Un vaste documentaire sur la guerre du Vietnam, depuis la défaite française jusqu’à la piteuse fuite de Saïgon par les américains en 1975 : 3 DVDs, 9 épisodes, 8h30 heures de film (18 heures dans sa version pour la marché américain), dix années pour sa réalisation et finalement une passionnante plongée dans cet épisode tragique de l’histoire des Etats-Unis d’Amérique, du Vietnam et de quelques pays alentour. Cette guerre ayant été très librement ouverte à la presse, au moins du côté occidental, il existe une masse impressionnante de documents de tous ordres et, du côté Vietnam communiste, beaucoup d’informations plus ou moins officielles auxquelles les réalisateurs ont eu accès. Mais surtout, il subsiste encore beaucoup de témoins des deux bords et ce sont leurs interviews qui rendent ce documentaire aussi intéressant : civils, militaires et politiques, vietnamiens (du nord et du sud) et américains, prennent longuement la parole pour partager leurs petites histoires comme leur participation à la grande Histoire.
Les fameux enregistrements du bureau ovale de la Maison-Blanche ayant été dévoilés à l’occasion de l’affaire du Watergate, on entend d’incroyables conversations téléphoniques entre MM. Nixon (président) et Kissinger (secrétaire d’Etat) sur « l’évolution » de cette guerre, des négociations entre les parties pour y mettre fin et de l’influence de tout ceci sur… la réélection de Nixon en 1972.
Les réalisateurs étant américains, ils rentrent dans le détail du mouvement anti-guerre qui s’est développé dans leur pays à partir de 1966 et jusqu’aux accords de 1973, sur les illusions entretenues de « l’endiguement du communisme » en Asie qui justifiaient cette guerre étrangère et sur les désillusions de gamins de 20 ans envoyés mourir dans les rizières vietnamiennes.
La publication en 1971 par le New York Times des « Pentagone papers » écrits en 1967 (7 000 pages) par des militaires et experts politiques à la demande du ministre de la défense (Robert Mc Namara), permet de revenir sur les premiers grands mensonges d’Etat dans ce pays. On y redécouvre que dès le mitan des années 60’ la hiérarchie politico-militaire savait que les Viêt-Cong pouvaient gagner la guerre, puis par la suite, que les Etats-Unis allait la perdre. Ces analyses n’empêcheront pas de renforcer les effectifs militaires sur place jusqu’à plus de 500 000 hommes.
Au terme de cette guerre interminable qui fit 3 millions de morts côté vietnamien (du nord comme du sud, civils et militaires, 10% de la population), 60 mille côté occidental (des troupes d’Australie, de Nouvelle-Zélande, du Canada, des Philippines, de Thaïlande sont venues épauler les américains, même si elles furent très minoritaires), le Vietnam du sud absorbé par celui du nord pour former la République socialiste du Viêt Nam, il est impossible de savoir si le communisme se serait étendu dans toute l’Asie du Sud-est si elle n’avait pas eu lieu, puisque telle était le but de guerre. Le documentaire aborde rapidement l’effondrement économique de la République socialiste qui suivit la réunification, les camps de rééducation dans lesquels ont été envoyés beaucoup de vietnamiens ex-du sud, la fuite d’un million de citoyens sur les « boat-people », puis, au bout d’une dizaine d’années de logique marxiste, l’ouverture et la libéralisation du pays et, enfin, la visite du président américain Bill Clinton en 2000, marquant ainsi une relative réconciliation entre les deux peuples qui furent de si féroces ennemis.
On est d’ailleurs frappé par la tranquille neutralité avec laquelle s’expriment les vietnamiens des deux bords pour raconter cette période tragique. Cela illustre une réconciliation avec les Etats-Unis qui semble avoir été plutôt bien menée. Le Vietnam du nord était, et reste toujours, guidé par la certitude de la justesse de son combat, le Vietnam du sud s’est trouvé le jeu de puissances qui le dépassaient et a disparu, les Etats-Unis ressassent leur traumatisme dont les effets durent toujours, voire même sont réactivés avec d’autres guerres interminables menées en Orient, notamment en Afghanistan et en Irak…
La leçon de cette période complexe est difficile à tirer. Ce que les faits nous disent c’est la très grande majorité de ces guerres étrangères menées par des puissances occidentales depuis la deuxième guerre mondiale se sont en général mal terminées pour elles… Celle du Vietnam fut une apothéose à cet égard. Ainsi va la vie du monde.
Ah, dernière chose, la bande originale est coordonnée par Trent Reznor (du groupe Nine Inch Nails) et fait la part belle aux Jimi Hendrix, Bob Dylan, Rolling Stones, Byrds… qui accompagnaient les troupes américaines tout au long des combats.