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  • Lloyd Cole – 2022/03/29 – Paris le Bataclan

    Lloyd Cole – 2022/03/29 – Paris le Bataclan

    Lloyd Cole, né en 1961 au Royaume-Uni, toujours fidèle, pose ses guitares au Bataclan pour une soirée musicale délicieuse au milieu d’une courte tournée de petites salles de grandes villes européennes. Une carrière qui paraît sans fin et une discographie qui continue à s’enrichir, des formations à géométrie variable, majoritairement solo ces dernières années après un démarrage rock tonitruant avec les Commotions au début les années 1980 post-punk, près de 25 disques caractérisant ces époques dont une incursion dans l’électronique (Plastic Wood en 2001, Electronics en 2013), la richesse de cet artiste évidemment est sa voix de velours, posée sur des compositions subtiles et des textes tellement british, empreint de références littéraires et d’humour, alors il la promène depuis des années sur la scène pop-folk avec ses guitares électroacoustiques et son élégance naturelle tous les deux ou trois ans. Le passage par Paris est de rigueur !

    Ce soir son ancien compère des Commotions, le guitariste Neil Clarck, est présent pour la deuxième partie de la soirée après un cours break que Llyod introduit en suggérant que les gens de « son âge », comme lui, feront ce qu’ils ont à faire durant cette pause… Neil joue une guitare électroacoustique et retrouve son rôle de guitariste-solo des Commotions. Il est également apparu sur certains des disques solos de Cole, dont le dernier, Guesswork (2109).

    Ces deux musiciens complices, blanchis sous le harnais, se connaissent sur le bout des doigts, et les voir ensemble sur la même scène offre un régal des sens. Les jeunes spectateurs qui pensaient retrouver la période rock des Commotions à laquelle ils n’étaient pas nés, restent un peu dubitatifs face au romantisme qui émane de ce concert et dont les reprises de Rattlesnakes, Jennifer, Perfect Skin confirment tout l’intérêt. Les plus anciens continueront à suivre avec bonheur et sans nostalgie le parcours de cet artiste original qui a opté pour la douceur après avoir délaissé l’électricité de ses premières années.

    C’est ainsi, le punk est mort, vive le crooner !

    Setlist : Past Imperfect (Lloyd Cole and the Negatives song)/ Kids Today/ Rattlesnakes (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Music in a Foreign Language/ My Bag (Lloyd Cole and the Commotions song)/ The Afterlife/ Moments and Whatnot/ Patience (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Vin Ordinaire (Lloyd Cole and the Negatives song)/ Late Night, Early Town/ Are You Ready to Be Heartbroken? (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Women’s Studies/ The Over Under/ Sentimental Fool/ Why I Love Country Music (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Like a Broken Record/ Weeping Wine/ Jennifer She Said (Lloyd Cole and the Commotions song)/ 2cv (Lloyd Cole and the Commotions song)/Period Piece/ Woman in a Bar/ Ice Cream Girl/ Myrtle and Rose/ Night Sweats/ Violins/ Hey Rusty (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Perfect Skin (Lloyd Cole and the Commotions song)/ Lost Weekend (Lloyd Cole and the Commotions song)

    Encore : No Blue Skies/ Forest Fire (Lloyd Cole and the Commotions song)

    Lire aussi : Les autres chroniques
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  • « L’ombre du mensonge » de Bouli Lanners

    Phil, un vieux rocker belge se réfugie en Ecosse, sur une île désolée et magnifique, habitée par une communauté presbytérienne d’un genre plutôt rigoriste. Il y traite ses AVC à répétition dont l’un lui fera perdre la mémoire pour un temps dont Millie profitera pour le séduire au prix d’un stratagème basé sur son absence de souvenirs.

    Dans la beauté infinie et sauvage des paysages écossais cette étrange histoire d’amour va suivre son cours, même une fois la mémoire de Phil recouvrée et malgré la culpabilité de Millie, jusqu’au dernier AVC qui cette fois-ci sera final au terme d’une merveilleuse romance comme l’écrira Phil à Millie dans une lettre posthume.

    Le film questionne sur la mémoire et son influence sur nos actes, celle qui a disparu du fait de la maladie, celle que l’on fuit pour changer de vie, celle qu’on laisse après la mort aux êtres que l’on a aimés. Une très belle œuvre.

  • La Corse enterre un « héros »

    La dépouille d’Yvan Colonna a été rapatriée et inhumée en Corse. Colonna rappelons-le a été assassiné par un détenu djihadiste franco-camerounais dans la prison d’Arles où il purgeait une peine de prison à perpétuité à la suite de l’assassinat du préfet Erignac en 1998 (3 balles dans la tête tirées de dos), crime dont il s’est toujours déclaré innocent.

    Lire aussi : La Corse en feu… de nouveau
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    La collectivité de Corse a décidé la mise en berne des drapeaux (français, corse et européen) et le président de son conseil exécutif a fait partie de ceux qui ont porté le cercueil recouvert du drapeau corse à son arrivée dans le territoire. L’île est couverte de graffitis à la gloire d’Yvan Colonna et contre « l’Etat français assassin ».

    S’agissant de celui qui a été déclaré coupable de l’assassinat d’un préfet de la République, cette réception en dit long sur le fossé qui sépare maintenant la Corse de la France, voire la haine qui anime nombre de ses habitants lorsque l’on voit la violence des émeutes qui se sont déroulées sur place après l’agression contre Colonna. Souhaitons que pour un avenir serein, des négociations sérieuses soient lancées rapidement avec pour objectif ultime l’indépendance de la Corse qui est la seule solution véritablement efficace pour les deux parties. Et s’il faut garantir la réussite de ce processus en maintenant des flux financiers importants de la France vers une Corse souveraine, eh bien faisons-le, ce sera le prix à payer pour avoir colonisé cette île en 1768 qu’il n’aurait jamais fallu acheter à la République de Gênes. Si cette erreur géostratégique n’avait pas été commise sous Louis XV la Corse coulerait sans doute des jours heureux, indépendant ou italienne. Mais on ne refait pas l’Histoire, cependant on peut essayer de la corriger.

    Le plus important pour un futur statut, en attendant une pleine souveraineté, est que la Corse soit responsable de ses actes, ce qu’elle n’est pas aujourd’hui où, par exemple, chaque fois qu’un centre des finances publiques est détruit par des furieux, il est immédiatement reconstruit grâce à la générosité des contribuables français.

  • L’inénarrable Rokhaya Diallo

    Rokhaya Diallo, fringante journaliste, adepte des théories féministes-décolonialistes-genrées-… et autres, en vogue dans le nouveau monde « déconstruit et non binaire », s’est exprimée dans Le Washington Post, journal américain de référence, où elle est chroniqueuse, sur le traitement différencié des réfugiés selon leur région d’origine et leur région de destination.

    L’article déplore que les migrants venant de du Moyen-Orient (Afghanistan, Syrie) ou d’Afrique ont été moins bien accueillis en Europe que les migrants ukrainiens actuellement chassés par la guerre menée par la Russie dans ce pays. Mme. Diallo note que ces derniers bénéficient d’une vague de solidarité unanime parce qu’ils sont « blancs et européens » et que la mentalité « colonialiste » qui imprègnerait toujours l’Occident lui fait penser que la guerre et la misère sont un « état normal » pour les populations noires alors qu’elles sont choquantes lorsqu’elles touchent les « Blancs ». Elle exhorte les dirigeants européens à octroyer le même traitement à tous les réfugiés, quelles que soient leurs origines.

    Les faits dénoncés semblent réels : oui les migrants venant d’Ukraine sont mieux traités que ceux venant d’Afrique ou du Moyen-Orient. On voit même à l’intérieur des flux venant d’Ukraine des tris effectués entre les populations ukrainiennes « Roms » ou les étudiants africains qui faisaient des études en Ukraine et les autres, les premiers étant moins bien reçus dans les pays d’accueil.

    Ce traitement différencié est-il équitable ? Non. Est-il évitable ? Difficilement car il relève surtout de la réaction des populations plutôt que de décisions politiques. Rokhaya Diallo développe un discours sans surprise, un peu naïf et, évidemment, culpabilisateur à l’encontre des Occidentaux. Le passé colonial européen a certainement laissé des traces dans les esprits et est l’une des explications de ces comportements mais il est loin d’être la seule malgré ce qu’assènent les « décolonisalistes ».

    Ce qui est sûr c’est que quelque soient les pays de départ des flux migratoires convergent vers l’Europe de l’Ouest (sauf quand ils sont bloqués dans leur migration par des pays comme la Turquie ou le Maghreb), les populations semblant ainsi voter avec leurs pieds en faveur des régimes occidentaux et être moins sensibles au discours « décolonialiste » que Rokhaya Diallo.

  • Les consommateurs face à leurs contradictions

    La compagnie pétrolière multinationale TotalEnergies, dont le siège social est en France, a beaucoup investi en Russie ces dernières décennies et fournit une partie de ses clients, multinationaux eux-aussi, à partir de ressources produites et achetées en Russie. Les bonnes âmes crient au scandale du fait que cette entreprise continue à opérer en Russie, tout en faisant le plein de leurs automobiles et en se plaignant du prix des carburants. TotalEnergies est accusée de « crimes de guerre » et autres joyeusetés sur les plateaux médiatiques et au Café du Commerce et personne ne se demande comment la cuve de fioul de Mme. Michu sera remplie, ou à quel prix, si Total coupe ses approvisionnements en Russie. La France ne produisant plus d’hydrocarbures il faut bien acheter ceux-ci à l’extérieur, si ce n’est pas en Russie, il faut les remplacer par une autre source ou alors réduire la consommation. Le problème est que la plupart des pays exportateurs d’hydrocarbures ne sont pas à proprement parler dirigés par des régimes en accord avec les valeurs démocratiques occidentales. C’est le dilemme auxquelles sont confrontées les compagnies comme TotalEnergies, elles vont le résoudre progressivement loin des indignations et des simplismes de plateaux télévisés.

    L’Etat français est par ailleurs lancé dans une vaste opération de transfert des coûts de l’énergie des consommateurs sur les contribuables pour atténuer la hausse des prix sur le pouvoir d’achat de Mme. Michu. L’une des solutions possibles serait de supprimer la niche fiscale dont bénéficient les journalistes et d’en réaffecter les effets pour absorber cette hausse des prix de l’énergie, ce ne serait qu’une goutte d’eau dans la mer, bien sûr, mais cela permettrait à la presse d’être plus à l’aise pour critiquer les politiques de l’Etat, sans donner l’impression continuelle de cracher dans la bonne soupe.

  • La Russie continue sa guerre contre l’Ukraine

    Riss/Charlie Hebdo (03/03/2022)

    La guerre bat son plein en Ukraine où les troupes russes grignotent centimètre après centimètre face à la défense militaire et civile ukrainienne. Certaines villes sont significativement détruites, il y aurait 10 millions d’Ukrainiens déplacés dont près de 3 millions réfugiés en dehors du pays. Le nombre des morts et blessés des deux côtés fait l’objet de propagande mais l’unité de compte est en milliers de victimes. La guerre insensée que les gens raisonnables pensaient impossible est à l’œuvre, menée par un clan de dirigeants sauvages soutenu par une partie de la population russe.

    Les sanctions économiques de l’Occident contre Moscou produisent progressivement leurs effets, mais en tout cas pas au point de faire reculer le pouvoir russe qui se barricade dans sa tactique d’invasion et censure toute l’information non locale. Les oligarques font preuve d’inventivité pour empêcher le gel de leurs actifs clinquants imprudemment localisés en Occident. Le reste du monde affiche une prudente position de réserve en attendant sans doute de voir dans quelle direction tourne le vent.

    On ne sait pas dans quelles conditions l’objectif de la Russie de neutraliser l’Ukraine « menée par une bande de nazis et de drogués » pourra être considéré comme atteint par Moscou. On imagine mal ce pays occuper durablement l’Ukraine, d’abord parce que l’hostilité des habitants semblent se renforcer de jour en jour, ensuite parce qu’il faudra payer pour reconstruire et on sait que la Russie est généralement assez réticente à financer ce genre de chose. Détruire, oui, reconstruire beaucoup moins, on préfère laisser ça à l’Occident… Et on n’imagine pas plus la Russie accepter d’arrêter le désastre sans pouvoir afficher une victoire, au moins partielle.

    Mais c’est encore un raisonnement de gens raisonnables. Il va falloir que les diplomates fassent preuve d’inventivité pour trouver un accord de sortie de cette guerre honorable pour les deux parties, à moins qu’un cataclysme général soit déclenché et anéantisse les protagonistes et leurs voisins.

  • L’indépendantiste corse Colonna est mort

    Yvan Colonna n’a pas survécu à l’agression par un terroriste religieux dans sa prison d’Arles. Il est décédé hier sans avoir jamais repris conscience depuis son agression le 2 mars.

    Colonna a été condamné à trois reprises pour le meurtre du préfet Erignac en 1998 (3 balles dans la tête tirées de dos) mais il a toujours clamé son innocence. Il avait été dénoncé par ses « camarades » nationalistes comme étant le tireur avant que ceux-ci ne reviennent sur leur dénonciation. Depuis son agression, ses avocats et les partisans d’une Corse éloignée de la France défilent sur les plateaux télévisés pour expliquer que, « sans discuter une décision de justice » (bien entendu) le processus judiciaire aboutissant à la condamnation a été défaillant. En lisant entre les lignes, ils disent que Colonna est innocent du crime et que la justice a instrumentalisé une vengeance d’Etat.

    Lire aussi : https://rehve.fr/2022/03/la-corse-en-feu-de-nouveau/
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    Il semble qu’il y avait tout de même quelques indices à charge aboutissant à la culpabilité de l’impétrant mais on ne peut rien exclure, y compris une erreur judiciaire. Peut-être un véritable coupable est-il encore dans le maquis ?

    Quoi qu’il en soit, et avant même de mourir, Colonna est devenu un véritable héros corse ce qui est symbolique de la volonté de ce territoire de se détacher de la France. Il faut donc aller soit vers l’indépendance complète de la Corse, ce qui serait la meilleure solution pour tous, soit vers une autonomie qui équivaut à l’indépendance mais en conservant les financements français en faveur de la Corse.

  • Magnolia au Parc

  • Raymond Depardon / Kamel Daoud. Son œil dans ma main. Algérie 1961-2019.

    Raymond Depardon / Kamel Daoud. Son œil dans ma main. Algérie 1961-2019.

    1961, la guerre d’Algérie est en train de se terminer, l’indépendance du pays est en cours de finalisation via les « accords d’Evian » qui seront signés le 18 mars 1962, les extrémistes pro-Algérie française de l’OAS (Organisation de l’Armée Secrète) se déchaînent et ensanglantent le pays comme la métropole, le FLN algérien (Front de Libération Nationale) n’est pas en reste, un jeune photographe de 19 ans est envoyé à Alger puis à Evian pour graver sur la pellicule ces instants historiques, il s’appelle Raymond Depardon.

    60 ans plus tard, alors qu’il retrouve ces clichés, il décide les publier dans le cadre d’une exposition partagée avec l’écrivain algérien Kamel Daoud (né en 1970) qui ajoute de très beaux textes à ces photos marquantes d’une époque qui s’évapore, celle d’une présence française dans ce pays du Maghreb après 130 années de colonisation dont certaines furent marquées par une violence insigne. En 2019, Daoud et Depardon reviendront à Alger et à Oran (la ville où réside Kamel Daoud) pour ajouter quelques photos contemporaines, également en noir et blanc, sur lesquelles seuls quelques panneaux publicitaires marquent un vrai changement d’époque.

    Les textes de Kamel Daoud ne sont pas des commentaires des clichés mais une longue méditation, inspirés par ceux-ci, sur le temps et l’histoire qui ont marqué tragiquement ce pays, ses habitants, ses héros et ses démons, le poids des pères fondateurs de l’Algérie qui ont obtenu l’indépendance à la force de l’épée et qui est parfois dur à porter pour la génération suivante, celle de Daoud.

    A ne pas manquer, un film documentaire à la fin de l’exposition réunissant les deux protagonistes qui y poursuivent leur dialogue dont la hauteur laisse incrédule face au niveau tellement déplorable de la relation politique franco-algérienne !

  • La Russie, l’Ukraine et l’Histoire

    La Russie, l’Ukraine et l’Histoire

    Les périodes de guerre sont assez peu propices aux analyses historiques subtiles, on le voit aujourd’hui avec les bagarres de communiqués en cours. La Russie annone depuis le début que l’un de ses buts de guerre est de « dénazifier » l’Ukraine, faisant ainsi allusion à l’attitude d’une partie de ce pays durant la deuxième guerre mondiale. En réalité le « grand frère » russe reproche aussi à l’Ukraine de s’être toujours opposée à l’Union soviétique. Face aux tentatives d’autonomie, voire d’indépendance, l’Armée rouge soviétique a toujours eut à batailler sévèrement en Ukraine pour la maintenir dans l’ordre bolchévique et s’opposer à toutes tentatives « d’ukrainisation ».

    L’application forcenée de la collectivisation des terres par le pouvoir de Staline a déclenché de terribles famines au début des années 1930 qui ont provoqué entre 3 et 5 millions de morts en Ukraine. Lors des grandes purges staliniennes les Ukrainiens n’ont pas été les derniers à souffrir des exécutions et des déportations de masse qui ont touché encore quelques millions de citoyens supplémentaires à la fin des années 1930. Ça laisse des souvenirs…

    Durant la seconde guerre mondiale, après la rupture du pacte germano-soviétique signé en 1939 par l’Allemagne et l’Union soviétique, Berlin envoie ses troupes vers Moscou, l’opération « Barbarossa », en traversant l’Ukraine. L’armée allemande est alors accueillie comme un sauveur libérant le pays de l’oppression stalinienne. Le fort antisémitisme régnant alors dans cette République, comme dans toute l’Europe centrale ainsi d’ailleurs qu’en France, va entraîner des collaborations nauséabondes entre les Nazis et des groupes locaux. Certains Ukrainiens qui ont été utilisés comme gardiens dans les camps de concentration allemands étaient réputés parmi les plus brutaux d’un personnel qui ne faisait généralement pas dans la poésie. Il y eut même une division SS « Galice » crée avec des volontaires ukrainiens. Les Russes ne sont pas en reste à ce sujet puisque l’un des héros de l’Armée rouge, soutien indéfectible à Staline dans les années 1930, le général Vlassov, qui s’illustra du côté soviétique durant la guerre civile mais aussi à l’occasion du siège de Léningrad où après avoir estimé que Staline avait abandonné l’armée qu’il dirigeait en rase campagne, capturé par les Allemands, il passa à l’ennemi et fonda « l’Armée russe de libération » qui aida la Wehrmacht à lutter contre l’Union soviétique. A la fin de la guerre, capturé par les alliés il fut remis à Moscou puis jugé, torturé et exécuté avec une dizaine de ses officiers supérieurs.

    Evidemment, lors du reflux des Allemands, quand l’Armée rouge a retraversé l’Ukraine vers l’Ouest pour arriver à Berlin en 1945, les Russes se sont vengés de la collaboration germano-ukrainienne. Moscou et Kiev n’ont pas su mener une réconciliation comme l’ont fait en leur temps de Gaulle et Adenauer en France et en Allemagne, l’animosité actuelle entre la Russie et l’Ukraine s’explique aussi par cette histoire.

    Dans un rapprochement osé, le président Poutine a même expliqué récemment avoir déclenché la mise au pas de l’Ukraine en février dernier pour ne pas renouveler les erreurs du pacte germano-soviétique.

    Rappelons que ce pacte signé en 1939 entre les Allemands et les Soviétiques (voir photo) a permis, notamment, aux Nazis et aux Soviétiques de se partager la Pologne plus quelques autres territoires. Cette signature entre fascistes et bolchéviques a en tout cas fondé l’anticommunisme de plusieurs générations d’Européens. Poutine affirme que ce pacte était destiné à retarder l’agression allemande et permettre ainsi à l’armée soviétique de se renforcer car elle n’était pas encore prête à combattre efficacement en 1939, mais que ce fut un échec puisque durant les deux années que dura ce pacte, de nombreux territoires et des millions de personnes ont été perdus. Il ne veut pas renouveler cette « erreur » une deuxième fois et il lui a donc fallu envahir l’Ukraine avant qu’elle ne soit trop forte. C’est évidemment une interprétation toute personnelle de l’Histoire et il est plus probable que le pacte germano-soviétique, idéologiquement inattendu, n’était qu’un rapprochement entre dictateurs félons qui était fait pour durer.

    Il reste certainement des groupes d’extrême droite à tendance pronazi en Ukraine comme il en existe dans tous les pays, y compris d’ailleurs en Russie ou en France, mais il ne semble pas que le pouvoir ukrainien soit significativement influencé par l’idéologie nazie.

    Aujourd’hui, et quelle que soit l’issue de la guerre en cours, la Russie et l’Ukraine sont séparées pour longtemps. Et puis, le temps passera…

  • Le président russe n’est certainement pas tout seul

    Juin/Charlie Hebdo (02/03/2022)

    Les commentateurs bon clients de plateaux télévisés reprennent d’une seule voix que le président russe Vladimir Poutine serait l’unique responsable de la guerre en cours déclenchée par la Russie contre l’Ukraine. Certes il est le premier responsable puisqu’il est le grand chef mais il semble assez peu probable que le président ait pu prendre le chemin de la guerre sans l’étroite participation de son entourage, voire sans le soutien d’une bonne partie de la population russe biberonnée au nationalisme depuis des décennies. On se souvient d’ailleurs que lors de l’annexion de la Crimée par Moscou en 2014 la cote de popularité de Poutine avait connu un fort regain tant cette reconquête territoriale a semblé assez naturelle pour nombre de citoyens. Les sondages russes ne sont sans doute pas des modèles du genre mais il est probable qu’ils reposent sur une certaine réalité. Il n’est pas exclu qu’une partie de la population russe ne soit pas fondamentalement en désaccord avec l’idée d’un retour de l’Ukraine sous tutelle russe. Le complexe militaro-industriel doit certainement aussi approuver ce concept.

    Cette guerre ne semble pas la meilleure décision prise récemment par la Russie mais seule l’Histoire dira si elle aura servi ses intérêts ou pas. La réponse n’est pas aussi évidente que ce qu’on en dit au Café du Commerce. Il faut encore attendre pour en connaître le dénouement. Et même si le président Poutine était déchu de son poste dans la tourmente, il est probable qu’il serait remplacé par un clone. Il faut bien l’admettre, malgré Chostakovitch, Dostoïevski et Soljenitsyne, la Russie n’aime pas l’occident comme elle le confirme dans ses actes depuis des siècles. Il y a assez peu de raisons logiques d’imaginer que cette situation puisse changer un jour, que le Kremlin soit occupé par Poutine ou par un autre. Il faudra en tenir compte une fois cette tragédie guerrière terminée : nous ne sommes pas amis et nous avons des conceptions opposées sur quasiment tout : l’organisation de nos sociétés, le corpus de valeurs qui les fondent, l’analyse du passé, la vision de l’avenir… Mais nous pouvons nous parler, faire du business ensemble, simplement la Russie n’a jamais changé sa méthode qui est plutôt du genre dure et sauvage. L’Occident s’est illusionné sur la compatibilité de ce pays avec l’Europe, c’était un leurre. Le mérite de la guerre en cours sera probablement de remettre les pendules à l’heure en attendant le prochain ramollissement occidental.

  • L’Empire colonisateur

    Dans ses vœux pour l’année 1961, publiés notamment dans le journal de l’armée « Bled », MonGénéral expliquait :

    L’empire soviétique colonise
    Nous espérons fermement que, chez tous ces peuples, s’instaureront en définitive l’ordre et le progrès, malgré l’Empire soviétique, qui, non content de coloniser 40 millions de musulmans asiatiques et caucasiens et d’asservir une bonne douzaine de peuples qui lui sont complètement étrangers, encourage et exploite toutes les secousses afin de prendre pieds dans les pays troublés. Bref, nous ne nous laisserons pas paralyser par cette odieuse agitation.

    Aider l’Ouest et l’Est à en venir à la détente et au désarmement, pour peu que l’Empire soviétique cesse de manier des torches incendiaires tout en lançant, pour la montre, des vols de colombes épouvantées.

    « Bled » 05/01/1961

    En remplaçant « Empire soviétique » par « Fédération de Russie » on a ici une analyse pas très éloignée de la situation actuelle en Europe.

  • La dépense publique comme programme présidentiel

    Les candidats à l’élection présidentielle française des 10 et 24 avril dévoilent progressivement les programmes de dépenses publiques (ou de baisses d’impôt, ce qui revient au même en termes budgétaires) qui leur tiennent lieu de programmes électoraux. Tout est bon pour exciter l’intérêt de Mme. Michu : on augmente telle prestation, on recrute dans telle corporation de fonctionnaires, on aide telle profession, on baisse tel impôt, on supprime telle redevance… Seules quelques rares mesures vont plutôt dans le sens d’un minimum de bonne gestion, les candidats de droite républicaine annoncent vouloir augmenter l’âge de départ à la retraite ce qui est aussitôt en partie absorbé par la volonté de revaloriser le niveau minimum de ladite retraite.

    On sait que ces périodes électorales sont propices à toutes les annonces démagogiques mais l’élection actuelle semble battre des records en la matière. Après les effets de la crise sanitaire sur les finances publiques on voit les impacts de la guerre en Ukraine peser sur les contribuables avec la prise en charge par les finances publiques de toute une série de dépenses privées, des consommateurs comme des entreprises.

    Comme souvent, la France dépense plus par citoyen en ces temps de crise que la plupart des pays occidentaux, l’effet sur les finances de la République est dévastateur et il faudra des générations avant de pouvoir apurer la situation.

    La France est en risque, risque d’augmentation des taux d’intérêt et risque d’accès au financement, mais aucun candidat ne semble véritablement s’en préoccuper. Vouloir tendre vers un équilibre des dépenses et des recettes (comme essaye de le faire tout ménage) est immédiatement qualifié de « programme de rigueur » et donc inacceptable. Ainsi va la vie politique française. Les contribuables vont devoir le payer un jour, cela ne se dit pas en période électorale, mais, en France, on ne le dit pas non plus le reste du temps, c’est ce qui est irresponsable.

  • Résilience et poches profondes

    On ne dit plus un « plan de paiement par les contribuables des charges des entreprises » mais on dit un « plan de résilience » !

  • The Rolling Stones « ’62 ’22 Sixty »

    La prochaine tournée des Rolling Stones, peut-être la dernière, passera par Paris cet été le 23 juillet. Les tarifs des places sont prohibitifs.

    Ils abusent ; on renonce !

    Lire aussi : Charlie Watts est mort
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  • La langue française en Corse

    En attendant l’indépendance de la Corse et donc l’érection de la langue corse en langue nationale, un mystère linguistique de ce territoire mériterait d’être élucidé. Les personnes d’origine corse ne prononcent pas la dernière lettre des patronymes qui est traitée comme un « e » muet.

    On ne dit pas Yvan Colonna mais Yvan Colônne, on ne dit pas Jean-Guy Talamoni mais Jean-Guy Talamône, on ne dit pas Gilles Siméoni mais Gilles Siméône, et ainsi de suite. On ne connaît pas la raison qui empêche le prononcé de la voyelle finale des patronymes mais cela donne un côté chantant au parlé corse quand il est prononcé en français.

    Il ne s’agit pas bien entendu de se rendre coupable de glottophobie mais on note cette spécificité locale : on ne prononce pas en Corse les voyelles situées en fin de patronyme lorsque l’on parle en français.

    Lire aussi : Un pas dans la bonne direction pour la Corse – Hit the road Jack… (rehve.fr)
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  • Il va falloir payer

    Félix/Charlie Hebdo (26/01/2022)

    La Russie a lancé sa guerre contre l’Ukraine avec des buts pas vraiment clairs. La conquête en cours amène à des milliers de morts (des deux côtés), des millions de réfugiés, des sièges de villes et des destructions significatives des infrastructures ukrainiennes, y compris des immeubles civils. Les bombardements ne sont pas massifs comme ceux pratiqués par la Russie en Tchétchénie ou en Syrie, les villes ne sont pas rasées, mais les dommages sont importants. Une fois les hostilités terminées il va falloir payer pour la reconstruction. Que la Russie soit perdante ou gagnante de cette guerre, il est peu probable qu’elle sera candidate pour financer la reconstruction de l’Ukraine. C’est sans doute à l’Europe et aux Etats-Unis d’Amérique que va échoir cette charge, des pays déjà surendettés après deux années de crise sanitaire.

    Le mur de la dette occidentale est à peu près aussi vertigineux que l’incompréhension occidentale face aux agissements actuels de la Russie. Les conséquences financières des désordres mondiaux actuels risquent d’être aussi dévastatrices que la guerre actuelle, l’accumulation gigantesque des dépenses, d’abord sanitaires puis maintenant guerrières, sans recettes en face sinon la création monétaire va ébranler le système financier mondial. On voit mal comment la planète pourra éviter une sévère restructuration financière dans les mois à venir qui devrait se traduire, au mieux par une inflation sévère et durable, ou pire par des défauts de paiement publics et privés, et le cortège de faillites qui ira avec.

  • Un pas dans la bonne direction pour la Corse

    Le ministre de l’intérieur se rend en Corse aujourd’hui pour tenter de calmer la tempête déclenchée par l’agression en prison d’Yvan Colonna et a déclaré que le gouvernement est « prêt à aller jusqu’à l’autonomie [de l’Ile] ». C’est bien et c’est un bon objectif mais il est encore insuffisant puisque l’aboutissement doit évidemment être une indépendance totale de cette île dont le rattachement à la France est une source continuelle de coûts et de problèmes pour le continent, d’insatisfaction pour les Corses eux-mêmes, depuis qu’elle a été conquise par la force en 1769 par le Royaume de France.

    Lire aussi : La Corse en feu… de nouveau
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    L’autonomie c’est en fait l’indépendance mais avec la pension alimentaire puisque la Corse ne demande pas l’autonomie financière semble-t-il. Il n’y a plus d’espoir aujourd’hui que la Corse puisse un jour être compatible avec la République française il faut donc évoluer, « quoi qu’il en coûte ».

    Le risque est que ce qui sera obtenu par la Corse ne soit ensuite demandé par la Bretagne, le Pays basque ou par d’autres, mais devant le refus de la Corse de s’assimiler aux règles de la République et l’impossibilité pour l’Etat de réduire cette contestation permanente, il faudra bien prendre ce risque, céder aux exigences corses pour l’accompagner doucement vers une souveraineté apaisée et financée.

  • Les armes cliquettent

    La guerre a au moins une conséquence directe : l’Allemagne réarme… Cela ranime évidemment quelques souvenirs alentour, pas parmi les meilleurs du continent européen.

    Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale notre voisin outre-Rhin a veillé à reconstituer sa puissance économique, encore renforcée après la réunification avec l’Allemagne communiste suite à la chute du Mur. Mais Berlin a toujours veillé à rester à l’écart de la puissance militaire, refusant de participer à toutes opérations armées extérieures et n’investissant que fort peu dans son armée nationale, préférant rester sous le parapluie nucléaire des Etats-Unis d’Amérique, plutôt que de risquer d’être à nouveau entraînée dans un conflit comme ceux qui l’ont emmenée si loin au XXème siècle.

    L’un des effets de la décision russe d’envahir l’Ukraine est d’avoir provoqué cette situation : l’Allemagne réarme ! L’avenir dira si c’est une bonne nouvelle.