présents pour éviter la faillite de leur société qui aurait dû en principe intervenir si la compagnie se trouvait dans une situation d’entreprise privée.

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Des grèves à répétition début 2018 ont entraîné la démission du pédégé de l’époque qui était un haut-fonctionnaire français comme ce fut régulièrement le cas depuis l’origine d’Air France. Cette fois-ci, l’actionnariat désormais majoritairement privé et relevant plutôt d’une logique libérale, a décidé d’imposer sa volonté en nommant un professionnel du secteur pour essayer de redresser Air France. Il fallut pour ça tripler le salaire du pédégé afin de l’aligner sur les conditions de marché car les volontaires de se bousculaient pas au portillon pour prendre la tête de ce groupe qui n’est qu’une source d’ennuis et d’échec.

A peine connu cette nomination, les syndicats d’Air France éructent leur colère et diffusent un communiqué de bienvenue à leur nouveau grand chef ce 16 août :

En ce qui concerne la candidature du prochain PDG à la tête de NOTRE entreprise, l’intersyndicale soutient qu’il est inconcevable que la compagnie Air France, Française depuis 1933, tombe dans les mains d’un dirigeant étranger dont la candidature serait poussée par un groupe industriel concurrent (Delta Airlines pour ne pas le citer…

On retient de « NOTRE entreprise » en première ligne. C’est la vieille tradition syndicale française qui fait considérer les anciennes sociétés publiques comme la « propriété » desdits syndicats. On voit où cela a mené Air France ! Chaque restructuration de cette compagnie a été considérée comme celle de « la dernière chance », mais chaque fois ce ne fut pas le cas et il y eut un énième plan de la « dernière chance » a été exécuté du fait de la faiblesse de l’Etat français.

Le nouveau pégégé va devoir s’attaquer à rude épreuve. Sa place est peu enviable, gageons que les syndicats vont lui rendre la vie impossible, une menace de grève est déjà annoncée s’il ne donne pas satisfaction aux revendications salariales. Le contexte a un peu changé avec un Etat qui a déjà affiché sa volonté de ne pas interférer dans le redressement de la compagne et, surtout, de ne rien payer pour celui-ci. Il n’est pas sûr qu’il arrive à tenir cet engagement. Les contribuables l’espèrent, les syndicats n’y croient pas. L’avenir va être intéressant.

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