MAUROIS André, ‘Olympio ou la vie de Victor Hugo’.

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Sortie : 1954, Chez : Librairie Hachette

André Maurois nous raconte ici la vie de ce géant de la littérature et la politique françaises qu’est Victor Hugo (1802-1885). A 8 ans il traduit Virgile, à 15 ans, fervent admirateur de Chateaubriand, il reçoit une distinction au concours de poésie de l’académie française (il est trop encore trop jeune pour l’intégrer, ce qu’il fera en 1841). Sa jeunesse se déroule alors que Napoléon 1er dirige le pays et cherche à dominer l’Europe, son père est général de l’empereur, sa mère s’oppose à Napoléon. Nommé en Espagne sous l’autorité de Joseph Bonaparte, son père, séparé de son épouse, s’installe à Madrid avec ses trois fils. Victor vit sous les ors de l’Empire mais découvre aussi les affres de la répression contre les rebelles, répression dirigée par… son père.

Marié avec Adèle Foucher, son amour de jeunesse, ils eurent 5 enfants dont le premier décède rapidement. Il verra mourir trois d’entre eux (Léopoldine d’une noyade accidentelle, Charles et François-Victor de pathologies diverses), seule Adèle sa fille lui survivra mais en proie à des troubles mentaux importants elle finira sa vie internée dans un asile. Affecté d’une sexualité d’ogre il accumule les conquêtes féminines jusqu’à la toute fin de sa vie. Sa femme commet aussi des infidélités avec Sainte-Beuve, ami de la famille, qui deviendra l’ennemi de Victor. Sa maitresse en titre est Juliette Drouet qui suivra son héros toute sa vie, composant ainsi un trio affectif avec Adèle plutôt original pour l’époque. Le grand homme pouvait tout se permettre…

Travailleur acharné, il produit sans relâche de la poésie, des pièces de théâtre, des romans, des discours, une correspondance fournie, des dessins… Ses œuvres complètes se répartissent aujourd’hui en plusieurs dizaines de volumes. Mais il est sans doute avant tout un poète et versifie à tout moment et sur tous sujets. Sa maîtrise des mots dépasse l’entendement. Dans un style plutôt classique ses vers racontent son âme dans son époque.

Jeunes amours, si vite épanouies,
Vous êtes l’aube et le matin du cœur,
Charmez l’enfant, extases inouïes !
Et, quand le soir vient avec la douleur,
Charmez encor nos âmes éblouies,
Jeunes amours, si vite évanouies !.

Mais il fut aussi homme politique, en rébellion contre Louis-Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III (qu’il qualifia de Napoléon « le petit » dans un article célèbre), après que celui-ci mena un coup d’Etat en 1851 pour rétablir un empire autoritaire. Jusqu’à la capitulation et la capture en septembre 1870 du dictateur par les Prussiens lors de la défaite de Sedan, Victor Hugo choisit l’exil, d’abord à Bruxelles puis à Jersey et Guernesey où il resta près de 20 ans, y poursuivant son œuvre magistrale. Malgré diverses amnisties dont il aurait pu bénéficier, il clama toujours : « quand la liberté reviendra, je reviendrai », ce qu’il fit en dès la proclamation de la IIIème République en septembre 1870. Accueilli comme un héros par des milliers de parisiens, il lui restait encore 15 années à vivre. Ses funérailles nationales rassemblèrent un million de personnes à Paris.

André Maurois, lui aussi membre de l’académie française et spécialiste des biographies d’hommes illustres, trace la personnalité exceptionnelle de Victor Hugo avec force citations extraites de sa gigantesque production littéraire, illustrant les moments douloureux, glorieux, rebelles, solitaires, romantiques, naturalistes…

Elle avait dix ans et moi trente ;
J’étais pour elle l’univers.
Oh ! Comme l’herbe est odorante
Sous les arbres profonds et verts…

Doux ange aux candides pensées,
Elle était gaie en arrivant… –
Toutes ces choses sont passées
Comme l’ombre et comme le vent !

1844, écrit pour le 1er anniversaire de la mort de sa fille Léopoldine

Le biographe, tout en insistant sur l’œuvre détaille aussi la personnalité égocentrique de l’auteur, renforcée par les succès littéraires rencontrés, la fréquentation des plus grands, la reconnaissance du peuple comme de l’intelligentsia à toutes occasions. Bien sûr, ses cendres ont été transférées au Panthéon des grands hommes de la « Patrie reconnaissante ».