« Chili 1976 » de Manuela Martelli

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Nous sommes au Chili en 1976, la dictature militaire est en place depuis deux ans, sous la férule du général Pinochet. Les institutions démocratiques sont mises au pas, la répression contre les opposants est féroce et les « gauchistes » sont pourchassés, torturés, assassinés à travers le pays, et même à l’étranger. Le film de l’actrice et réalisatrice chilienne Manuela Martelli suit la vie d’une bourgeoise de Santiago se rendant dans sa résidence secondaire au bord de l’océan pour y superviser des travaux de rénovation et qui, un peu malgré elle, va se trouver embringuer dans le soutien à un opposant révolutionnaire blessé.

Digne et élégante, jeune grand-mère, Carmen est l’épouse d’un médecin de Santiago qui soigne aussi des dignitaires militaires, elle n’a entendu parler de la dictature que via ses deux fils adultes qui s’opposent sur le sujet lors des repas familiaux. Les gens de sa condition ne soutiennent pas forcément les méthodes de la dictature mais préfèrent regarder ailleurs, la destitution du précédent régime de gauche arrangeant globalement leurs affaires. Tout ce petit monde vaque à ses occupations et fréquentent assidûment les églises.

C’est d’ailleurs à la demande du prêtre du coin que Carmen, ex-volontaire de la Croix Rouge va prodiguer des soins à ce révolutionnaire, jusqu’à rencontrer son réseau pour essayer de le faire exfiltrer une fois l’avoir remis sur pieds. Elle n’en dit rien dans sa famille bien entendu et vit cette intrusion dans la révolution avec angoisse et générosité. Cela se termine tragiquement pour l’opposant et pas trop mal pour elle qui, malgré ses maladresses de rebelle de pacotille, va être protégée par les siens sans le savoir.

C’est aussi un film sur la difficulté de l’engagement politique lorsque celui-ci fait courir de véritables dangers à ceux qui le prennent. Un danger que n’ont pas hésité à affronter nombre de résistants à différentes époques sur la planète, et qu’affrontent toujours aujourd’hui des opposants en Russie, en Birmanie ou en Chine. Ils sont admirables et c’est souvent grâce à leur combat que des dictatures se sont transformées en démocraties, système où l’engagement politique ne fait plus courir grands risques à ceux qui s’y opposent. Le cas de l’Amérique du Sud et de l’Amérique centrale est caractéristique de ces transitions à la fin du XXème siècle. Il n’est pas sûr qu’aujourd’hui les nouvelles dictatures se laissent abattre aussi « facilement »…

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