Des obsessions politiques qui polluent la campagne électorale

La campagne électorale pour les élections européennes du 9 juin dernier avait été centrée sur la guerre à Gaza, largement attisée par le parti de gauche radicale La France insoumise (LFI). Cela n’a pas empêché le Rassemblement national d’arriver en tête avec 31,4% des suffrages exprimés. La campagne en cours pour les élections législatives des 30 juin et 7 juillet, provoquées par la dissolution de l’assemblée nationale le 9 juin au soir, est centrée sur l’antisémitisme. Ces deux sujets sont certes importants pour la bonne marche du monde mais devraient l’être un peu moins dans le cadre de campagnes électorales françaises.

Qu’importe, les partis qui font la course en tête, le Nouveau Front populaire (NFP dont LFI est le principal membre) et le Rassemblement National (RN, droite radicale) ont trouvé là des os à ronger et des motifs d’attaquer l’adversaire. Et ils s’en donnent à cœur joie, ressassant les mêmes slogans rageurs qui, sans doute, n’intéressent pas considérablement leurs électeurs et, surtout, n’orienteront probablement pas le vote des indécis, s’il en reste encore à ce jour.

La droite, et ceux qui s’en réclament sur les plateaux télévisés, cherche par tous les moyens à faire dire à LFI que le Hamas (mouvement qui gouverne la bande Gaza et dont la branche armée a lancé et exécuté les massacres du 07/10/2023 en Israël) est un mouvement terroriste. Les membres de LFI s’y refusent car ils considèrent que ce mouvement s’est défendu le 7 octobre et ne peut pas être considéré comme terroriste. Ils le croient sans doute très sincèrement et restent sur cette position en refusant de prononcer ce qualificatif de « terroriste ». Ils ont le droit de prendre cette position et de l’afficher, accessoirement ce sentiment doit être partagé par une partie de leur électorat. Il est improductif de perdre du temps à essayer de les faire changer d’avis, d’autant plus que c’est une position historique de l’extrême gauche française qui n’est pas nouvelle. Le parti LFI est transparent sur ce point et leurs électeurs se positionnent en conséquence.

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La droite radicale du RN saisit cette occasion pour se refaire une virginité et passer sous le tapis son histoire antisémite. On se souvient des sorties tonitruantes et des plaisanteries nauséabondes de Jean-Marie Le Pen le fondateur du Front National qui s’est transformé en Rassemblement National après un coup de balai donné pour rompre les liens avec les membres du parti les plus voyants dans leur antisémitisme, y compris le patriarche. Les plus anciens qui ont fréquenté les universités françaises dans les années 1970 se souviennent des combats extrêmement violents menés entre les milices du GUD (Groupement Union Défense d’extrême droite) et celle du BETAR (mouvement de jeunesse juif sioniste radical, que l’on peut aussi qualifier d’extrême droite) qui en ont laissé plus d’un sur le carreau. L’antisémitisme est une vieille histoire en France, comme d’ailleurs dans une partie de l’Europe. C’est surtout un drame de la bêtise rendu encore plus aigüe par les nouvelles religiosités qui s’emparent des masses. L’exploit est qu’aujourd’hui le RN arrive à se présenter comme le défenseur des Français de confession juive. Quel retournement ! C’est, au moins, une réussite marketing.

Ce débat qui pollue le processus électoral en cours est vain. Bien entendu il doit rester quelques nazillons au RN et quelques staliniens au NFP, comme dans le reste de la société française d’ailleurs. On n’arrivera jamais à éliminer complètement ces idéologies mortifères. L’essentiel est de s’assurer que les institutions de notre vieille République restent suffisamment solides pour maintenir les digues empêchant leur généralisation, c’est ce qu’on appelle l’Etat de droit, notion tellement contestée par les extrêmes du moment qui privilégient le populisme. Cela reste le cas pour le moment. Mais les barrières contre l’abrutissement des masses restent fragiles et doivent être constamment consolidées.

Et, pour revenir au sujet des élections législatives françaises, le mieux est de laisser les électeurs se prononcer en leurs âmes et consciences et ils auront ce pour quoi ils voteront, les extrêmes, le centre ou la chienlit.