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  • BYRNE David, ‘Qu’est-ce que la musique ?’.

    Sortie : 2017, Chez : Philharmonie de Paris – Editions.

    David Byrne fut la tête pensante du groupe Talking Heads qui à la fin des années 70′ a intellectualisé le mouvement post-punk new-yorkais en produisait une musique originale et plutôt sophistiquée. Ils étaient quatre potes qui se sont rencontrés dans une école d’art et David prendra le leadership du groupe au point de fatiguer ses compères, malgré une inventivité dont ne pouvaient se prévaloir les autres musiciens du groupe. Une fois celui-ci dissous au début des années 1990, David Byrne a continué une carrière solo en favorisant de multiples incursions dans des genres musicaux les plus variés et des collaborations avec de nombreux d’artistes dont certains débordaient largement le domaine musical. Il a notamment réalisé des films, joué dans certains comme acteur, composé des bandes originales, participé à des aventures théâtrales… Bref, avec Davide Byrne on n’est jamais déçu et la nouveauté est toujours au coin du bloc. En 2018 encore il présenta sur la grande scène de la Philharmonie de de Paris sa nouvelle œuvre « American Utopia » : un concert de rock mis en scène comme une pièce de théâtre, une réussite.

    « Qu’est-ce que la musique ? » est une sommité dans laquelle Byrne explique le monde dans le quel il vit depuis sa naissance en 1952. S’en suivent 450 pages historiques, factuelles, réflexives, existentielles sur la musique et nous. En fait, surtout sur la musique et David Byrne !

    On passe en revue la place de la musique dans la culture de l’Humanité, les révolutions de l’apparition et du développement des techniques d’enregistrement qui l’ont fait passer d’un moment éphémère et convivial à un processus renouvelable et personnel, la place de la représentation en concerts dans la créativité des musiciens (et leurs revenus…). On revient sur le célèbre « CBGB », tripot new-yorkais où jouèrent les groupes précurseurs de l’underground américain : Talking Heads, Blondie, The Ramones, Patti Smith, Television, Sonic Youth. Byrne avec un souci du détail qui l’honore va même jusqu’à publier un plan de ce lieu mythique pour expliquer comment les musiciens de tenaient par rapport aux spectateurs. Les amateurs de rock de cette époque apprécient…

    Plusieurs chapitres sont consacrés à la technique qui façonne la musique, de l’analogique au numérique, des bricolages sur bandes magnétiques de cassettes aux boucles électroniques auto-générées par des algorithmes devenus eux-mêmes créatifs. La musique est aussi une industrie et David Byrne nous explique les liens commerciaux existant entre maisons de disques, producteurs, interprètes, compositeurs, auteurs. Tout ça n’est pas simple et les plus grands se sont parfois fait embobiner par le business. Mais à la fin il reste toujours… la musique, présente d’ailleurs depuis le début puisque d’après l’auteur les Néandertaliens jouaient déjà de la flûte (taillée dans un os) et que la Bible démarre sur « Au début était le verbe », c’est dire que tout à commencé avec un son !

    Le dernier chapitre « Harmonia Mundi » conclut sur la musique « géométrie de la beauté ». On y apprend au détour d’un paragraphe que Byrne est atteint du syndrome d’Asperger qui rend les interactions sociales plus difficiles mais permet à ceux qui en sont atteints de développer une hypersensibilité et un imaginaire abondant.

    Cet essai est un livre de fan des Talking Heads, de David Byrne, du rock en général et tout particulièrement de l’époque underground des trois dernières décennies du Xxème siècle. Extrêmement analytique il permet à Byrne de partager sa connaissance d’un monde dont il est acteur et à ses fans de se rapprocher un peu de cette création musicale qui guide leurs vies.

  • La Turquie « illumine » la marine française

    Des incidents navals opposent régulièrement en Méditerranée des bâtiments de la marine turque à ceux de la flotte de l’OTAN, l’organisation du Traité de l’Atlantique Nord dont fait aussi partie la Turquie… Le dernier en date s’est déroulé fin mai alors qu’un navire français participant à l’opération de sûreté maritime Sea Guardian assurant une veille sur toute activité pouvant représenter une menace ou un soutien au terrorisme international, voulut contrôler un cargo supposé transporter du matériel militaire de Turquie vers la partie de la Libye gouvernée depuis Tripoli par le gouvernement reconnu par la communauté internationale et fermement soutenu par Ankara. La Libye étant sous embargo concernant les armes, l’intervention de l’OTAN vise à faire respecter celui-ci. Elle a tourné court car le cargo était escorté par des navires militaires turcs qui ont menacé de tirer sur la frégate française en « l’illuminant » de ses radars de tir, ultime étape avant le déclenchement d’un tir.

    En résumé un pays membre de l’OTAN, protégeant un probable trafic d’armes vers un pays sous embargo, a menacé un second pays membre de l’OTAN. Ambiance… En réalité, la Turquie conteste cet embargo arguant que la Russie qui soutient la rébellion libyenne alimente celle-ci en armes par la voie aérienne et que personne ne la contrôle. C’est un fait, et la France qui avait tout de même envisagé de vendre des centrales nucléaires et des avions de combat à la Libye de Kadhafi, avant de déclencher en 2011 l’intervention militaire qui a déposé celui-ci, n’est probablement pas la mieux placée pour donner des leçons de droit international à la Russie ou à la Turquie…

    Le véritable enjeu réside plutôt au niveau de l’Alliance atlantique qui fait face à de véritables questions existentielles dans un monde post-guerre froide et qui affronte une véritable sécession en son propre sein avec un pays en quête de rétablissement de sa puissance au détriment des autres, ne facilitant pas la réflexion en cours sur l’avenir de cette alliance. La Turquie fait feu (si l’on ose dire) de tous bois et ne perd pas son temps dans d’interminables états d’âme. Elle n’hésite pas à employer la brutalité ou la menace à l’encontre de ses « amis » lorsque cela sert ce qu’elle croit être ses intérêts. Après tout, elle posa sa candidature pour entrer dans l’Union européenne alors qu’elle occupe illégalement une partie de Chypre, Etat-membre de l’UE, depuis 1974. Le jeu consiste pour Ankara à faire peur avec culot pour obtenir ce qu’elle veut. Après-tout, quel pays occidental est prêt à déclencher une guerre pour empêcher la Turquie (ou la Russie) de livrer des armes à une Libye en pleine déconfiture (qui plus est, du fait d’une intervention militaire occidentale de 2011) ? Sans doute aucun ! En tout cas la frégate française n’a pas ouvert le feu sur son « partenaire » turc comme le veut la procédure lorsque le navire « ennemi » allume ses radars de tir contre un autre bateau.

    Le sujet est de savoir s’il y a moins d’inconvénients à garder la Turquie dans l’OTAN que de l’en sortir, dans l’hypothèse optimiste où tous les autres membres seraient unanimement d’accord pour montrer la porte de sortie à cette nation religieuse turbulente. Pour le savoir, il faudrait tenter l’expérience… Comme une famille ou une assemblée de copropriétaires, une union stratégique fonctionne harmonieusement lorsque ses acteurs sont bien élevés et de bonne compagnie. La Turquie ne rentre plus dans cette catégorie depuis longtemps et le reste de la famille supporte pour le moment les gesticulations de ce gamin de mauvaise compagnie.

  • Les Fillon et consorts condamnés pour détournement de fonds public

    Coco / Charlie Hebdo (01/03/2017)

    Par suite des contrats de travail fictifs offerts à sa femme Pénélope, François Fillon est condamné à cinq ans de prison dont trois avec sursis pour détournement de fonds publics, et complicité d’abus de biens sociaux, plus une amende de 375 000 euros et dix ans d’inéligibilité. Sa femme est condamnée à trois ans de prison avec sursis, la même amende et cinq ans d’inéligibilité. Son suppléant qui l’avait remplacé à l’assemblée nationale lorsqu’il avait été nommé ministre puis premier ministre, et qui avait poursuivi les mêmes pratiques douteuses au bénéfice de Pénélope, est condamné à deux années de prison avec sursis et quelques autres broutilles. Ils doivent en outre rembourser les fonds détournés à l’assemblée nationale qui s’était portée partie civile, soit un bon million d’euros.

    Les trois condamnés à ces lourdes peines ont fait appel. Que la justice passe !

  • Les mafieux doivent éviter de se servir de leur téléphone

    Juin / Le Canard Enchaîné (14/10/2015)

    Encore une histoire de cornecul qui agite le microcosme judiciaro-médiatique parisien. Le pousseur de baballe Platini, impliqué dans une affaire de corruption internationale alors qu’il occupait sa retraite de joueur à des fonctions plus ou moins fictives dans une organisation multilatérale de fouteballe, aurait dans une conversation téléphonique évoqué l’aide que le président de la République française Macron se serait engagé à lui fournir pour le sortir de ses tracas judiciaires. Sa ligne était sous écoute légale dans le cadre des procédures en cours et, bien entendu, le compte rendu s’est aussitôt retrouvé dans la presse (ce qui est moins légal) qui en a aussitôt fait ses gorges chaudes.

    En gros, par les temps qui courent, qu’un dirigeant français se soit engagé à aider un fouteballeur, ou pas, qu’il l’ait fait, ou pas, n’est pas d‘une importance majeure car la France a d’autres choses à faire pour le moment que de perdre son temps sur de pareilles affaires. Non, ce qui est le plus stupéfiant dans cette situation c’est qu’après des décennies d’écoutes téléphoniques, de pocket-calls malencontreux, publiés dans la presse, qui ont conduit nombre de célébrités au lynchage judiciaro-médiatique, voire pénal, il existe encore des olibrius suffisamment stupides pour évoquer leurs embarras judiciaires au téléphone ainsi que les options illégales qu’ils comptent mettre en œuvre pour s’en sortir ! Il n’est quand même pas compliqué de comprendre que ces moyens de communication ne sont pas fiables et qu’il vaut mieux convenir de ses petits arrangements douteux entre quatre yeux plutôt que dans un téléphone.

    Il se dit que le président russe Poutine a toujours refusé d’utiliser un téléphone mobile. Ce garçon, ancien officier du KGB soviétique semble largement plus malin que Platini…

  • 58,4% d’abstention aux élections municipales

    Près de 60% des électeurs en France ne se sont pas déplacés ce dimanche pour aller voter aux élections municipales. Cela en dit long sur la tartuferie des analyses entendues à longueur de temps sur les plateaux télévisés et les dîners mondains comme quoi le poste de maire est le dernier qui inspire le respect, que Monsieur le Maire est l’homme des « territoires », proche du « peuple » et bla-bla-bla et bla-bla-bla.

    En réalité cela veut dire que sur dix pochtrons au Café du Commerce, six sont restés devant leur blanc sec contre quatre qui sont allés dans l’isoloir. La vérité c’est qu’une majorité de français se moque de son maire comme de sa première chemise mais saura, en revanche, trouver le chemin de la Mairie pour aller se plaindre et geindre de ne pas recevoir assez d’argent public.

    Ainsi va la France du XXIème siècle !

  • « Turner, peintures et aquarelles, collections de la Tate »

    Le musée Jaquemart-André expose des aquarelles, peintures et dessins du peintre britannique Turner (1775-1851). Celui-ci a fait don à la nation britannique à sa mort de l’ensemble de ses œuvres encore dans ses mains. La plupart sont conservées à la Tate Britain.

    Pour les non-initiés le nom de Turner évoque immédiatement ces paysages tourmentés d’une Tamise rougeoyante sous les ors d’un soleil couchant et brumeux, eh bien le musée Jaquemart-André montre que ce n’est pas que ça. La soixantaine d’aquarelles exposent des vues touchantes de paysages anglais à la campagne ou en bords de mer à une époque où les guerres européennes, particulièrement avec la France, empêchaient le peintre de voyager hors de son pays. Puis il pourra se déplacer et étendra sa palette de paysages avec l’Italie, la France, les Pays-Bas… Certaines aquarelles ont des études préalables à des peintures à l’huile, d’autres sont juste l’expression de la curiosité de l’artiste et d’un sens de la couleur des plus subtils.

    Une belle exposition dont on profite d’autant mieux qu’en ces temps de pandémie le nombre de visiteurs est plus limité que d’habitude.

  • Mme de La Fayette, ‘La princesse de Clèves’.

    Sortie : 1678, Chez : Claude Barbin/Librairie Générale de France (1958).

    Tout le monde connaît « La princesse de Clèves » en France suite à la sortie médiatique en 2006 d’un ministre de la République qui, voulant faire « populo », a affiché son mépris pour ce roman qu’il n’avait sans doute pas lu d’ailleurs. Beaucoup de lecteurs récents ont juste voulu se confirmer le mauvais goût de ce ministre qui est ensuite devenu président de la République.

    Au-delà de cette insignifiante balourdise politicarde, la lecture du roman de Mme. De La Fayette est un plaisir littéraire faisant voyager son lecteur à la cour d’Henri II en 1559, soit plus d’un siècle avant l’écriture du livre. On y croise les futilités de la cour et la puissance de l’amour. Mme. De Clèves est l’épouse d’un homme qu’elle respecte mais qu’elle n’aime pas, l’objet de son amour est M. de Nemours qui le lui rend bien. Son mari admirable va mourir de dépit et elle renoncera à se tourner ensuite vers M. de Nemours par sens du devoir, finissant ses jours dans un couvent.

    Le style de Mme. De La Fayette est celui de son époque, parfaitement lisible pour un lecteur du XXIème siècle, enluminé de magnifiques effets de vocabulaire. La description de la passion et de ses effets délétères a traversé les siècles et reste un sujet incontournable de la littérature : amour, sacrifice, renoncement et douleur… Ce petit livre est un délice.

  • Comment la droite va voir une nouvelle fois lui échapper la mairie de Paris !

    2ème tour des élections municipales à Paris XIVème (28/06/2020)

    La gauche alliée aux écologistes va sans doute emporter la mairie de Paris pour la quatrième fois consécutive dimanche 28 juin. Pour la quatrième fois cela signifie une durée totale de 24 années avec un ou une maire socialiste. Une telle durée est en soi inopportune. Quelle que soit la qualité des personnes en charge, 24 ans c’est trop pour le même parti et une alternance aurait été bienvenue déjà à l’issue du second mandat, soit 12 ans.

    Le plus improbable dans cette histoire est que les partis de droite soient incapables de faire liste commune alors que leurs programmes n’apparaissent pas considérablement différents. Un peu plus de sécurité pour les uns, un peu plus « d’urbanisme concerté et végétalisé » pour les autres. Aucun des 3 pieds nickelés ne parle de considérations financières et budgétaires, au contraire, on ne parle que de dépenses a priori nouvelles sans expliquer avec quelles recettes elles seront financées ; il ne faut pas effrayer le chaland ! Bref, tous ces nigauds se battent comme des coqs sur un tas de fumier, préoccupés par leurs égos personnels et préférant perdre de nouveau le pouvoir dans la capitale plutôt que de trouver un terrain d’entente et faire élire l’un d’eux trois. Personne ne veut avoir l’air de compromettre avec l’autre alors qu’il est assez probable que les électeurs conservateurs auraient plutôt plébiscité une telle alliance.

    Cette défaite annoncée est une véritable démonstration d’inefficacité des partis de droite par rapport à l’objectif fixé. Ce n’est pas très grave tant cette probable Bérézina du microcosme politique parisien ne va pas changer la face du monde dans la capitale, mais voir cette ville conservatrice incapable d’empêcher l’élection d’un maire de gauche a quelque chose de risible.

  • La République et les vaccins

    On se souvient que le mois dernier une déclaration du chef d’un laboratoire producteur de vaccins (Sanofi) avait déclenché l’émotion des commentateurs car il avait expliqué que les Etats-Unis d’Amérique finançant une partie de la recherche en cours pour mettre au point un vaccin contre le coronavirus, se verrait réserver une partie de la production de ce vaccin si celui-ci était trouvé. S’en suivirent une série de réactions outragée y compris de la présidence de la République affirmant que « le vaccin [doit être] un bien public et mondial, c’est-à-dire extrait des lois du marché ».

    Un mois plus tard la France annonce fièrement s’être alliée avec l’Allemagne, l’Italie et les Pays-Bas pour cofinancer la recherche du laboratoire AstraZeneca qui s’engage en contrepartie à fournir ces quatre pays avec 400 millions de doses de vaccins une fois le produit mis au point. Bref, ce qui est contestable pour les Etats-Unis ne l’est pas bien entendu pour la France… Une telle attitude relève d’un nombrilisme politique dont la France est hélas coutumière.

    La vérité est que contrairement au slogan asséné par la République le vaccin est un produit dont la recherche est financée par des entreprises privées, éventuellement aidées par des fonds publics, produit dans des usines privées et commercialisés sur des marchés souvent publics, dans le cadre de programmes nationaux de lutte contre les maladies infectieuses. Il y a donc des investissements à mener (recherche, usines, circuits de distribution) et des recettes à encaisser pour amortir ceux-ci. Sauf quelques exceptions, les Etats ont laissé ce processus dans les mains du secteur privé depuis bien longtemps. Alors, comme pour la fourniture de masques de protection, chaque Etat cherche à privilégier sa propre population. C’est compréhensible !

    Sauf à imaginer un système de recherche et de production de vaccins sous l’égide des Nations Unies (un doux rêve), la première entreprise qui va mettre au point le premier vaccin contre le coronavirus va ensuite produire une première dose qu’elle va livrer à un premier client qui sera considéré comme privilégié. On ne pourra pas d’un coup mettre sur le marché plusieurs milliards de doses. Il y a des pays-clients qui seront servis en premier et d’autres… en dernier, « lois du marché » ou pas ! De même, le premier pays qui va recevoir la première dose va bien devoir l’utiliser pour un premier patient qu’il faudra bien désigner. Bref, cette notion de « bien public mondial » s’avère particulièrement fumeuse et vide de sens.

  • Un des leaders du génocide rwandais arrêté… en France

    Félicien Kabuga, 84 ans, affairiste hutu rwandais, fondateur de la Radio-Télévision des Mille Collines (RTLM) ayant attisé le génocide, financier des milices chargées de l’extermination, vient d’être arrêté en France où il séjournait sous un faux nom. Il s’y était réfugié a priori depuis plusieurs années après une fuite dans différents pays depuis ce génocide datant de 1994. Ses enfants et ses proches sont aussi hébergés en France et des pays européens avoisinants. Une enquête du journal Le Monde révèle que la famille Kabuga aurait décidé de « rapatrier » l’ancêtre en France compte tenu de son état de santé déclinant et l’offre de soins médicaux favorable dans l’hexagone… Tous les siens déployaient depuis une grande énergie pour le protéger de la justice internationale qui le recherchait.

    Il est navrant que de tels criminels puissent trouver refuge, même illégalement, en France, relançant ainsi les soupçons jamais définitivement levés de compromission française avec les génocidaires. Son arrestation fait suite à une enquête de police de quelques mois qui a consisté à suivre les enfants pour retrouver le père. D’autres personnages douteux séjournent, ou ont séjourné, en France plus ou moins légalement : la femme du président rwandais Habyarimana, des satrapes africains et leurs descendants, des dirigeants syriens et libyens, etc. Bref, toute une clique de dirigeants corrompus, voire criminels, continue à trouver le chemin de Paris pour venir s’abriter des foudres de leurs populations et de la justice internationale. Accessoirement ils y investissent pas mal de leur argent…

    Il est probable que les dirigeants français actuels se passeraient bien de la présence sur le sol national de ces pestiférés, pas toujours encore condamnés, certainement indésirables. Mais les mauvaises habitudes sont prises et elles sont difficiles à inverser. On peut seulement espérer que le robinet d’admission de ces personnages se ferme progressivement, quitte à renoncer à leurs investissements le plus souvent mal acquis. La France s’honorerait à décourager de telles migrations sur son territoire.

    En attendant, M. Kabuga devrait être livré au mécanisme qui a pris la suite du Tribunal international pour le Rwanda (TPIR), fermé en 2015 après avoir jugé 80 accusés, et laissant huit fugitifs dans la nature dont deux ont été arrêtés depuis, y compris Félicien Kabuga récemment.

  • CLAVEL Bernard, ‘Les roses de Verdun’.

    Sortie : 1994, Chez : Editions Albin Michel.

    Ecrivain « du terroir », Bernard Clavel (1923-2010) fut un romancier prolifique pour qui la guerre fut un constant sujet d’inspiration. « Les roses de Verdun » ne dérogent pas à la règle. Le narrateur, un humble chauffeur de maître, rescapé de Verdun et de la guerre de 1914-18, raconte, le périple accompli avec « Monsieur et Madame » sur les pas de leur fils, jeune lieutenant mort au début de la IIème guerre mondiale.

  • ROY Jules, ‘La guerre d’Algérie’.

    Sortie : 1960, Chez : René Julliard.

    Jules Roy (1907-2000), écrivain et officier français, né en Algérie, attiré par Maurras et Pétain à 20 ans, il rejoint la France Libre à Londres en 1942 d’où il participera comme commandant de bord aux bombardements de l’Allemagne. Il participera ensuite à la guerre d’Indochine avant de démissionner de l’Armée (avec le grade de colonel) dont il estimait qu’elle se déshonorait dans ce conflit. Comme beaucoup de militaires ayant vécu ces tragédies il continua à témoigner de ces évènements sa vie durant.

    1960, l’indépendance algérienne est quasiment acquise, la population métropolitaine attend qu’on la débarrasse de cette guerre d’un autre âge, l’armée française impose sa loi sur le terrain mais les âmes sont acquises à l’émancipation du pays. Jules Roy saute dans un avion et rejoint son département de naissance pour se faire une idée de la situation. Il y rencontre toutes les parties impliquées.

    Il commence par son frère et sa belle-sœur toujours présents sur le sol algérien. Ensemble ils évoquent les rapports entre colons français et indigènes musulmans, des rapports de maîtres à employés qui n’ont guère changé depuis l’invasion de l’Algérie en 1830 par l’armée française, et c’est aussi une partie du problème.

    Il rencontre les habitants d’un village de Kabylie, région régulièrement bombardée par l’armée de l’air pour éviter que le FLN (Front de libération nationale algérien) en fasse son camp de repli. Il passe quelques jours avec un officier qui garde la frontière avec la Tunisie pour empêcher la pénétration des commandos du FLN. Il parle avec des réfugiés algériens en Tunisie fuyant les bombardements français et les exactions du FLN. Bref, il relate intelligemment les positions et expériences des uns et des autres.

    Comme son grand ami d’Albert Camus, Jules Roy, est natif de cette d’Algérie où il laissa une partie de son âme. Comme lui, il ne peut s’empêcher de penser qu’une cohabitation aurait été possible entre colons français et colonisés algériens si une négociation sérieuse avait été entamée en temps utiles. La réalité est probablement autre tant l’indépendance de l’Algérie était inévitable, comme d’ailleurs celle de tous les pays colonisés (seul le Tibet l’est resté au XXIème siècle). Même si les colonisés musulmans avaient bénéficié d’un statut socio-politique équivalent à celui des colons français, ceux-ci étaient les envahisseurs et cela était le péché originel. Quand on ajoute l’inégalité légalement instaurée entre les communautés, le mouvement mondial de décolonisation post IIème guerre mondiale, comment imaginer une seconde que la France aurait pu garder l’Algérie comme l’un de ses départements administratifs ? Certains l’ont rêvé. Malgré deux guerres coloniales perdues par la France, Jules Roy faisait partie de ceux-là…

  • Collomb, 73 ans, accroché à Lyon « quoi qu’il en coûte »

    Dutreix / Le Canard Enchaîné (05/12/2018)

    Gérard Collomb, 73 ans, ex-Parti Socialiste, ex-La République en Marche (LREM), ex-sénateur, ex-député, dont la liste investie par LREM a récolté un score plutôt modeste au premier tour des élections municipales à Lyon, 22% et quelques, a décidé pour le second tour de s’allier avec le parti Les Républicains et d’abandonner la tête de liste. Le garçon ne sera plus maire, poste qu’il a occupé durant dix-huit ans, mais simple conseiller municipal pour six années de plus durant lesquelles il espère sans doute conserver une influence politique sur ceux qui assureront le pouvoir municipal à Lyon.

    Comme tout ceci est déplorable ! A 73 ans, l’homme n’a pas vraiment démérité, il sera rapidement oublié comme nous tous, mais n’aurait-il pas été plus judicieux de passer tranquillement la main à la génération suivante plutôt que de compromettre avec toutes les couleurs de l’arc-en-ciel politique pour conserver une dérisoire illusion de pouvoir ?

    D’autres énergumènes du même acabit s’accrochent à leurs postes électifs comme des moules à un rocher. Martine Aubry, 69 ans, les cheveux noirs de teinture, cherche à rempiler après déjà 18 années passées comme maire de Lille.

    L’un comme l’autre se pensent irremplaçables, se croient influenceurs indispensables au développement de leur ville, s’imaginent personnages centraux dans le cœur de leurs citoyens-électeurs. L’un comme l’autre se laissent déborder par un égo surdimensionné qui les empêche d’admettre qu’ils ont fait leur temps et qu’il n’y a pas de raison que la génération suivante réussisse aussi bien qu’eux. Et puis, dix-huit années au même poste ce sont au moins dix de trop. C’est la garantie de la création de clans, d’affidés, de clients, en plus, éventuellement de réalisations intéressantes.

    Gérard Collomb ne sera plus maire puisqu’il a renoncé à la tête de liste. Martine Aubry n’a pas encore gagné son deuxième tour où elle se frotte à son ancienne directrice de cabinet qui a été investie par LREM. Elle a 46 ans, soit 23 ans de moins que sa concurrente senior. Cette seule différence d’âge devrait suffire à la faire gagner !

  • Bienvenue dans l’industrie !

    Les nouveaux mots à la mode sont « relocalisation » et « réindustrialisation », employés à tort et à travers sur les plateaux télévisés peuplés d’experts mondains et au Café du Commerce. Deux micro-évènements devraient pousser tous ces « sachants » de pacotille à un peu de réflexion préliminaire pour enrichir leurs interventions.

    Depuis le début de la pandémie, nombre d’usines textiles ont été recyclées pour fabriquer des masques protecteurs. Il fallut quelques semaines pour monter en puissance à une période où l’Etat et les entreprises privées cherchaient à de procurer des masques partout à travers le monde pour compléter la production nationale insuffisante par rapport à la demande. Progressivement ces usines françaises ont augmenté les quantités produites et, dans le même temps, la demande diminuait. Le résultat est évidemment dans des stocks de masques invendus. Alors les producteurs privés se tournent vers la puissance publique (donc les contribuables) en exigeant que leurs stocks soient acquis par l’Etat !

    L’industrie (même celle de la fabrication de masques qui ne fait pas appel à des processus de haute technologie) est quelque chose de plus lourd à mettre en œuvre que les services. Il faut des usines, des machines, des plannings, des stocks (de matière première, de produits intermédiaires et finis). Il faut respecter des normes environnementales contraignantes (donc coûteuses) en Europe. Le taux de production d’une usine doit se rapprocher le plus possible de 100% de sa capacité sous peine d’être écrasée par des frais fixes qu’elle ne pourra amortir sur une production trop faible. L’ajustement de la capacité de production à la demande doit être permanente mais nécessite une anticipation raisonnable et des investissements/désinvestissements qui prennent souvent des mois. On ne double pas la capacité d’une usine en deux jours, l’industrie présente une certaine rigidité par construction. Les producteurs de masques sont en train de s’en rendre compte…

    Deuxième « poil à gratter », le syndicat des industries pharmaceutiques rappelle que si l’on veut « relocaliser » la production de principes actifs en France ou en Europe, outre les probables augmentations de coûts de production de ces produits, il faudra également que les citoyens acceptent de voir construire des usines chimiques, souvent classées « Seveso » dans leur environnement, car il s’agit bien de chimie. A l’heure où l’incendie de l’usine de Lubrizol à Rouen en 2019 continue à déclencher polémiques, enquêtes et actions en justice, il est bon de se rappeler que l’industrie présente des avantages mais aussi des risques. On imagine sans trop de difficultés la réaction des municipalités (et de leurs administrés) lorsqu’une demande de permis de construire une usine chimique sur leur territoire sera déposée…

    Bref, tout est possible pour autant que tous les éléments de cette éventuelle réindustrialision / relocalisation soient pris en compte. La « démocratie » impose sans doute que ces sujets soient aussi traités sur les plateaux télévisés et les réseaux dits « sociaux », mais ce serait l’honneur des animateurs et participants à ces débats d’éclairer Mme. Michu sur l’ensemble de la question au lieu de lâcher des slogans dans la nature, propres à déclencher de l’audience stopper toute réflexion et analyse.

  • BRASILLACH Robert, ‘Les sept couleurs’.

    Sortie : 1939, Chez : Librairie Plon.

    Il est difficile d’ouvrir un livre de Brasillach sans être aussitôt assailli par tout le sordide véhiculé par ce nom aux relents de collaboration avec les nazis. Plus jeune que Drieu la Rochelle il n’avait pas participé comme lui à la première guerre mondiale (où il perdit son père) mais il fut autant que lui attiré par l’idéal nationaliste de Maurras et le milieu littéraire et intellectuel parisien foisonnant de l’entre deux-guerres. Mais sans doute plus que Drieu il sombra dans un antisémitisme criminel et hystérique. Ses articles dans « Je suis partout » où il déversait sa haine de l’Angleterre et des « juifs apatrides » constituèrent sans mal le principal chef d’accusation. Le problème des écrivains est qu’il laisse une œuvre, des traces. Il fut fusillé en février 1945 après que de Gaulle refusa sa grâce malgré une pétition en sa faveur signée par nombre d’artistes de l’époque dont Valéry, Claudel, Mauriac, Camus et bien d’autres… Il semblerait que lorsque sa peine fut prononcée par le tribunal, un cri s’éleva du fond de la salle « c’est une honte », Brasillach se serait alors tourné vers le public en répondant « non, c’est un honneur. » Quelques semaines après son exécution, Drieu se suicidait plutôt que de rendre des comptes à la Justice.

    A Claude Mauriac qui interrogeait de Gaule bien plus tard, le général aurait répondu « Brasillach ? Eh quoi : il a été fusillé… comme un soldat. »

    Ce roman sans doute partiellement autobiographique raconte comment des gamins de 20 ans dans les années 30′, issus de milieux bourgeois, ont pu être fascinés par la nation allemande en plein réarmement et nazification. Une Allemagne qui avait pourtant laissé de bien mauvais souvenirs à leurs parents et grands-parents… Mais en ces temps de révolution soviétique où le communisme internationaliste se heurtait de plein fouet et violemment contre le capitalisme, de jeunes esprits en formation, pétris des philosophes germaniques, à la recherche de l’ordre, infecté par les idées antisémites qui étaient largement partagées à l’époque par nombre de français, se sont laissés embarquer par le gloubi-glouba hitlérien.

    En 1939 à la parution des « [Les] Sept couleurs » le pire n’était pas encore accompli mais il s’annonçait. Aveuglés par leurs idéaux, les Drieu, Brasillach et compagnie n’ont pas su sauter du train avant le désastre. Leur intellectualisme ne les a pas sauvés de la compromission avec l’ennemi, leur talent ne les a pas exonérés d’avoir à rendre des comptes.

    Les aventures de Patrice, héros du roman, amoureux déçu, le mènent en Allemagne à Nuremberg où il découvre les grands rassemblement nationaux-socialistes et se laissent emporter par ces messes noires moyenâgeuses. Il est d’autant plus confortable qu’une jeune allemande prend soin de lui à la maison mais elle ne lui fera pas oublié Catherine, son amour de jeunesse qu’il va retrouver à Paris, 10 ans plus tard pour tenter de la reconquérir.

    S’en suit un imbroglio amoureux à la suite duquel François, le mari de Catherine, rejoindra la guerre d’Espagne qui fait rage. Il choisira le camp franquiste dont il reviendra gravement blessé pour retrouver Catherine… peut-être !

    Dans les deux situations, un chagrin d’amour associé au besoin d’absolu d’une jeunesse fiévreuse mènent des amoureux déçus vers le fascisme. Ainsi allait une partie de l’Europe de l’entre-deux guerres. La suite n’a pas été très brillante, hélas ! Même en ces temps d’autoflagellation et de réécriture de l’Histoire, il ne faut pas se priver de lire Drieu, Brasillach ou Maurras qui représentèrent avec talent un courant de l’intelligentsia française, c’était une autre époque.