De l’infection à l’éthique

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Avec une énième vague en cours d’infection à la Covid-19, de véritables questions éthiques commencent à se poser en France et dans les pays avoisinants. Les vaccins contre cette maladie semblent en réduire sérieusement les manifestations graves, à tel point que les services de soins intensifs soignent désormais une majorité de patients non-vaccinés. L’apparition d’un variant très contagieux explique la reprise des hospitalisations et la crainte d’une saturation proche des services de réanimation dans les hôpitaux européens.

En France, les « plans blancs » ont été déclenchés qui entraînent le report de certaines interventions chirurgicales qualifiées de « non urgentes » afin de libérer des places dans les réanimations à consacrer aux malades de la Covid. Certains membres des services médicaux expliquent qu’ils sont pour le moment obligés de consacrer des lits d’hospitalisation à des malades de la Covid qui ont fait le choix de ne pas se vacciner par opposition de principe, au détriment de malades non urgents mais dont le report d’intervention aura potentiellement des effets mortifères à moyen-terme, dans les cas de cancers par exemple.

En cas de saturation des services de réanimation, la question du choix à faire se pose s’il n’y a qu’un lit de disponible entre celui qui est sérieusement malade de la Covid-19 car il a préféré ne pas se faire vacciner et celui qui attend une opération pour traiter son cancer. Le pronostic vital est engagé dans les deux cas mais le niveau de responsabilité personnelle des malades n’est pas exactement le même.

Evidemment personne n’ose prendre position en faveur de l’un ou de l’autre de ces malades mais le simple fait de poser la question via quelques tribunes et débats suffit à imaginer l’orientation des pensées de ceux qui la posent. Nous sommes en France dans un système de santé publique qui veut que tout le monde soit mis sur un pied d’égalité, principe qui n’est plus vraiment respecté puisque depuis l’arrivée de cette pandémie de Covid-19 la priorité est donnée aux malades atteints de cette pathologie. On pourrait se satisfaire de cette provisoire rupture d’égalité si elle permettait de convaincre définitivement les non-vaccinés de se faire vacciner, mais cela ne semble pas être le cas et les non-vaccinés continuent à truster les places dans les services de réanimation aux frais de la communauté des cotisants (dont ils font partie) et aux risques de la communauté des malades non-covid (dont ils ne font pas toujours partie).

La déresponsabilisation des citoyens est l’une des tares de notre société moderne qui amène ceux-ci à agir en fonction de leur intérêt personnel et en négligeant l’intérêt général qui n’a plus beaucoup d’écho dans le monde d’aujourd’hui. Le comportement des « antivaccins » est évidemment aussi la conséquence de cet état de fait : il est toujours plus facile de refuser un vaccin préventif lorsque l’on sait que quoi qu’il arrive la communauté médicale vous prendra en charge ! Singapour a opté pour une position médiane, tous les patients covid sont soignés mais ceux qui ne sont pas vaccinés doivent payer leurs frais d’hospitalisation. Frapper les gens au portefeuille est souvent une bonne manière de les pousser à réfléchir. En France le pouvoir politique a renoncé à rendre le vaccin obligatoire par crainte de potentielles réactions négatives de citoyens offusqués par la « dictature sanitaire » alors on ne va certainement va suivre la voie de Singapour. On en reste donc à nos mauvaises habitudes : une minorité agissante nuit à la majorité et tout le monde paye pour les incivilités de quelques-uns.

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