Reconstitution de ligue dissoute

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La Turquie, toujours à la recherche de sa gloire passée, vient de redonner à la basilique Saint-Sophie son statut de mosquée, provoquant ainsi l’émotion recherchée chez les pays chrétiens. Ce monument fut construit à partir du IVème siècle pour être la basilique chrétienne de Constantinople. Après moulte agrandissements et embellissements, elle devint même le siège du patriarche de Constantinople (le chef de l’église orthodoxe). Après la conquête musulmane elle devint mosquée au XVème siècle, ce qui lui évita au passage les affres du pillage et de la destruction par les ottomans.

Après la défaite de l’empire ottoman lors de la guerre de 1914-1918, la nouvelle République Turque « laïque » dirigée par Mustafa Kemal Atatürk décide d’offrir le monument à l’Humanité et de les transformer en musée, ce qui est fait en 1934.

C’est sur ce statut que le parti religieux élu, gouvernant actuellement la Turquie, a décidé de revenir. Une première prière musulmane s’y est déroulée ce vendredi avec le ban et l’arrière-ban du pouvoir turc, et, bien entendu, devant les flashs des médias. Les réactions dispensables du « monde chrétien » n’ont pas tardé ce qui a dû réjouir les décideurs turcs puisque c’était l’un des objectifs recherchés : titiller l’Occident qui sous-estime la capacité de nuisance turque. Les autorités ont néanmoins déclaré que le monument resterait ouvert à la visite en dehors des heures de prière. Le mieux serait sans doute de traiter cet évènement par l’indifférence tant personne ne va entrer en guerre pour défendre l’héritage chrétien de Sainte-Sophie.

Le problème n’est pas tant que la Turquie dispose comme elle l’entend du patrimoine religieux existant dans les limites de ses frontières reconnues internationalement, non, le problème est plutôt que la Turquie construise des mosquées dans le monde chrétien et y finance des immams pour diffuser leur propagande religieuse à l’attention des citoyens turcs, ou d’origine turque, voire au-delà, résidant dans ces pays d‘accueil, sans que ces derniers n’arrivent à s’opposer véritablement à cette nouvelle conquête, contraints par leurs principes démocratiques et leurs valeurs humanistes. La Turquie religieuse contemporaine a chaussé les bottes de l’Empire ottoman pour reconquérir sa gloire d’antan, par les armes en Syrie et en Libye, par la religion et l’immigration, pour le moment, en Occident.

Pour ceux qui ont eu l’occasion de visiter les splendeurs d’Istanbul, Sainte-Sophie et la Mosquée Bleue restent des souvenirs inoubliables. Ce sont des dômes gigantesques cernés de minarets. L’impression de volume infini est encore plus sensible une fois rentré à l’intérieur. Sainte-Sophie offre un incroyable amoncellement de symboles chrétiens et musulmans, les uns parfois collés sur les autres, marquant la succession de croyances qui ont alterné dans l’inspiration de cet édifice ; la mosquée Bleue est un éblouissement de mosaïques sur les bords du Bosphore. Cette dernière était ouverte à la visite en tant que mosquée, il n’y a pas de raison que Sainte-Sophie ne le reste pas non plus, même retransformée en mosquée.