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  • Dialogue sur une aire de repos

    Dialogue sur une aire de repos

    Une grosse berline est arrêtée à l’ombre des arbres d’un parking de station essence au bord d’une route bretonne à quatre voies. A l’arrière une vieille femme, voilée et âgée, somnole, devant, une jeune maman donne le biberon un nourrisson et à l’extérieur un papa jovial s’occupe de sa petite fille. Ils sont en route pour des vacances à Perros-Guirec.

    Le chroniqueur est également au repos pas loin de la berline, la petite fille vient lui rendre visite et le voilà qui entame la conversation avec le papa jovial et sympathique, jeune quarantenaire avec un peu d’embonpoint et la barbe de quatre jours de rigueur, ingénieur informaticien, autrefois freelance mais désormais salarié depuis qu’il a deux enfants « pour la sécurité financière ».

    Et puis la conversation tourne vers la réforme des retraites françaises. Le papa goguenard ne semble pas traumatisé par l’allongement du nombre d’années à travailler pour sa génération avant de pouvoir prendre une retraite à taux plein :

    – Moi j’ai fait Bac+5, donc j’ai commencé à travailler à 25 ans, 25 + 43 cela une retraite à 68 ans !
    – Oui, c’est assez logique, mais vous n’avez jamais travaillé durant vos cinq années d’études, vous n’avez pas accumulé quelques trimestres à l’assurance vieillesse ?
    – Ah non, je n’ai pas travaillé durant mes études.
    – Ce n’était pas interdit pourtant et puis c’est plutôt intéressant même s’il s’agit de « petits boulots », ça forme le caractère et… ça rapporte des trimestres pour la future retraite.
    – Ah oui, c’est vrai, eh bien je le dirai à mes enfants pour plus tard !

    Et la petite famille repart dans sa confortable berline, probablement une voiture de fonction, vers un repos breton sans doute bien mérité. Encore un citoyen qui devait être opposé à la réforme des retraites et qui, manifestement, ignorait la fable de La Fontaine « La cigale et la fourmi ». Tant pis pour lui, il travaillera un peu plus longtemps que ses aînés et il n’en mourra pas.

    Ségolène Royal, toujours à propos
  • WEIL Simone, ‘L’Enracinement – prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain’.

    WEIL Simone, ‘L’Enracinement – prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain’.

    Sortie : 1943, Chez : Editions Gallimard.

    Simone Weil (1909-1943) est une philosophe française « humaniste » qui a cherché à expliquer la condition ouvrière à l’aune de l’analyse marxiste mais sans être véritablement « révolutionnaire ». Née juive, elle adhère (sans se convertir) à la spiritualité chrétienne. Normalienne, agrégée de philosophie à 22 ans, elle enseigne puis travaille en usine, fréquente l’Espagne aux temps de la guerre contre le franquisme, compagnonne un temps avec l’anarchisme, le trotskisme, visite l’Allemagne pour mieux comprendre l’hitlérisme dans les années 1930, elle se plonge dans les textes grecs, chrétiens, hindouistes, bouddhistes… Elle écrit le fruit de toutes ces multiples réflexions. La majorité de ses écrits sera publiée après sa mort. Elle s’exile à Londres en 1942 où elle écrit son œuvre majeure : « l’Enracinement ». D’une santé fragile, elle est tuberculeuse, épuisée physiquement et psychiquement, elle meurt d’une crise cardiaque à l’âge de 34 ans.

    C’est évidement son jeune âge qui frappe en premier lieu à la lecture de L’Enracinement, on reste stupéfait devant l’accumulation de lecture et de savoir sur laquelle elle forge ses analyses, ainsi que par la puissance de sa pensée. Comment à seulement 34 ans a-t-elle pu incorporer toute cette connaissance de la philosophie et de l’Histoire ? Par quelle intelligence supérieure arrive-t-elle à ordonner sa pensée et restituer ses analyses de façon aussi claire pour un lecteur non initié à la philosophie ?

    Dans la première partie intitulée « Les besoins de l’âme », Mme. Weil différencie la notion d’obligation de celle de droit qui lui est « subordonnée et relative », puis liste les « besoins de l’âme » à ne pas confondre avec « les désirs, les caprices, les fantaisies ou les vices » et de définir l’ordre, la liberté, l’obéissance, la responsabilité, l’égalité, la liberté d’opinion, la vérité… Bref, une sorte de vade-mecum de ce qui devrait être la ligne de conduite des démocraties.

    Dans la seconde partie « Le déracinement » elle déplore la « maladie du déracinement » lorsqu’un peuple ou une classe sociale n’a plus accès à ses racines morales, intellectuelles, spirituelles. Ces racines viennent soit de son milieu soit elles infusent par échanges entre les classes. Il y a déracinement, notamment, lors des conquêtes militaires : les Celtes en Gaulle, les Maures en Espagne, les Allemands en Europe ou la France en Océanie, les conquérants cherchant systématiquement à effacer l’histoire des nations conquises, à les déraciner. De ce fait, la conquête militaire est assimilée au mal.

    L’argent est aussi un puissant facteur de déracinement au sein d’une même société. Pour éviter celui-ci, Weil expose sa conception d’une organisation idéale du travail, ouvrier comme paysan, qui « serait éclairé de poésie », un système ni capitaliste ni socialiste qui abolirait la condition prolétarienne et dont l’orientation serait non pas « l’intérêt du consommateur » mais « la dignité de l’homme dans le travail, ce qui est une valeur spirituelle ».

    Elle explique aussi l’apparition de ce déracinement nuisible par la disparition du sens des collectivités qui correspondaient à des territoires, aujourd’hui balayé par celui de la nation « c’est-à-dire l’Etat » qui s’est substitué à tout pour « assurer à travers le présent une liaison entre le passé et l’avenir ». Et d’illustrer dans une vaste fresque historique, de l’empire romain à l’Europe de la première moitié du XXème siècle les notions de patrie, de nation, d’obéissante et de désobéissante, des contradictions insolubles du concept de patriotisme, de la brutalité des conquérants en relativisant leurs cruautés respectives.

    La troisième partie, L’Enracinement, débute par une analyse de l’effondrement de la France en 1870 malgré le fait que c’est elle qui ouvrit les hostilités contre la Prusse, jusqu’à la rédemption initiée par le mouvement gaulliste susceptible de restaurer le génie du pays au-dessus du chaos (rappelons que le livre est écrit entre 1940 et 1942, époque où la guerre est loin d’être terminée) :

    La vraie mission du mouvement français de Londres est, en raison même des circonstances politiques et militaires, une mission spirituelle avant d’être une mission politique et militaire.
    Elle pourrait être définie comme étant la direction de conscience à l’échelle d’un pays.

    S’en suivent de complexes déroulements sur la force, l’histoire, la poésie, la tradition, la spiritualité qui enracinent la puissance d’une nation. Si l’univers entier est régi par la force, comment l’homme pourrait-il s’en soustraire ? Elle constate ensuite l’incompatibilité entre religiosité et science et ramène le christianisme à « une convenance relative aux intérêts de ceux qui exploitent le peuple » où l’esprit de vérité est absent.

    La philosophe écrit fiévreusement sur les voies à emprunter pour élever l’inspiration de la nation et la spiritualité de son peuple en évitant les dérives constatées dans l’histoire, dont le cas Hitler n’est pas des moindres. Nombre de sujets résonnent encore aujourd’hui d’une brulante actualité : la spiritualité des nations, la science et la religion, la dévastation générée par les conquêtes militaires… Il faut faire quelques efforts pour pénétrer la pensée de la philosophe mais ceux-ci sont très largement récompensés par l’impression d’en partager la saveur.

    NB : le livre a été publié par Albert Camus.

    Lire aussi : La Corse déracinée

  • « Vers un avenir radieux » de Nanni Moretti

    « Vers un avenir radieux » de Nanni Moretti

    Un joli film de Nanni Moretti qui se met en scène lui-même dans « Vers un avenir radieux » dont il est l’acteur principal, Giovanni, réalisateur. Le film raconte le tournage d’un film par Giovanni au sujet d’une cellule du parti communiste italien en 1956 (cellule « Antonio Gramsci ») alors que les grands-frères soviétiques envahissent le « peuple frère » de Hongrie.

    Dans le même temps le réalisateur se montre embourbé dans les problèmes financiers de sa production, la psychanalyse de sa femme qui n’arrive pas à se séparer de lui, sa fille qui lui annonce son projet de mariage avec l’ambassadeur de Pologne de trois fois son âge, le monde du cinéma qui évolue au-delà de ce que Giovanni peut comprendre avec notamment un moment hilarant où une productrice Netflix lui annonce que son film est bon mais manque de moments « what the fuck! ». Les yeux ronds désespérés qu’ouvre Giovanni devant cette remarque attestent de son décalage avec le monde moderne dont il commence à prendre conscience.

    A défaut de se satisfaire du présent, il se jette à corps perdu dans le passé évoqué par son film dont il reprend la fin pour la rendre heureuse : le chef de la cellule « Antonio Gramsci » au lieu de se suicider devant la félonie du grand frère soviétique va prendre la tête d’une rébellion communiste pour forcer le PCI à prendre position contre l’invasion soviétique de la Hongrie de 1956. La vraie vie fut toute autre…

    Le film est délicieux et amère. L’humour de Moretti est toujours désopilant pour aborder les sujets légers comme tragiques. C’est le portait d’un septuagénaire et le tableau d’une époque qui s’effacent doucement, sans drame, avec l’élégance italienne.

  • « La Musique dans les camps nazis » au Mémorial de la Shoah

    « La Musique dans les camps nazis » au Mémorial de la Shoah

    Le Mémorial de la Shoah revient sur l’utilisation qui a été faite de la musique dans les camps de concentration et d’extermination allemands durant la décennie du pouvoir nazi. Pour la patrie de Brahms et de Beethoven la musique était, bien sûr, un élément fondateur de la culture aryenne, partie prenante de l’éducation de ses enfants et de son environnement militariste. Elle a accompagné la logique des camps et a été utilisée par leurs dirigeants pour ponctuer les entrées et sorties des camps, mais aussi des séances de tortures ou d’exécutions publiques, voire des fêtes organisées par les soldats « SS » pour un anniversaire ou une célébration quelconque.

    Les prisonniers devaient aussi apprendre des chants de guerre allemands pour marcher au pas et en rythme. Une vidéo hallucinante extraite du film « Shoah » de Jacques Lanzmann (tourné à la fin des années 1970) montre l’adjoint d’un camp de la mort chantonner l’hymne du camp écrit par son supérieur et dans lequel il est question de discipline, de bonheur par le travail et de lendemains enchanteurs…

    Les déportés musiciens bénéficiaient d’un statut légèrement favorisé par rapport aux autres. Du fait de leur faible nombre, les Allemands voulaient les garder en vie afin qu’ils assurent cette fonction orchestrale, à la fois « divertissante » mais aussi marquant la discipline qu’ils voulaient imposer à leurs prisonniers. Les nazis déifiaient Wagner, Beethoven, Strauss (décédé en 1949, son hymne olympique est joué aux Jeux Olympiques de Verlin en 1936, il est acquitté en 1948 par le tribunal de dénazification) qu’ils interdisent de jouer aux musiciens juifs de ces orchestres des camps !

    Manquant d’instruments et de partitions, les nazis en commandent à l’extérieur aux frais des déportés. Une contrebasse fabriquée à Mauthausen avec les moyens du bord est exposée.

    Immuablement, nous jouons matin er soir, par n’importe quel temps, qu’il gèle, qu’il neige ou qu’il vente ; il semble impossible aux Allemands d’envisager la sortie ou la rentrée des commandos sans notre concours. Lorsqu’il y a du brouillard, les commandos ne sortent pas avant qu’il ne soit dissipé : le brouillard favorise les évasions. Nous devons alors rester de longues heures à jouer des airs divertissants jusqu’à ce que l’ordre d’attaquer nos marches soit donné.

    Simon Laks, René Coudy, Musiques d’un autre monde, 1948

    Mais la musique est aussi un moyen de réconfort pour les déportés qui s’organisent pour en jouer et en composer à l’abri des regards et des oreilles allemands, dans l’intimité de leurs baraquements sinistres. Certains des poèmes mis en musique à l’époque sont exposés et des bandes-son sont proposées. Une des chansons bouleversantes a été écrite par un des membres du commando en charge d’incinérer les corps des prisonniers assassinés et qui reconnait celui de son fils.

    Qui a visité le camp d’Auschwitz-Birkenau se souvient de cette dalle, tout juste à droite après le portique d’entrée « Arbeit mach free » sur laquelle se tenaient les « musiciens » lorsque les déportés entraient ou sortaient, et se pose toujours la même question sans réponse de savoir comment la patrie de Brahms a-t-elle pu engendrer une telle horreur ?

  • Dans un bistrot du Vème

    Dans un bistrot du Vème

    Street Art

    Un philosophe a décoré les toilettes de ce bistrot.

  • Chris Isaak – 2023/07/07 – Paris l’Olympia

    Chris Isaak – 2023/07/07 – Paris l’Olympia

    Chris Isaak nous revient cette année l’Olympia sans que le temps ne semble faire effet sur lui. A peine quelques rides viennent marquer le beau gosse de Stockton (Californie), il a 67 ans tout de même, habillé d’un costume rockabilly, plutôt moins flashy que d’habitude, noir à parements verticaux argentés, bottes cloutées et petit médaillon fermant son col de chemise blanche. Ses quatre musiciens sont en costumes noirs et chemises blanches de rigueur.

    Pas de production discographique récente sinon un énième Christmas record sans doute de peu d’intérêt. Chris et son groupe tournent pour le plaisir et, peut-être un peu, pour remplir les caisses. Après tout la musique c’est aussi leur job.

    Le show démarre sur un dynamique American boy suivi d’un enchaînement romantique Somebody’s Crying/ Waiting dans lequel Chris joue de sa voix en or pour nous enjôler et de ses mots mélancoliques pour serrer nos cœurs :

    I know somebody and they cry for you
    They lie awake at night and dream of you
    I bet you never even know they do, but
    Somebody’s crying

    A peine remis de ses émotions, le public entend Chris démarrer Don’t Leave Me on My Own en descendant sans sa guitare dans l’une des allées de l’Olympia qu’il remonte doucement en chantant avant de monter dans la mezzanine en poursuivant sur I Want Your Love puis de revenir sur la scène. Les spectateurs sont attendris oubliant que l’artiste est coutumier du fait, un petit truc qui réussit toujours bien pour se mettre le public dans sa poche.

    Plutôt bavard ce soir, il prend le temps de nous remercier de soutenir la musique live par notre présence. La salle est pleine et disposée en format « senior » avec places assises dans l’orchestre dont les quinquas/sexas vont régulièrement se lever, parfois sur instruction de l’artiste, pour suivre le rythme.

    Une fois Chris revenu sur scène son guitariste historique, James Calvin Wilsey, embonpoint sous costume croisé, entame la mélodie lancinante de Wicked Game, devenu un hit mondial après avoir été utilisé par le réalisateur David Lynch dans Sailor and Lula. C’est encore une histoire d’amour sombre, de sentiments trop violents, de ruptures inévitables, de renoncement face au monde qui ne fait que briser les cœurs :

    Nobody loves no one

    Une partie du show se joue ensuite avec les cinq musiciens assis sur des tabourets sur le devant de la scène. Viennent les reprises de Roy Orbison : Oh, Pretty Woman et Only the Lonely, et le souvenir de la rencontre d’Isaak avec Orbison dont il assurait la première partie et qui insistât pour que tous deux figurent sur la photo de presse. Sa guitare acoustique est siglée CHRIS ISAAK sur la table là où celle de Woody Guthrie affichait THIS MACHINE KILLS FASCISTS.

    Il laisse ensuite cette guitare à son bassiste Rowland Salley, costume noir et chaussures rouges, pour interpréter une de ses propres compositions, Killing the Blues, rendue célèbre car reprise par un autre guitariste dont il feint d’oublier le nom, Robert Plant qui l’interpréta dans son duo avec Alison Krauss.

    Help Falling in Love reprise d’Elvis, Blue Hotel et San Francisco Days nous enchantent. Le final Notice the Ring est l’occasion de derniers déhanchements de Chris derrière sa guitare et d’une chorégraphie des trois guitaristes en ligne mimant des mitrailleurs montant au front.

    Nous sommes à Paris alors Isaak nous raconte avoir joué avec Johnny Halliday un immense rocker qui… lui faisait peur et avoir enregistré, il y a des années, Don’t leave me this way avec Etienne Daho dans un hôtel désert de Nashville dont il joue les premières mesures sur sa guitare. Le public adore.

    Pour le rappel il revient comme à son habitude dans son habit de lumière, pantalon-veste recouverts de petits miroirs, pour entamer Baby Did a Bad Bad Thing avec une voix grave, menaçante et contenue qu’il libère en criant sur le refrain, et ponctue le final avec gourmandise de la ritournelle musicale de James Bond. Le dernier rappel est une reprise de James Brown avant laquelle nous avons droit une nouvelle histoire de Chris jeune chanteur attendant devant la loge de Brown après l’un de ses concerts pour se présenter : « bonjour je suis auteur-compositeur-interprète à la Warner Bros compagnie » et son interlocuteur de lui répondre d’un borborygme « Hhhngnn » que Chris cherche encore à interpréter aujourd’hui.

    La musique d’Isaak est toujours un délicieux mélange entre rockabilly et pop mélancolique. Sa voix de velours lui permet de tout interpréter avec ses décrochements caractéristiques et sa montée en « voix de tête » dont il est capable de garder les notes très longtemps. Rien ne change vraiment dans l’ordonnancement de ses concerts sinon la couleur de ses costumes à motifs imprimés. L’homme est séduisant (élu en 1990 dans les 50 hommes les plus sexy par un magazine pipole américain, il est toujours célibataire), le musicien accompli, l’artiste émouvant… laissez agir, le plaisir des spectateurs est toujours aussi intense.

    Setlist : American Boy/ Somebody’s Crying/ Waiting/ Don’t Leave Me on My Own/ I Want Your Love/ Wicked Game/ Go Walking Down There/ Speak of the Devil/ Oh, Pretty Woman (Roy Orbison cover)/ Forever Blue/ Two Hearts/ My Happiness (Elvis Presley cover) (first verse only)/ Only the Lonely (Roy Orbison cover)/ Dancin’/ Killing the Blues (Rowland Salley cover)/ Can’t Help Falling in Love (Elvis Presley cover)/ Blue Hotel/ San Francisco Days/ Big Wide Wonderful World/ Notice the Ring

    Encore : Baby Did a Bad Bad Thing / Bye, Bye Baby / James Bond Theme/ Can’t Do a Thing (To Stop Me)/ The Way Things Really Are

    Encore 2 : I’ll Go Crazy (James Brown & The Famous Flames cover)

    Lire aussi : Chris Isaak – 2012/10/12 – Paris le Grand Rex

    Warmup : Haylen et son guitariste « Diogène ».

  • « Promenade à Cracovie » de Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer

    « Promenade à Cracovie » de Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer

    Roman Polanski (89 ans), réalisateur célèbre, rescapé du ghetto de Cracovie à l’âge de 7 ans, se promène dans cette ville avec son ami d’enfance Ryszard Horowitz (84 ans), photographe de renom, rescapé d’Auschwitz à l’âge de 5 ans. Tous deux sont originaires de Cracovie et s’y trouvaient lorsque les Allemands ont envahi la Pologne en 1940.

    Filmés par Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer, on les voit déambuler dans la Cracovie d’aujourd’hui, retrouver leurs appartements familiaux, la synagogue qu’ils fréquentaient, sans être particulièrement croyants, les anciennes traces des murs et barbelés qui cernaient le ghetto. Pour la première fois de leur longue amitié ils évoquent ensemble cette tragique tranche de vie vécue dans ce pays dévasté par les années de guerre et d’antisémitisme.

    La mère et la grand-mère de Polanski sont assassinées à Auschwitz en 1943. Juste avant la liquidation du ghetto en mars 1943, son père lui fait fuir Cracovie et il va se retrouver seul à errer entre des familles rurales voulant bien cacher un enfant juif. Miraculeusement son père rentre vivant de Mauthausen. Polanski raconte ceci devant sa tombe au cimetière juif de Cracovie, y compris l’épisode burlesque de sa mise en terre pour laquelle l’aidait son ami Andrzej Wajda. Mais aussi de sa solitude de gamin se battant pour sa survie.

    Horowitz et sa famille furent déportés à Auschwitz. Ils échappèrent aux chambres à gaz car faisant partie de la célèbre « liste » de l’industriel allemand Oskar Schindler qui fit travailler des prisonniers dans ses fabriques. A la libération, alors que la famille éclatée n’est pas encore réunie, sa mère voit son fils apparaître sur un film sur la libération du camp d’Auschwitz, elle sait qu’il est vivant et ils vont se retrouver.

    Dans l’appartement de sa sœur de 90 ans, qui vit toujours à Cracovie, Polanski mime la scène où il retrouva son père de retour du camp, attablé à la table de cuisine, avant de le prendre sur ses genoux. Ces deux personnages martyrisés par la vie reviennent sur ces épisodes douloureux en adoptant un ton plutôt rigolard où parfois perce l’émotion quand ils évoquent ceux qui ne sont pas revenus.

    Un documentaire émouvant sur ces deux survivants. Quels destins !

    Le documentaire est présenté dans un nombre limité de salles « art & essai » dont cette bonne vieille salle de « L’Arlequin » rue de Rennes, opérée par la sympathique chaîne des cinémas indépendants « Dulac ».

  • « Love Life » de Kôji Fukada

    « Love Life » de Kôji Fukada

    Un charmant film du réalisateur japonais Kôji Fukada, plein de douceur et de longueur, qui raconte les aléas vécus par un couple du fait d’une tragédie familiale et du retour des « ex » qui rodent sur les lieux et dans les âmes des acteurs de ce drame. Dans ce monde asiatique où chacun veille à surtout ne pas exprimer ses émotions et à afficher toujours la même froideur face aux évènements, le réalisateur fait apparaître les failles que ses personnages ne vont pas réussir à masquer. Entre trois courbettes on voit se confronter l’amour passé entre le Soleil levant et le Matin calme, les difficultés de communication entre les êtres, la trahison évoquée et la solitude de chacun face à son destin. La fin est laissée à l’appréciation des spectateurs qui voient ce couple douloureux marcher, ensemble mais chacun sur sa ligne, vers un futur à définir sur le fond musical de la chanson japonaise, un peu dégoulinante de bons sentiments, Love Life :

    Quelle que soit la distance qui nous sépare, rien ne m’empêchera de t’aimer,

  • Dérive religieuse en Inde

    Dérive religieuse en Inde

    Comme l’ont fait certains Etas américains, notamment sous l’impulsion du vice-président de Donald Trump entre 2017 et 2021, Mike Pence, l’Inde est en train de retirer de certains programmes scolaires la théorie de l’évolution de Darwin, après avoir déjà expurgés des manuels de nombre d’autres théories scientifiques qui ne correspondent pas aux vues obscurantistes du parti hindouiste actuellement au pouvoir.

    Emporté par leur religiosité et une lecture à la lettre de textes millénaires, des pays importants révisent leurs manuels scolaires pour en retirer le savoir scientifique. Dans le cas de l’Inde, cela se double d’un sentiment antioccidental puisque globalement les grandes découvertes scientifiques et technologiques sont « blanches ». Religion plus idéologie, ou comment des pays qui sortaient progressivement de la masse du sous-développement et participaient à leur tour à la progression du savoir humain sont en train de s’en éloigner. La communauté scientifique indienne s’émeut de cette régression mais n’y peut pas grand-chose sinon opposer la rationalité à une politique religieuse, c’est dire si le combat est perdu d’avance.

    Lorsque l’on déambule sur l’île d’Elephanta dans la mer d’Arabie, au large de Bombay, on visite de fascinantes grottes millénaires dédiées à Shiva et que l’on aperçoit au loin les dômes des centrales nucléaires qui alimentent Bombay, on se dit que ce pays a su assimiler la science tout en respectant ses traditions. C’était l’héritage de Nehru.

    Lire aussi : https://breakthroughindia.org/seminar-on-darwins-theory-of-evolution-indian-knowledge-system/

    Narendra Modi – Kiro / Charlie Hebdo (10/05/2023)

    Aujourd’hui son lointain successeur Modi revient sur ces avancées et privilégie Ganesh à Darwin. Pas sûr que cela mène le pays à un futur radieux mais seul l’avenir le dira. Modi est un président nationaliste élu à peu près démocratiquement, son peuple l’a donc choisi et réélu, lui et ses idées. Si jamais le résultat ne satisfait pas les électeurs ils pourront toujours s’en prendre à eux-mêmes !

    Lire aussi : L’inde : sa citoyenneté, son immigration et ses religions

    La philosophe Simone Weil écrivait en 1943 :

    Chez les chrétiens, l’incompatibilité absolue entre l’esprit de la religion et l’esprit de la science, qui ont l’un et l’autre leur adhésion, loge dans l’âme en permanence un malaise sourd et inavoué.

    Il empêche la cohésion intérieure. Il s’oppose à ce que la lumière chrétienne imprègne toutes les pensées. Par un effet direct de sa présence continuelle, les chrétiens les plus fervents portent à chaque heure de leur vie des jugements, des opinions, où se trouvent appliqués à leur insu des critères contraires à l’esprit de christianisme. Mais la conséquence la plus funeste de ce malaise est de rendre impossible que s’exerce dans sa plénitude la vertu de probité intellectuelle.

    Simone Weil – « L’enracinement » (1943)

    Cette analyse s’applique, hélas, à toute religion ou idéologie. Remplacez « chrétiens » par « hindous » ou « musulmans » et la « conséquence funeste » est la même !

  • Le clan Assad reprend du poil de la bête

    Le clan Assad reprend du poil de la bête

    La République arabe syrienne, et le clan Assad qui la dirige depuis 1970, a tenu bon depuis le déclenchement de la révolte populaire dite du « printemps arabe » en 2011. Après une répression féroce des contestataires par le régime, cette rébellion s’est transformée en lutte armée faisant intervenir des mouvements religieux comme le groupe Etat islamique (EI), Al Qaeda et différents autres mouvements islamistes faisant dans l’ensemble assez peu dans la poésie.

    C’est ainsi que la Syrie a été transformée en un terrain de guerre civile où s’est exercé une cruauté d’un niveau encore rarement atteint. Des groupes islamistes contre un gouvernement dictatorial avec au milieu un peuple éclaté en une multitude d’ethnies et de pratiques religieuses, il n’en fallait pas plus pour déclencher un cataclysme et on a vu ce malheureux pays devenir la proie de toutes les barbaries. Cerise sur le gâteau, la situation s’est internationalisée avec les interventions d’une coalition internationale (plutôt occidentale) pour détruire les mouvements islamistes, de la Russie pour soutenir le régime Assad et de la Turquie qui veut protéger sa frontière sud des mouvements kurdes.

    Le résultat est effrayant : des millions de déplacés (y compris en Europe), des massacres de populations civiles, des crimes de guerre et contre l’humanité, des tortures et meurtres en tous genres, le plus souvent largement filmés et relayés sur les réseaux dits « sociaux », un pays détruit, une population éclatée, etc. La Syrie qui n’était déjà pas particulièrement gâtée par la gouvernance de la famille Assad depuis 50 ans, est devenue le banc d’essai de tout ce que peuvent produire des esprits dérangés et maléfiques. On dirait que chaque camp s’y est mis pour essayer d’enfoncer le pays le plus profond possible dans le gouffre.

    Malgré cette situation, le clan Assad a réussi à se maintenir au pouvoir, profitant habilement de l’internationalisation du conflit, manipulant les opposants les uns contre les autres. Accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, Bachar el Assad (fils de Hafez el Assad) a d’abord été mis à l’index de la Ligue arabe, le garçon n’était vraiment pas fréquentable, même pour les théocraties moyen-orientales. Mais le temps a passé, Assad est toujours au pouvoir, la coalition occidentale a détruit au moins provisoirement l’EI et s’est retirée, la Russie alliée de la Syrie lui fait partager son message anti-occidental ; alors la Ligue arabe a réintégré la Syrie en mai dernier.

    Le retour de l’enfant prodigue a été entériné lors d’un sommet de la Ligue arabe le 19 mai auquel était également invité le président ukrainien Zelenski venu essayer d’obtenir un peu de soutien des pays arabes contre l’invasion russe de son pays. Il a été rapporté que lorsque Zelinsky s’est exprimé en ukrainien devant les chefs d’Etat arabes, le président syrien a ostensiblement laissé tombé son casque de traduction, ne souhaitant sans doute pas connaître le fond de la pensée de l’ennemi de son allié russe.

    Cette réintégration marque aussi la poursuite du déclin du sentiment démocratique. Les pays membres de cette Ligue ne voient sans doute plus pourquoi ils iraient sanctionner l’un des leurs pour des raisons liées à la démocratie, concept assez creux pour la majorité d’entre eux et en voie de déclin dans le reste du monde. Pour le moment, les pays occidentaux considèrent toujours le clan Assad, et donc la Syrie, comme infréquentable, au moins officiellement.

    Lire aussi :
    > « Les âmes perdues » de Stéphane Malterre et Garance Le Caisne
    > « Pour Sama » de Waad Al-Kateab & Edward Watts

  • La Corse déracinée

    La Corse déracinée

    Dans son œuvre majeure “Enracinement » écrite en 1943, quelques mois avant son décès à 34 ans, la philosophe française Simone Weil écrivait :

    Paoli, le dernier héros corse, dépensa son héroïsme pour empêcher son pays de tomber aux mains de la France. Il y a un monument en son honneur dans une église de Florence ; en France on ne parle guère de lui. La Corse est un exemple du danger de contagion impliqué par le déracinement. Après avoir conquis, colonisé, corrompu et pourri les gens de cette île, nous les avons subis [soumis ? NDLR] sous forme de préfets de police, policiers, adjudants, pions et autres fonctions de cette espèce, à la faveur desquelles ils traitaient à leur tous les Français comme une population plus ou moins conquise. Ils ont aussi contribué à donner à la France auprès de beaucoup d’indigènes des colonies, une réputation de brutalité et de cruauté.

    80 ans plus tard, il n’y a rien à ajouter ou retirer.

  • Depeche Mode – 2023/06/24 – Paris le Stade de France

    Depeche Mode – 2023/06/24 – Paris le Stade de France

    Ils ne sont plus que deux, les deux derniers membres historiques du groupe britannique d’électro-pop Depeche Mode fondé en 1980 : Dave Gahan, le chanteur charismatique et Martin Gore guitariste et principal compositeur. Vince Clark et Alain Wider (qui l’a remplacé) sont partis depuis longtemps, Andrew Fletcher est mort l’an passé mais le duo résiduel est toujours actif. Martin et Dave ont tous les deux 61 ans. Leur dernier disque, Memento Mori, est sorti au printemps et Fletcher a participé à son écriture.

    Lire aussi : Mort d’Andy Fletcher, membre fondateur de Depeche Mode

    Lorsque les roadies descendent le rideau noir qui cache le fond de la scène, un M gigantesque en relief apparait, comme collé sur un immense écran, les branches du M servant également de rampes de lumière. Deux autres vastes écrans entourent la scène. Les derniers rayons du soleil dardent les tribunes est quand les quatre musiciens apparaissent et que résonnent les premières notes de My Cosmos Is Mine, premier titre de Memento Mori.

    La formation est réduite, Fletcher n’a pas été remplacé numériquement. Les deux musiciens additionnels pour la tournée sont Christian Eigner à la batterie et Peter Gordeno aux claviers. Dave Gahan est habillé en noir avec des santiag blanches et un gilet au dos est jaune canari. Martin Gore est toujours vêtu d’habits noirs à mi-chemin entre un équipement de motard et une tenue sadomasochiste, il y a des chaînes et des sangles qui pendouillent, dont l’une lui reliant les deux mollets. Il alterne entre sa guitare et ses claviers.

    Le concert démarre avec deux morceaux du dernier disque Memento Mori, sorti récemment, envahi de noirceur, dont le titre signifie « Souviens-toi que tu vas mourir ». Il mérite certainement une écoute plus attentive pour l’apprécier à sa juste valeur mais le Stade de France attend pour l’instant les hits légendaires du groupe. Et ceux-ci arrivent avec Walking in my Shoes accompagné des premiers déhanchements torrides de Dave.

    Les morceaux se succèdent, entrecoupés des nouveautés de Memento Mori. Comme c’est la tradition, Gahan laisse la scène à Gore pour une interprétation solitaire de Home et Soul with me. Sa voix plus fluette et aigue que celle de son compère, grave et puissante, apaise le stade. Il a l’air un peu perdu seul au milieu de cette immense scène. Autant Dave tourne dans tous les sens, emplissant l’espace démesuré, agitant les bras en moulinets, alternant à droite de la scène, à gauche, et sur l’avancée au milieu des spectateurs, autant Martin est avare de ses gestes, statique derrière son micro. Des cheveux blonds-gris coiffés en brosse, des rides qu’il ne cherche plus à cacher, une démarche hésitante avec un costume compliqué qui de toute façon contraint ses mouvements, on est tout de même face à l’une des plus grands créateurs de hits électroniques de ces quatre dernières décennies. Sur Enjoy the silence il termine le premier set avec un solo de guitare sur le manche de laquelle il préfère en général déployer des arpèges en mode mineur, quand il n’est pas derrière ses synthétiseurs. Lorsqu’il chante avec Gahan, il l’accompagne à l’octave supérieure mêlant leur voix en un superbe duo affichant une complicité vocale reposant sur des années de partage, de disques et de tournées.

    Sur Word in my Eyes, les écrans affichent une image fixe en noir-et-blanc d’Andy Fletcher, encore jeune et le groupe lui rend ainsi hommage :

    Let me put you on a ship
    On a long, long trip
    Your lips close to my lips
    All the islands in the ocean
    All the heavens in motion
    Let me show you the world in my eyes

    Le show se termine sur un redoutable enchaînement, dansant et dynamique : Wrong/ Stripped/ John the Revelator et l’ultime Enjoy the Silence.

    Pour le rappel, Dave revient avec un gilet à dos rose… pour entamer un émouvant Waiting for the Night en duo avec Martin, tous deux sur l’avancée de la scène. Leurs deux voix sont parfaitement posées sur un fond de piano mélancolique :

    I’m waiting for the night to fall
    I know that it will save us all
    When everything’s dark
    Keeps us from the stark reality
    I’m waiting for the night to fall
    When everything is bearable
    And there in the still
    All that you feel is tranquillity

    La nuit est tombée maintenant sur Saint-Denis et les Depeche Mode vont bientôt nous rendre à notre tranquillité non sans nous avoir menés une dernière fois sur les grandes cavalcades de leurs tubes électro légendaires avec Just Can’t Get Enough/ Never Let Me Down Again/ Personal Jesus pour un feu d’artifice final.

    Un joli concert présentant la musique du groupe sous un jour un peu nouveau. Le non-remplacement de Fletcher donne plus de place aux voix qu’aux instruments, cette situation est encore accentuée par le dépouillement de la scène et du light-show. On s’y fait d’autant plus rapidement que le chant de Dave Gahan se bonifie avec le temps et sa voix puissante remplit sans effort l’enceinte du Stade de France. Il n’a pas perdu une once de technique, l’émotion ou le rythme affleurent à chaque couplet avec toujours autant d’énergie. Sa présence monopolise l’attention et ses pirouettes sont menées avec l’élégance d’un danseur classique. Les compositions de Martin Gore sont le réceptacle parfait pour les performances de ce personnage hors du commun. La scène semble lui faire oublier les phases troubles par lesquelles il est passé au long de sa carrière, de sa vie. Quarante ans après leurs débuts le groupe manifeste toujours un même enthousiasme, continue à composer et à remplir les stades. Ces Anglais ont la joie et la musique communicatives, c’est admirable et permanent.

    Setlist : Speak to Me (Outro)/ My Cosmos Is Mine/ Wagging Tongue/ Walking in My Shoes/ It’s No Good/ Sister of Night/ In Your Room (Zephyr Mix)/ Everything Counts/ Precious/ Speak to Me/ Home/ Soul With Me/Ghosts Again/ I Feel You/ A Pain That I’m Used To (Jacques Lu Cont Remix)/ World in My Eyes (Dedicated to Andrew Fletcher)/ Wrong/ Stripped/ John the Revelator/ Enjoy the Silence

    Encore : Waiting for the Night (Peter and Christian on keyboards)/ Just Can’t Get Enough/ Never Let Me Down Again/ Personal Jesus/ Happy Birthday to You (Mildred J. Hill & Patty Hill cover) (Dedicated to « Paris » after a spectator asked DM via a sign to sing « Happy Birthday » for a friend.)

    Warmup : Jehnny Beth, ex-chanteuse française du groupe britannique féminin Savages

    Lire aussi :
    > Depeche Mode – 2013/06/15 – Paris le Stade de France
    > Depeche Mode – 2010/01/19 – Paris Bercy

  • Jack Lang (83 ans) reconduit à l’IMA

    Jack Lang (83 ans) reconduit à l’IMA

    A l’occasion du renouvellement de son président en 2020 l’Institut du monde arabe (IMA) avait communiqué sur son site :

    L’ancien ministre socialiste de la Culture Jack Lang a été reconduit pour trois ans à la tête de l’Institut du monde arabe (IMA), a annoncé vendredi l’institution, dans un communiqué.

    Le Haut conseil de l’IMA qui rassemble tous les ambassadeurs des pays arabes, puis le Conseil d’administration se sont réunis dans la matinée à Paris.

    « Jack Lang a été reconduit à l’unanimité par le Conseil d’administration », a précisé le communiqué. Le Conseil, dans lequel un plus grand nombre de femmes font leur entrée, a aussi nommé un nouveau bureau comprenant six membres.

    https://www.imarabe.org/fr/actualites/l-ima-au-jour-le-jour/2020/jack-lang-reconduit-comme-president-de-l-institut-du-monde
    06/03/2020

    M.Lang s’agite depuis plusieurs mois pour bénéficier d’un autre renouvellement et il semble que l’Etat français a cédé devant l’insistance indécente de cette personne âgée de 83 ans, les cheveux noirs de teinture (sauf le bout de ses pattes où il laisse apparaître un peu de blanc…), qui s’estimait indispensable à l’avenir de l’IMA qu’il préside déjà depuis déjà plus de dix ans, sans avoir démérité d’ailleurs. De quels moyens de persuasion, voire de pression, peut disposer un cacique socialiste de 83 ans, sur le retour, pour imposer sa personne à l’Etat ? C’est un mystère ! La République ne peut-elle imposer un nécessaire renouvèlement et rajeunissement pour nommer les titulaires à ce genre de maroquins ?

    A priori non, et c’est là un des drames français, pas le plus grave, bien sûr, des multiples maux qui font régresser le pays, mais symbolique de l’inertie et de l’immobilisme qui rongent la République. Le plus troublant dans cette affaire est que ce type de problème est facile à régler, il suffit de shooter sur un marronnier du Vème arrondissement pour qu’en tombent une multitude de candidats tout aussi compétents, sortis des meilleurs écoles, arabisants, acceptables pour les administrateurs de l’Institut, et avec 40 années de moins. Eh bien non, on préfère renouveler un vieillard qui a déjà servi plus de 10 ans à ce poste pour d’obscures raisons de copinage ou de crainte de polémiques en une période qui n’en manque pas.

    Déprimant !

    Lire aussi :

  • Le Mali face à lui-même

    Le Mali face à lui-même

    Le Mali vient de faire approuver par référendum, adopté par 97% des 39% des votes exprimés, une nouvelle constitution qui viserait à faire le lit du colonel Goïta, actuel chef de l’Etat depuis le coup de 2020, pour son maintien au pouvoir après la période en cours qui devait s’achever par des élections présidentielles en 2024. Ce projet renforce également le pouvoir de l’armée dont Goïta est l’un des chefs.

    Dans le même temps, après avoir prié l’armée française d’évacuer le pays en 2021, le Mali demande maintenant la même chose aux forces des Nations Unis censés maintenir la paix. La France et l’ONU ayant échoué, la tendance était donc à leur départ, c’est compréhensible pour un pays en quête de « souveraineté ».

    Le Mali se retrouve maintenant face à lui-même. Enfin, pas tout à fait puisque la Russie est de nouveau présente au Mali, après l’avoir été fortement pour les quelques années postindépendance, et les relations entre les deux présidents semblent au beau fixe.

    Ce renversement d’alliances va dans le bon sens, même si le Mali risque de se transformer en Etat-mafieux. La France a maintenant redéployé ses forces militaires (et ses économies budgétaires) sur des terrains où elles seront mieux utilisées. Dans dix ans il sera temps de faire honnêtement le bilan de tout ceci pour conclure si ce qui se passe est dans l’intérêt de ce pays sahélien, ou pas…

  • « Forever Sixties, l’esprit des années 1960 dans la Collection Pinault » au Couvent des Jacobins à Rennes

    « Forever Sixties, l’esprit des années 1960 dans la Collection Pinault » au Couvent des Jacobins à Rennes

    François Pinault, citoyen breton, capitaine d’industrie, collectionneur d’art contemporain compulsif, a ressorti de ses innombrables collections ce qui se rapprochait des années 1960 pour les exposer au Couvent des Jacobins de Rennes, par ailleurs magnifiquement rénové. L’exposition s’organise autour d’un cloître extérieur transformé pour l’occasion en salle de musique dans laquelle passe la bande son des années 1960 dont les visiteurs peuvent profiter bien installés au fond de transats multicolores. La setlist est composée par Etienne Daho, rennais d’adoption et enfant de ces années.

    Les salles présentent une classique succession des artistes de l’époque du Pop art, connus et moins connus : Andy Warhol, Gilbert & George, Richard Avedon, Richard Prince, Niki de Saint Phalle, mais aussi des artistes français, dont Martial Raysse. Toute ce petit monde surfe sur le consumérisme et ses couleurs vives, l’image des femmes véhiculées par la publicité, l’association de la photo publicitaire, de collages, de la sérigraphie… et, surtout, de la diffusion en masse à travers les magazines, le cinéma, la télévision. Raysse dira :

    Les Prisunic sont les nouveaux musées de l’art moderne.

    Sur fond du festival de Woodstock, de la conquête de la Lune et de la libération sexuelle, c’est l’explosion de ces nouvelles images mises parfois aussi au service des luttes pour la décolonisation, pour les droits civiques aux Etats-Unis, contre la guerre du Vietnam. Ce sont aussi les images qui marquent le début de la fin de l’American dream et un atterrissage parfois rude sur la réalité.

    « Belles des nuages » – Martial Raysse

    Un beau moment à passer au Couvent des Jacobins.

    Dans la boutique de l’exposition trône toute la littérature underground : Guy Debord (« La Société du Spectacle » – 1967), Edgard Morin (« Journal de Californie » – 1970), James Balwin et bien d’autres.

  • La nationalité française du président de Madagascar

    La nationalité française du président de Madagascar

    A nouveau une ancienne colonie française, Madagascar, se trouve engagée dans un improbable imbroglio juridique du fait de la politique généreuse de Paris dans l’octroi de la nationalité française à des étrangers. Après avoir appris la nationalité française de plusieurs ministres de l’actuel gouvernement des Comores, en pleine discussion avec le gouvernement français sur l’avenir de Mayotte, on apprend aujourd’hui que le président de la République de Madagascar, Andry Rajoelina, a obtenu la nationalité française en 2014. Cette situation déclenche une sérieuse polémique localement.

    L’opposition malgache s’interroge pour savoir si du fait de cette nationalité française, M. Rajoelina peut toujours être considéré comme malgache et donc légitime à la tête de l’Etat ? Il semble que le code local de la nationalité permette de discuter ce point ce dont ne se prive pas l’opposition.

    Le plus étonnant dans cette affaire est non pas tant que la France distribue sa nationalité comme des médailles, mais que de hauts dirigeants d’anciens pays décolonisés prennent soin d’acquérir la nationalité de l’ex-puissance coloniale alors même qu’ils dirigent leur propre pays. Comment dans ces conditions peuvent-ils démontrer un engagement sincère au peuple qui les a élus ? C’est bien le problème qu’affronte aujourd’hui M. Rajoelina.

    A titre personnel il se sent certainement plus rassuré de bénéficier de la nationalité française et du cortège de protections qui va avec, plutôt que d’être « simplement » malgache, mais son sens de l’intérêt général de Madagascar peur être mis en doute. A-t-il pensé une seconde que si les Malgaches découvraient cette situation ils pourraient se poser de légitimes questions sur sa sincérité ? Pour avoir négligé ce point il risque d’être rapidement confronté à une procédure de destitution.

    Lire aussi : L’éternel syndrome des citoyens d’anciennes colonies françaises

    On ne sait pas encore si légalement parlant M. Rajoelina a la double nationalité ou, finalement, uniquement la française. L’avenir le dira rapidement mais c’est l’occasion de revenir sur ce concept de double-nationalité, pour le moins ambigüe. La France a eu un premier ministre, Manuel Valls, qui a la double nationalité franco-espagnole. On l’a ainsi vu hésiter sur le pays dans lequel il voulait s’engager. Réélu député français en 2017, il a démissionné rapidement de ce mandat, sans doute car il aspirait à mieux, pour aller se présenter à la mairie de Barcelone. Il n’a gagné qu’un modeste poste de conseiller municipal à Barcelone, dont il a de nouveau démissionné quelques mois plus tard pour venir montrer de nouveau sa frimousse sur les plateaux télévisés politiques parisiens, marquant ainsi sa « disponibilité » pour la République française. Il va même jusqu’à se présenter aux élections législatives françaises de 2022 mais n’est pas élu. Il semble qu’il a maintenant compris que ses démissions compulsives ont fatigué les électeurs. Mais ses atermoiements politiques et son indécision ont justement été rendus possibles par son statut de double nationalité franco-espagnole.

    La question majeure posée par ce concept, reconnu en France : si un jour il y a la guerre entre la France et l’Espagne, dans quel camp Manuel Valls ira se battre ?

    Lire aussi : Manuel Valls : la déroute

  • de SAINT-PHALLE Niki, ‘ Mon secret’.

    de SAINT-PHALLE Niki, ‘ Mon secret’.

    Sortie : 1994, Chez : des Femmes / le rayon blanc (réédition 2023)

    Niki de Saint-Phalle (1930-2002) est une artiste franco-américaine, plasticienne-peintre-graveuse-sculptrice-réalisatrice, rendue célèbre, notamment, par ses sculptures « Nanas », sorte de poupées géantes aux couleurs chamarrées et aux représentations naïves.

    Lorsqu’elle avait une dizaine d’années, donc dans les années 1940, elle a été violée par son père et ne s’est jamais vraiment remise de ce drame intime qu’elle a gardé pour elle, malgré nombre de cures psychiatriques et de dépressions profondes. En 1992 elle se résous à écrire (et publier) cette lettre à sa fille Laura pour lui révéler ce crime commis par son grand-père.

    Le texte manuscrit est imprimé comme tel, en grandes lettres rondes avec des ratures et des fins de phrases débordant verticalement sur les côtés. C’était un été en Nouvelle Angleterre près de New York. Il y avait des serpents dans le jardin auxquels il fallait faire attention. Et il y avait surtout ce père séducteur, citoyen respectable et moraliste, qui commit l’irréparable. Niki s’est soudain retrouvée ballotée entre l’amour pour son père et la haine qu’elle éprouvait pour cet acte. Elle ne voulait pas le dénoncer pour ne pas le perdre… Même le psychiatre qu’elle visitât après sa première dépression à 20 ans ne voulut pas la croire.

    Bien plus tard en 1973 elle a réalisé le film « Daddy » évoquant ce traumatisme. Dans la même période elle eut l’occasion d’aborder ce sujet avec sa mère pour découvrir qu’elle était au courant car son mari lui avait avoué. Elle demanda à sa mère de ne jamais voir le film et cette dernière respecta son vœux.

    C’est une histoire d’inceste au cœur d’une famille bourgeoise et cultivée, tragiquement banale, comme il doit en exister tous les jours et que Niki de Saint-Phalle a su narrer à sa fille avec des mots simples et touchants, lui permettant ainsi de mieux comprendre le parcours de sa mère dont cet inceste subi dans sa plus tendre enfance est certainement l’un des fils conducteurs, hélas ! Dans ses dernires lignes elle regrette de n’avoir pas pu lui en parler alors qu’elle était adolescente, pour la protéger.

    NB : elle ne parle pas de son patronyme si étonnant et sans doute difficile à porter. Certainement ses psychiatres y auront vu des liens avec l’évènement.

  • Le baiser de la babouche russe

    Le baiser de la babouche russe

    Le président de la République algérienne démocratique et populaire, Abdelmadjid Tebboune, fait parler de lui. A l’occasion d’une vite en Russie, il a participé au forum économique de Saint-Pétersbourg où il a qualifié, en arabe, son homologue russe « d’ami de l’Humanité ». A la télévision on voit son homologue accuser le coup, vaciller sous l’hommage, l’air de ne pas y croire, puis délivrer l’un de ses rares sourires à son interlocuteur. Par les temps qui courent il fallait tout de même oser qualifier M. Poutine « d’ami de l’Humanité » mais son homologue algérien n’a pas été effrayé par cette saillie.

    Après tout, la République algérienne démocratique et populaire et l’Union soviétique furent effectivement de bons amis mais c’est surtout le rejet définitif de la France qui motive le comportement algérien. La conquête française et, surtout, la guerre de décolonisation ont laissé de très mauvais souvenirs qui continuent à infuser l’imaginaire populaire même si dans les faits, la majorité des Algériens d’aujourd’hui n’étaient pas nés au moment de la guerre et de sa conclusion par l’indépendance. La blessure morale est indélébile.

    Evidemment, dans son discours de bienvenue, le président russe a mentionné l’aide apportée par l’Union soviétique pour la libération de l’Algérie de la colonisation française.

    As a reminder, our country helped our Algerian friends fight colonialism and was among the first to recognise the independence of Algeria. It contributed to the development of Algerian statehood and the strengthening of the young republic’s position in the international arena.

    http://en.kremlin.ru/events/president/news/71437

    La délégation de l’Algérie aime à s’entendre rappeler sa victoire contre le colonialisme et la Russie cultive cette histoire qui lui permet de séduire aujourd’hui Alger et, hier, la délégation africaine venue proposer un plan de paix entre l’Ukraine et la Russie. Il n’est pas sûr qu’ils puissent véritablement aider Moscou dans ses guerres de conquêtes, ni militairement ni, encore moins, financièrement mais ils remontent le moral du président russe qui, manifestement, nageait dans un bain de jouvence ces derniers jours à Saint-Pétersbourg.

    Le président Tebboune a poursuivi ses hommages déférents à son « ami » Poutine tout au long de son séjour :

    We have almost agreed – even before we started the talks – on all items related to the international situation, a very tense situation, as you know. It is necessary to accelerate the process of Algeria joining the BRICS group so that we no longer accept dollars and euros. This will be to Algeria’s benefit. God grant!

    Where the Sahel region is concerned, we support relations between Mali and the Russian Federation. Mali neighbours our country. We should negotiate and discuss all issues under any circumstances. We have an instrument known as the Algiers Agreement.

    http://en.kremlin.ru/events/president/news/71436

    La prise de position des dirigeants africains en faveur de Moscou, même symbolique, laissera des traces. Reste à savoir maintenant si les flux migratoires se réorienteront vers la Russie plutôt que vers l’Europe ou les Etats-Unis. Les peuples voteront ainsi avec leurs pieds et soutiendront, ou pas, les manifestations d’effusion de leurs dirigeants. L’avenir dira aussi sous peu si les exportations algériennes seront désormais libellées en monnaie russe ou chinoise. C’est techniquement possible, il suffit de le décider. Ce qui est sûr c’est qu’elles ne pourront pas l’être en dinars algériens, cette devise n’étant ni convertible ni transférable pour le moment.

    Lire aussi : Les pays africains en délégation pour la paix en Ukraine

  • Les pays africains en délégation pour la paix en Ukraine

    Les pays africains en délégation pour la paix en Ukraine

    La Chine qui a effectué une navette entre Kiev, Moscou et quelques pays européens sur la base de son initiative pour un « règlement politique de la crise ukrainienne » de février 2023. Il a été aimablement reçu par tout le monde. Alors qu’il séjournait dans la capitale ukrainienne une salve de missiles russes s’est abattue sur la ville dans la nuit du 17 au 18 mai, lui faisant vivre de près les affres de la guerre. On n’a pas connaissance de conclusions écrites de ce voyage diplomatique sinon une intervention télévisée dans laquelle il se prononce pour un arrêt des fournitures d’armes aux belligérants, ce qui revient bien sûr à la victoire de la Russie puisque l’Ukraine est très majoritairement dépendante pour ses armes des livraisons occidentales. On ne précise d’ailleurs jamais si ces matériels sont donnés ou vendus à l’Ukraine.

    Lire aussi : La Chine a proposé un plan de paix pour la guerre d’Ukraine

    C’est aujourd’hui une délégation de responsables africains, menée par le président sud-africain Cyril Ramaphosa qui essaye de faire bouger les lignes. Outre le Sud-africain, elle est composée des présidents du Sénégal, de la Zambie et des Comores (en tant que président de l’Union africaine), du premier ministre égyptien et de représentants du Congo et de l’Ouganda. De passage à Kiev, ils ont proposé, notamment, de lever les poursuites lancées contre le président russe, ce qui a été mal perçu… A Moscou où ils ont été reçus en majesté, ils ont rappelé le principe de « souveraineté telle que reconnue par l’ONU ». Outre leur volonté de désescalade, partagée par tout le monde sauf par les belligérants, ils ont surtout en ligne de mire les effets néfastes de la guerre sur le marché des céréales, dont ils souffrent en tout premier lieu.

    Dans son discours d’introduction, le président russe a précisé :

    Let me stress once again that we are open to constructive dialogue with everyone who wants peace to be achieved based on the principles of justice and consideration of the legitimate interests of the parties.

    http://en.kremlin.ru/events/president/news/71451

    A la différence de la Chine, peut-être produiront-ils un document qui permettra d’en savoir plus sur leurs propositions, au-delà de ces échanges de salon. Malgré la gravité de la situation, les dirigeants de ces anciennes colonies du Royaume-Uni, de la France, de la Belgique, des Pays-Bas… ont du mal à cacher une certaine forme de jubilation à paraître aider l’Occident à se sortir du mauvais pas dans lequel le met l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

    Ils s’en remettent pour l’instant à la Russie et nombre d’entre eux ont déjà renforcé leur coopération militaire et civile avec Moscou et mis fin à leurs anciennes et historiques coopérations, parfois avec perte et fracas comme pour la France au Mali. Les pays africains sont légitimes à faire ainsi, d’autant plus que la coopération avec leurs anciennes puissances colonisatrices n’a pas toujours donné tous les résultats attendus, c’est le moins que l’on puisse dire. Dans quelques années ils seront ainsi en mesure de pouvoir comparer les avantages et inconvénients de chaque partenariat.

    Le rejet de l’ancien colon par les pays africains a souvent été sous-estimé. Il se révèle aujourd’hui en pleine lumière et voit d’anciens pays colonisés opter clairement pour une puissance dont les comportements en termes de domination d’autres pays n’est pas exempt de reproches mais c’est aussi un retour vers le successeur de l’Union soviétique qui a soutenu dans les années 1960-1970 les combats « révolutionnaires » de certains pays africains, le tout dans la fiction du « non-alignement ». La roue tourne et cette guerre d’Ukraine déclenche un bouleversement des alliances et un isolement de l’Occident. Est-ce que le ralliement de l’Afrique à Moscou est un véritable problème pour l’Occident ? Sans doute pas mais l’avenir le dira !

  • JéGOU Valérie, ‘ Le Yaudet – Autobiographie d’un village du Trégor (1914-1945)’.

    JéGOU Valérie, ‘ Le Yaudet – Autobiographie d’un village du Trégor (1914-1945)’.

    Sortie : 2014

    Valérie Jégou est l’arrière petite-fille d’Alexandre Le Tourneur dit « Zanté », pêcheur à la fin du XIXème siècle dans un petit village breton des Côtes du Nord, Le Yaudet, donnant sur la baie de Lannion, à l’entrée de l’estuaire du Léguer. Voyant la roue tourner, elle décide d’interroger les anciens sur la vie « d’avant » dans ce petit coin de l’Ouest. Cela donne ce charmant livre dans lequel sont restitués les interviews de ces personnages truculents, illustré de photos et cartes postales d’époque.

    Ce sont les thèmes de la vie courante qui sont abordés sur la période 1914-1945 : l’habitat extrêmement modeste, l’école, la langue bretonne défendue par le curé, l’agriculture, la pêche, l’embarquement au long cour des hommes pour gagner de l’argent, les bistrot-hôtels, l’arrivée du tourisme avec les congés payés de 1936, la religion et les injonctions du curé, l’arrivée de l’électricité en 1930, celle de deux lignes de téléphone pour le village à la même époque, etc.

    Et puis bien sûr, la mer est présente à toutes les pages. Le Yaudet contrôle l’entrée vers le port de commerce de Lannion et dispose d’un poste de douane. Les bateaux anglais s’y arrêtent avant de remonter le Léguer et, en attendant la marée, les marins montent au bistrot du Yaudet pour boire un coup.

    Voir aussi : Le Yaudet

    Le livre montre un petit peuple pugnace, accroché à ses traditions et ses rochers bretons, menant une vie austère mais joyeuse. Avant la seconde guerre mondiale la Bretagne était une région délaissée par Paris, à la limite du sous-développement. Les choses ont bien changé aujourd’hui, la péninsule a rattrapé son retard à marche forcée mais ses natifs restent un peuple attachant, forgé par la mer et ses paysages éblouissants.