ELGEY Georgette, ‘Toutes fenêtres ouvertes’.

Georgette Elgey (1929-2019) a écrit en 1973 « La Fenêtre ouverte » qui raconte, 30 ans après, comment sa famille a été dénoncée à l’occupant allemand en 1942 par de « bons français » pour ses origines juives. Georgette avait 13 ans, grâce aux actions généreuses de personnes raisonnables, grâce aussi sans doute un peu à la providence, la jeune fille et sa proche famille furent préservées et survécurent jusqu’à la défaite allemande.

En 2017, au crépuscule de sa vie, elle publie « Toutes fenêtres ouvertes » qui raconte un autre combat mené par sa famille, celui du procès en paternité mené par sa mère contre Georges Lacour-Gayet dont elle tomba amoureuse, lui ayant 72 ans et elle 27. Il s’ensuivit l’arrivée de Georgette que son père refusa de reconnaître. Sa mère, Madeleine, soutenue par sa grand-mère Marthe, va lancer une action judiciaire pour forcer le vieil homme à reconnaître son « œuvre », utilisant même Georgette alors âgée de 4 ou 5 ans pour la lancer à la poursuite de son « père » à la sortie de son immeuble… Elles le font non seulement pour éviter à Madeleine, déjà mère d’une jeune fille issue d’un premier mari violent et cupide dont elle divorcera rapidement, de devoir élever seule sa deuxième fille, mais également par sens moral.

Après avoir retrouvé dans une cave une vieille malle emplie de documents familiaux Georgette s’attelle à reconstituer ce que fut la vie de sa mère, et plus généralement de sa famille, avant et après sa naissance. Il s’agit bien sûr de l’amour irraisonné de Madeleine, étudiante en histoire, pour son maître de près de 40 années plus âgé qu’elle, il s’agit surtout de la folle témérité de cette femme pour un combat (judiciairement perdu) afin que sa fille porte le nom de son géniteur, il s’agit aussi de la vie d’une famille de la grande bourgeoisie, familière des dirigeants politiques, des intellectuels et des artistes de son époque. La lâcheté d’un homme et le drame de la guerre vont venir bouleverser cette famille et servir de fil conducteur à cet ouvrage écrit alors que Georgette est devenue elle aussi une historienne reconnue auteure d’une histoire de la IVème République en six volumes qui fait encore autorité. Elle sera journaliste, éditrice, conseillère technique du président François Mitterrand, entre autres fonctions.

Ce combat d’une vie menée par sa mère, qui se poursuivit contre les enfants de Georges qui ne voulaient pas entendre parler de mêler leur nom à celui d’une famille aux origines juives, force le respect mais laisse songeur tant son résultat aurait été hasardeux, même si la Justice avait penché en faveur de Madeleine et Georgette. Il est des situations où la lutte et l’action, même motivées par l’amour, restent sans force face à la lâcheté. Il sera clôturé par Georgette qui, à 70 ans, sera contactée par un petit neveu de sa famille paternelle avec laquelle elle renouera de façon apaisée.

Ce livre est un vibrant hommage à ses mère et grand-mère, femmes d’honneur et de volonté. Il leur est d’ailleurs dédicacé.

« La fenêtre ouverte » est ajoutée à la fin du volume pour ceux qui ne l’auraient pas lu.