Fouteballe en ville


Dans les dîners en ville bobos ces derniers temps l’on parle du… fouteballe, entre autres, pour s’esbaudir devant « le pouvoir de rêver », « le modèle pour les gamins de quartiers » et « l’aspect populaire » que véhicule ce jeu de ballon. Et de citer tel ou tel joueur qui aurait pu tourner dealer de shit mais est devenu footeux grâce « à l’exemple de Zidane »… alléluia-alléluia, merci au Dieu-Zizou !

C’est aussi la puissance de ce sport de déclencher cette indulgence tranquille qui fait assimiler les mérites de l’école républicaine à ceux de la réussite dans le fouteballe. Plutôt que de citer les exemples de success stories dans le monde affaires, de la science ou de la culture de la part de gamins issus de milieux défavorisés, on met sur un pied d’égalité le statut de pousseurs de ballons avec ceux de businessmen, de scientifiques ou d’artistes. Soutenir le foute c’est « populo » alors on compromet sur son degré d’exigence pour les apprentis-dealers de shit, on boit des Kronembourg devant des matchs à la télé et on met ses enfants dans des écoles privés des fois que leur ambition professionnelle serait de courir après une baballe sur le gazon.

Dans une vie plus mesurée on rêverait que le fouteballe revienne dans l’esprit des citoyens à ce qu’il est : un sport. Hélas, nous en sommes loin tant le marketing développé par ce business a réussi à en faire LE sujet numéro 1 dans le cœur des habitants de la planète. Le sport est une activité certes indispensable à la bonne santé de l’âme et du corps mais elle n’a jamais réglé les conflits sur terre, ni véritablement fait progresser l’Humanité vers un futur stable et apaisé. Alors il ne faut pas abdiquer pour autant et continuer à se battre pour favoriser la pensée plutôt que le muscle, l’éducation plutôt que le ballon ; c’est probablement ainsi que l’on progressera aussi dans les banlieues.