King Crimson – 2014/03/13 – Paris le Trabendo

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Une bande de frappadingues de la guitare ont envahi le Trabendo ce soir : The Crimson ProjeKCt ! Admirateurs du rock progressiste et en premier lieu du légendaire groupe King Crimson, ils ont pour la plupart, à un titre ou à un autre, approché la Maître Robert Fripp, roi des Crimson et l’un des musiciens les plus originaux du rock depuis les années 70’s.

Le concept du show ce soir s’articule autour de deux groupes (i) The Power Trio avec Adrian Belew (guitare & chant), July Slick (bass) et Tobias Ralph (batterie), un trio de virtuoses donnant dans l’expérimental et de (ii) The Stick Men, Tony Levin (stick), avec Markus Reuter (stick) et Pat Mastelotto (batterie) un autre trio d’exception.

On ne présente plus Belew qui a joué pour Zappa, Bowie, Talking Heads, et assuré guitares, chant et compositions pour le nouveau King Crimson reformé par Fripp il y a 30 ans. Sa virtuosité est proprement incroyable mais toujours plus utile lorsqu’elle est encadrée par un leader fort. July et Tobias sont des gamins qui n’ont pas connu les années prog rock mais dont la créativité et la technique en font de parfaits descendants.

Les Stick Men se composent de géants : Levin qui a joué de la basse pour Gabriel puis aux débuts du nouveau Crimson avec Pat Mastelotto à la batterie. Le troisième, Reuter, est un allemand que l’on croirait plutôt venu de la planète Mars. Il a participé aux master classes Guitare Craft animées par Fripp. Avec Levin ils utilisent des touch guitars, instruments à larges manches où les 6 à 12 cordes sont frappées avec les doigts des deux mains eu lieu d’être pincées. Cette technique permet des compositions complexes jouées avec accompagnement et mélodie par un seul guitariste.

Et d’ailleurs Markus introduit, seul, le show avec une longue envolée cérébrale dans laquelle sa guitare semble transformée en orgue de cathédrale, l’inspiration de Maître Fripp n’est pas loin. Les autres musiciens le rejoignent alors pour interpréter une bordée de morceaux King Crimson Belew laisse parler sa virtuosité sur des thèmes connus. Il n’est plus seul sur le devant de la scène ce qui est aussi bien et limite un peu ses singeries habituelles…

Par la suite de Power Trio et les Stick Men se croiseront sur scène, partageront quelques chansons selon des formations ad-hoc. Larks’ Tongues in Aspic Part Two, morceau référentiel de King Crimson est merveilleusement joué sur les sticks puis complété par un des solos décadents de Belew qui rejoint alors les Sticks Men. Ces derniers révèlent toute leur technique avec des interprétations symphoniques de l’Oiseau de Feu (Stravinsky) dont on se souvient qu’il ouvrait tous les concerts de Yes, et de Breathless, un morceau de Fripp extrait de son album solo Exposure.

Le Power Trio nous fait découvrir ses créations complexes sur lesquelles Belew s’amuse avec une guitare toujours plus joyeuse et délirante. Il nous gratifie même d’une récréation durant laquelle sa guitare se transforme en sonorités de piano.

Mais le plus réjouissant sont les morceaux de King Crimson joués par les deux formations réunies : Red est à cet égard un moment de pur jouissance, deux batteurs, quatre guitaristes, un son fulgurant, les sinusoïdes vertigineuses de l’inspiration fripienne, le métal en fusion de la guitare de Belew, le lyrisme de la bande et leur joie de redonner vie à ce morceau d’anthologie datant de 1974. Le public grisonnant est aux anges, les métalleux n’ont qu’à bien se tenir ! On est toujours frappé à la réécoute de ce morceau par ses harmonies étranges, ses cassures de rythmes, comprenant comment il annoncait le futur King Crimson et sa musique répétitive. L’album Red sera le dernier de la formation initiale de King Crimson qui du coup n’en fera pas de tournée promotionnelle. Les concerts de notre époque réparent cette injustice et de belle manière ! Le dernier morceau est Indiscipline, datant de l’album Discipline de 1981. Parfait pont entre l’ancien et le nouveau groupe où Belew se lance dans des tortures sonores de sa guitare qu’il tord, au propre et au figuré, pour en extraire un déluge sonique.

Petit clin d’œil, il lance ensuite seul le rappel avec les premières mesures de In The Court of The Crimson King.

Quelle plaisir de voir ces musiciens continuer à donner une réalité au concept crimsonnien : un désordre ordonné. Et ils le font avec virtuosité et bonheur, de vrais artistes ! Robert Fripp est parait-il en froid avec Adrian Belew. Il vient d’annoncer la reformation de King Crimson, sans Adrian. Que donnera cette nouvelle déclinaison du concept ? Le groupe doit tourner à la rentrée prochaine aux Etats-Unis et, en attendant, Fripp continue de maintenir un étonnant site web aussi déjanté que la bande à géométrie variable qu’il anime depuis 40 ans avec tant de brio.

Setlist : 1. Markus Reuter Soundscape/ 2. B’Boom (King Crimson song)/ 3. THRAK (King Crimson song)/ 4. Dinosaur (King Crimson song)/ 5. Frame by Frame (King Crimson song)/ 6. Sleepless (King Crimson song)/ 7. b (Adrian Belew cover) (Adrian Belew Power Trio)/ 8. Neurotica (King Crimson song) (Adrian Belew Power Trio)/ 9. Crack in the Sky (Stick Men cover) (Stick Men)/ 10. Cusp (Stick Men cover) (Stick Men)/ 11. Larks’ Tongues in Aspic, Part Two (King Crimson song) (Stick Men with Adrian Belew)/ 12. Three of a Perfect Pair (King Crimson song) (Stick Men with Adrian Belew)/ 13. Matte Kudasai (King Crimson song) (Adrian Belew & Tony Levin)/ 14. Young Lions (Adrian Belew cover) (Adrian Belew Power Trio)/ 15. e (Adrian Belew cover) (Adrian Belew Power Trio)/ 16. Open, Pt. 3 – Truncheon (Stick Men cover) (Improvisation track performed by Stick Men)/ 17. Breathless (Robert Fripp cover) (Stick Men)/ 18. The Firebird Suite (Igor Stravinsky cover) (Stick Men)/ 19. One Time (King Crimson song)/ 20. Red (King Crimson song)/ 21. Indiscipline (King Crimson song)/

Encore: 22. The Court of the Crimson King (King Crimson song) (Adrian Belew solo)/ 23. Elephant Talk (King Crimson song)

Encore 2: 24. Thela Hun Ginjeet (King Crimson song)