Les grands capitaines d’industrie continuent d’acheter les titres de la presse française et différents médias. La dernière acquisition en date est celle de l’hebdomadaire Paris Match par le groupe de Bernard Arnault après celle encore toute fraîche du groupe BFM par l’armateur CMA-CGM. Généralement ces hommes d’affaires sont plutôt libéraux, voire « de droite » et les médias dont ils sont désormais propriétaires ne diffusent pas vraiment d’idées révolutionnaires. Quelques exceptions toutefois avec les quotidiens Libération et Le Monde, financés eux aussi par des hommes d’affaires mais qui laissent une liberté éditoriale à ces journaux via différents instruments (fondations, pôles d’indépendance…). Le premier affiche une ligne éditoriale clairement « de gauche », le second plutôt de « centre gauche ». Ces sensibilités restent minoritaires dans une presse nationale française globalement acquises aux idées conservatrices et, surtout, au simplisme politique.
Dans les dîners en ville les bourgeois « pas bohème » s’émeuvent de la « bolchévisation » du Monde depuis qu’en mai 1981 il a appelé à voter François Mitterrand. Peut-être sont-ils devenus eux-mêmes plus conservateurs depuis toutes ces années. Les bourgeois restés « bohème » se satisfont de ce journal intelligent, longtemps dit « de référence ». Dans le reste de la population, le journal Le Monde est un O.V.N.I. tant l’abrutissement des masses s’aggrave. Alors que les campagnes électorales se déroulent désormais plus chez Cyril Hanouna que sur les médias historiques, lire des articles de deux pleines pages d’un quotidien, fût-il « de référence », relève de la mission impossible dont plus grand monde n’a envie.
On doit se féliciter qu’il existe encore des financiers capitalistes disposés à financer ce journal en lui laissant sa liberté éditoriale. Pas sûr qu’ils ne soient disposés à le faire encore très longtemps, hélas !
Au Soudan la guerre civile déclenchée par deux galonnés, étouffés par un hubris débordant, se poursuit sans espoir de la voir se terminer à court terme. Le pays est dévasté, au bord de la famine, des millions d’habitants ont été déplacés vers les pays avoisinants ou dans de gigantesques camps de réfugiés, les crimes ethniques se sont multipliés avec leur cortège de meurtres, de viols, de pillage…
Les deux généraux qui s’affrontent semblent disposer de ressources sans limites et on se demande d’ailleurs comment ils arrivent à financer leur arsenal meurtrier compte tenu du niveau de sous-développement extrême du Soudan. Malgré tout les armes affluent de toutes parts vers le pays et alimentent la guerre. On ne sait pas bien comment ni par qui elles sont payées, mais on sait comment elles sont utilisées.
Dans différentes enceintes internationales ou au sein d’organismes humanitaires on critique l’Occident qui reste inactif face à ce désastre, et qui se préoccupe plus de l’Ukraine que du Soudan. C’est incontestable mais l’interventionnisme de l’Occident, en Afrique comme ailleurs, a montré ses limites et a été tout aussi critiqué. De la Somalie en 1992, au Mali en 2012, en passant par l’Afghanistan, les interventions armées menées par l’Occident ces dernières décennies ont été des échecs politiques, même si parfois assises sur des succès militaires. Mais à chaque fois les troupes ont dû être piteusement repliées, laissant au passage des dizaines de morts dans leurs rangs, sous les huées des populations locales. On comprend que les pays de l’Ouest soient réticents à se lancer dans de nouvelles interventions.
L’Organisation des Nations Unies (ONU) est impuissante. Les embargos sur les armes prononcés sont contournés et ses propositions d’interventions de « forces de la paix » sont rejetées par les parties. L’Afrique est aussi plutôt silencieuse sur le sujet du Soudan qui symbolise le pire de ce que deux forbans peuvent faire vivre à un pays sur lequel ils exercent leur pouvoir maléfique. Pour le moment il n’y a guère de solution efficace possible sinon attendre que l’un terrasse l’autre. Le plus rapidement serait le mieux.
Les finances publiques semblent échapper au contrôle du gouvernement. Le déficit de l’année 2024 est maintenant estimé à 6,1% du produit intérieur brut (PIB) c’est-à-dire que l’argent public déversé sur le pays excède largement les recettes recouvrées sur les contribuables, personnes physiques comme morales. 6,1% de déficit est un chiffre considérable et un score rarement atteint par la France, digne d’un pays sous-développé. Dans son discours de politique générale le nouveau premier ministre a annoncé ses objectifs de revenir à 5% en 2025 et 3% (la norme plus ou moins admise au sein de la zone euro) en 2027. Bien entendu, c’est la énième fois que la République repousse cet objectif des 3% et prend des engagements qu’elle ne sait pas tenir…
Depuis plusieurs jours les chiffres fuitent sur le bouclage du budget 2025 à 5% de déficit, toujours en devenir à l’heure actuelle. Ce matin un montant de 60 milliards d’euros était annoncé, 40 milliards d’économies à faire sur les dépenses et 20 milliards d’impôts nouveaux à collecter. Ces sommes sont gigantesques, particulièrement les 40 milliards à économiser en un an. Les ordres de grandeur donnent le frisson et on voit mal comment ce pays addict à la dépense publique pourrait réaliser un tel exploit. Si on ramène ce chiffre aux dépenses du budget initial de l’Etat pour 2024, soit 453 milliards, cela fait une baisse de dépenses de 9%. Beaucoup de ménages ou d’entreprises ont eu à un moment ou un autre de leur existence à consentir un tel effort ; l’Etat français, jamais. Et encore, cette économie laissera subsister un déficit de 5% du PIB en 2025…
C’est un sérieux aveu d’échec pour le gouvernement précédent et le président. Lors de sa première élection en 2017 Emmanuel Macron avait fait du redressement des finances publiques post François Hollande une priorité. Il avait réussi à tenir les 3% de déficit en 2017 et 2018 puis la crise sanitaire de la Covid est arrivée avec l’annonce du « quoi qu’il en coûte » dont le pays n’a jamais réussi à sortir.
Alors à peine effleurées les incontournables mesures de correction qu’il faut prendre, augmentation des impôts et réduction des dépenses, le bal des pleureuses s’est ouvert pour expliquer que, certes, il faut économiser, pas chez soi, mais chez les autres bien entendu. Chaque corporation y va de ses lamentations, tous assènent des simplismes de première catégorie « va-t-on réduire le nombre de médecins ou de policiers ? », chacun explique qu’il n’est pas possible de baisser la dépense dans son domaine et tous conviennent qu’ils ne pourront pas affronter des augmentations d’impôt. En termes macroéconomiques d’ailleurs, les baisses de dépenses et les hausses d’impôt aboutissent un peu à la même chose : le redressement des finances publiques avec un risque récessif sur l’économie puisque dans un cas comme dans l’autre, il y aura moins d’argent injecté dans l’activité économie.
La corporation du patronat (MEDEF) s’est exprimée par la voix de son président qui a expliqué dans les médias que les entreprises étaient prêtes à consentir un effort en payant plus d’impôts si et seulement si c’était pour un temps limité et dans la mesure où l’Etat ferait des économies. Cela ressemble à une (légère) ouverture… en tout cas à du réalisme. Mais il est peu probable que l’Etat soit capable de réaliser les économies annoncées, l’affaire risque de se terminer par une hausse durable des impôts sur les entreprises et sur les particuliers, et sans doute pas que les « très riches ».
Pour le moment la France trouve toujours des prêteurs pour financer ses gabegies mais les taux d’intérêt augmentent. La République a levé des fonds ces derniers jours à des taux supérieurs à ceux consentis à la Grèce et au Portugal, deux pays qui ont eu à affronter une crise financière sévère ces dernières années qui se sont traduites par des réformes structurelles que la France n’a jamais réussi à mettre en œuvre. Le taux est lié au risque de non-remboursement que le prêteur estime prendre sur l’emprunteur. Celui-ci pense donc que pour le moment prêter à la France est plus risqué qu’à la Grèce. On ne peut pas dire que cela soit très brillant.
Et pour le moment on n’a pas encore parlé de la Loi de finance de la sécurité sociale ce qui va encore être une autre paire de manches !
L’issue des élections législatives anticipées de juillet dernier a été de porter à l’assemblée nationale trois minorités : la gauche propalestinienne réunie sous la marque électorale Nouveau Front Populaire (NFP), un conglomérat de partis menés par La France Insoumise (LFI), un centre dominé par le parti présidentiel et Les Républicains (LR) et le Rassemblement National (RN), bâti sur les bases de l’ancien Front National d’extrême droite.
L’entre-deux tours de ces élections a vu la reconstitution du « front républicain » consistant en des désistements et alliances improbables pour empêcher un candidat RN arrivé en tête au premier tour d’être élu au second. Les tenants de ce « front républicain » considèrent que le RN ne fait pas partie de « l’arc républicain » et que tous les moyens doivent donc être utilisés pour l’empêcher d’arriver au pouvoir, y compris, pour le centre droit, en faisant élire des députés LFI. Cette tactique a bien fonctionné et le RN, qui se voyait déjà aux commandes, n’a finalement eu « que » 143 députés élus si l’on compte aussi avec eux les candidats LR qui ont rallié le RN. Malgré les 11 millions d’électeurs qui ont voté pour ce dernier, les caractéristiques de ce scrutin à deux tours ne lui ont pas permis de faire carton plein et d’emporter la majorité, ce qui aurait été sans doute le cas si le scrutin avait été proportionnel ou si le « front républicain » n’avait pas fonctionné.
Les tractations estivales menées alors que la France profitait des dépenses publiques considérables engagées pour les jeux olympiques d’été organisés à Paris ont aboutit au fait que le programme du NFP fait peur à tout le monde (sauf à ses électeurs) et qu’aucune des deux minorités de droite n’est disposée à faire affaire avec lui. Au contraire, le centre droit comme le RN ont affirmé leur volonté de censurer tout gouvernement comportant des ministres LFI. Prenant acte de cette situation, le président de la République a désigné un premier ministre de droite, Michel Barnier, issu du parti Les Républicains, qui ne représente que 8% de l’assemblée, mais qui a le mérite de pouvoir envisager de présenter des textes emportant le soutien, ou au moins l’abstention du centre droit, de LR ou du RN, alors que le NFP aurait quasi systématiquement vu ses projets contrecarrés par le centre et le RN réunis dans une même opposition.
La gauche s’égosille et qualifie de « déni démocratique » le fait que le premier ministre ne soit pas issu de ses rangs mais elle a face à elle deux minorités qui peuvent constituer une majorité pour soutenir ce gouvernement, ou le faire tomber. On pourrait d’ailleurs voir un jour le RN s’associer avec la gauche propalestinienne pour voter une censure, ils pourrait y parvenir, au moins mathématiquement parlant. En attendant les représentants du NFP, relayés par les convives des dîners en ville, réaffirment qu’on ne peut pas parler ni négocier avec le RN. En réalité, le résultat de ces élections a marqué une nouvelle étape dans la « normalisation » du parti fondé par Jean-Marie Le Pen sur des fondamentaux de l’Algérie française et de la collaboration. Son successeur, le RN, présidé par Marine, la fille de Jean-Marie, s’est efforcé de gommer ces aspects rugueux. Par ailleurs, la génération de ceux qui ont connu la guerre d’Algérie, et encore plus la collaboration durant la seconde guerre mondiale, est en train de s’éteindre. Ces irritants vont progressivement disparaître. Et puis, le sujet de l’immigration, autre marotte du RN est maintenant une problématique largement partagée par les autres partis, sauf bien sûr LFI qui vante en permanence les mérites de la « créolisation » de la société française. Il ne devrait pas y avoir trop de difficultés pour le gouvernement Barnier à trouver un accord pour essayer de réduire certains flux migratoires. Pour le reste, notamment l’avenir de la réforme des retraites il faudra attendre pour connaître le sort qui lui sera réservé !
Malgré les vociférations des uns et des autres, le résultat de cette élection législative impromptue montre que la France est « de droite ». Il n’est pas illégitime que le président de la République en ait tenu compte dans le choix du premier ministre. Toute nouvelle dissolution à court terme ne devrait pas fondamentalement changer les choses. Le gouvernement de la France dans ces conditions va être périlleux mais si les Français le voulait différemment ils auraient voté autrement. Il faut maintenant assumer le choix émis par les électeurs. C’est ce qu’on appelle la démocratie.
Avec une constance qui force l’admiration la République poursuit l’engagement de dépenses somptuaires non prioritaires malgré la situation déplorable de ses finances publiques. A peine la page des jeux olympiques (JO) d’été organisés en France refermée, avec ses dépenses publiques conséquentes, celle des JO d’hiver 2030 dans les Alpes s’est ouverte. Entre deux on a récemment appris que les restaurateurs et bistrots parisiens qui ont été gênés cet été par les zones protégées installées pour les spectateurs demandent des indemnisations à l’Etat, donc aux contribuables. Et cela vient après les multiples compensations déjà octroyées cette année à de nombreuses corporations et salariés pour prendre en compte une baisse d’activités pour certains, ou une hausse du travail pour d’autres. On se souvient du psychodrame mené par les bouquinistes des quais de Seine à qui on a d’abord demandé de démonter leurs boites le temps des jeux, avant finalement de les autoriser à les maintenir par suite du déclenchement d’une polémique au « Café de Flore » et devant les tribunaux.
La candidature des Alpes françaises pour les JO d’hiver 2030 a été présentée et acceptée par le comité olympique international (CIO, organisation mafieuse installée à Lausanne en Suisse) sous réserve de ses habituelles exigences : exonération fiscale totale de ses activités commerciales et garantie financière en cas d’annulation ou de non atteinte des objectifs d’activité. Pour ce faire une loi est nécessaire et elle est en train d’être élaborée. Ces garanties présentent assez peu de risques de devoir être mises en œuvre, sauf si ces JO étaient annulés, en revanche, les exonérations fiscales délivrées sont non-seulement injustes et injustifiées, mais représentent un abandon de recettes très significatif pour l’Etat. Ces décisions financières inappropriées vont une nouvelle fois dans le sens de la facilité : il suffit de dépenser. L’incapacité congénitale du pays à prioriser ses dépenses publiques est sans limite. N’aurait-il pas été opportun d’expliquer aux citoyens-contribuables que le moment est venu pour un peu de sobriété budgétaire ?
Dans les dîners en ville la réaction générale est que « les Français ont été heureux cet été avec les JO à Paris », qu’il ne faut pas avoir « une vision comptable » des choses et que les dépenses afférentes étaient donc justifiées ; alors en avant pour les JO 2030 dans les Alpes. C’est le syndrome français, comme les enfants on veut tout en même temps, sans devoir choisir ni renoncer à rien. Les mêmes convives qui la phrase d’après se lamentent sur les inégalités dans le pays ne songent pas une seconde qu’on aurait pu affecter les dépenses des JO à réduire certaines de ces inégalités, ou à commencer à rembourser les dettes abyssales que nous laissons à nos enfants. Non, dépensons toujours plus, le contribuable paiera ! Il y aura sans doute un jour des limites à cet exercice, hélas…
Avec constance et une relative efficacité, au moins à court terme, l’armée israélienne réussit à tuer les cadres des mouvements terroristes qui cernent son territoire. Les conditions dans lesquelles sont « neutralisés » ces chefs de guerre dépassent souvent l’entendement et marquent à quel point les services israéliens ont infiltré leurs ennemis. L’histoire donnera sans doute un jour les détails de ces opérations d’infiltration, qui, et comment, délivre les informations nécessaires à Israël pour tuer les dirigeants ennemis.
Certaines opérations sont assez peu « chirurgicales » et lorsque que l’armée est informée de la présence d’un ou plusieurs chefs dans un endroit précis c’est tout l’immeuble qui est bombardé sans trop s’inquiéter d’éventuels « dégâts collatéraux » parmi les populations civiles environnantes. D’autres sont réellement ciblées comme l’assassinat d’Ismaël Haniyeh, le chef du mouvement religieux Hamas qui gouverne la bande de Gaza, réalisé en plein Téhéran le 31 juillet dernier, alors qu’il effectuait une visite officielle dans ce pays. Cette opération n’est pas sans rappeler celle contre Ayman Al-Zawahiri, le dirigeant du groupe religieux terroriste « Al-Qaida », atteint par un missile américain en plein Kaboul en août 2022, alors qu’il était à son balcon. La munition semble avoir visé directement le balcon sans avoir causé aucun autre dommage que la mort du chef terroriste. On se souvient également que quelques mois plus tard, un physicien haut responsable du programme nucléaire iranien avait été assassiné dans Téhéran, sans doute à l’initiative d’Israël, malgré la protection renforcée dont il bénéficiait.
La guerre en cours au Proche-Orient déclenchée depuis l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné une avalanche d’innovations techniques sidérantes mises en œuvre et employées dans des assassinats plus ou moins ciblés. Il y a quinze jours on a assisté avec stupéfaction à l’affaire dite des « bipeurs ». Le mouvement terroriste religieux Hezbollah avait interdit à ses membres d’utiliser des téléphones mobiles dont tout le monde sait désormais qu’ils sont traçables et écoutables et les avait remplacés par des bipeurs et des talkies-walkies, outils plus anciens et en principe moins visibles par « l’ennemi ». Eh bien mi-septembre, ce sont des milliers de ces instruments qui ont explosé quasiment au même moment au Liban dans les mains ou à la ceinture de leurs détenteurs. Il y a eu des milliers de blessés et quelques dizaines de morts. A priori tout le management moyen du Hezbollah a été blessé ou mis hors d’état de combattre d’un seul coup. Les « experts » de plateaux télévisés soupçonnent que les services secrets israéliens aient pu détourner les bipeurs et talkies-walkies avant leur livraison pour introduire quelques grammes d’explosif dans chacun dont l’explosion aurait été déclenchée à distance par Israël le moment venu. On découvre par ailleurs que l’ambassadeur iranien au Liban avait son propre bipeur et a donc été blessé dans l’opération, confirmant au passage par l’absurde les liens entre ce mouvement et Téhéran.
Quelques jours plus tard c’est le grand chef du Hezbollah qui était à son tour assassiné dans la banlieue de Beyrouth. Il semble que l’absence de moyens de communication après la destruction des bipeurs ait forcé les hauts dirigeants à se réunir en face à face dans un bunker hypersécurisé. Un bombardement avec des munitions appropriées capables de forer le béton a fait le reste. Depuis d’autres attaques se poursuivent contre des dirigeants de la hiérarchie du Hezbollah, dont la tête pensante des attentats contre les forces françaises et américaines qui, il y a 40 ans, essayaient de mettre fin à la guerre dans le cadre d’une mission internationale de maintien de la paix. Il y avait eu 58 militaires tués côté français et 220 côté américain.
Cette inventivité technologique israélienne n’est pas exclusive, malheureusement, de destructions massives comme celles engagées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre qui auraient fait plus de 40 000 morts selon les chiffres du Hamas.
Mais la supériorité militaire de Tel Aviv sur les pays et mouvements qui la cernent n’est que tactique. Elle n’est d’ailleurs pas nouvelle et n’a jamais permis d’apporter la paix dans cette région sur une base durable. Elle a permis d’éloigner les ennemis du front pour un moment mais toujours ils sont revenus après avoir repris des forces. La guerre « des 6 jours », la guerre « du Kippour », les invasions passées du Liban et autres actions n’ont pas empêché chaque fois OLP, Hamas, Hezbollah de revenir sur le devant de la scène sous un nom ou sous un autre, avec de nouveaux dirigeants quand les précédents avaient été assassinés, et en générant toujours plus de haine et d’esprit de vengeance contre l’état religieux d’Israël. Les seuls pays frontaliers avec lesquels Tel Aviv entretient des relations à peu près apaisées sont ceux avec lesquels des accords de paix ont été signés : l’Egypte en 1979 et la Jordanie en 1994. Ces accords durent et permettent même à ces Etats de collaborer avec Israël dans la lutte anti-terrorisme.
Il faudra sans doute un jour aller dans la même voie avec la Palestine et savoir développer une créativité cette fois-ci au service de la paix dans un contexte encore plus délicat qu’avec l’Egypte et la Jordanie car la Palestine n’est pas un Etat et sa représentation est très morcelée.
En attendant, le Hamas et le Hezbollah, même considérablement affaiblis, continuent à tirer des missiles contre Israël et ne semblent pas rencontrer trop de difficultés pour recruter des soldats !
Un vieux vinyle exhumé des année 1970 : « Irish Tour’74 » de Rory Gallagher, à réécouter sans modération. Rory (1948-1995) fut un immense guitariste irlandais. L’album est un double live de blues-rock où s’exprime le génie du musicien. C’est du blues rugueux, parfois grincheux mené de main de maître par ce guitariste de légende qui chante avec une énergie dévorante. Il est mort bien jeune, à 47 ans. La surconsommation d’alcool et de médicaments en seraient la cause.
C’est le centième anniversaire de la parution du « Manifeste du surréalisme » par André Breton, le Centre Pompidou se devait de fêter l’évènement avec cette exposition « Le surréalisme d’abord et toujours », l’une des dernières avant la fermeture du musée plusieurs années pour rénovation à partir de l’été 2025 jusqu’à 2030. Le mouvement, auquel ont participé des intellectuels et artistes très divers, intrigue par son aspect délirant. Fondé sur les ruines de l’Europe dévastée par la première guerre mondiale il se veut un mouvement d’expression globale où s’entremêlent la poésie, l’art pictural, la photographie, le cinéma.
Je crois à la résolution future de ces deux états, en apparence si contradictoires, que sont le rêve et la réalité, en une sorte de réalité absolue.
André Breton
Utilisant le ou les médias de son choix, les surréalistes sont sommés de laisser divaguer leur pensée pour ne se laisser guider que par leur créativité. Le résultat est souvent renversant : les tableaux de Max Ernst, Dali, Picasso, Magritte, les poèmes d’Apollinaire, d’Eluard, les revues animées par Breton, les références au rêve, à Freud, à l’inconscient, à la politique. Nombre des membres du mouvement ont été adhérents du Parti communiste français (PCF), beaucoup l’ont quitté. Breton a rédigé en 1938 le texte « Pour un Art révolutionnaire indépendant » qui, pour des raisons tactiques a été signé par Diego Riviera. Le tract évoque l’absolue nécessité de séparer propagande politique et subjectivité artistique. Malgré tout, Aragon sera chassé du mouvement au terme d’un « procès » mené par Breton qui l’accuse d’avoir trahi au profit de l’Union soviétique.
Le surréalisme a été exporté dans différents pays et continents. L’un de ses procédés, l’écriture automatique où le psychisme prend le pas sur la conscience, a même été utilisée par David Bowie qui découpait des phrases dans les journaux puis les associait de façon aléatoire :
I’m an alligator, I’m a mama-papa coming for you I’m the space invader, I’ll be a rock ‘n’ rollin’ bitch for you Keep your mouth shut, you’re squawking like a pink monkey bird And I’m busting up my brains for the words
David Bowie (Moonage daydream)
Un livre du poète Claude Cahun est ouvert à la page de ce poème abscond :
J’ai mangé à mon déjeuner ; une gomme à effacer un setier de grains de beauté des graines de santé en purée la langue du chat deux montres en chocolat la queue d’un rat salé du sel d’un sablier des cheveux d’ange et une orange
Claude Cahun
De Cahun à Bowie…
L’exposition est essentiellement picturale avec quelques références aux médias utilisés par le mouvement. Le visiteur non spécialiste n’est pas bien sûr de tout comprendre à ce parcours surréaliste, alors il achète les « Manifestes » (il y en a deux et même les prémices d’un troisième dans le Folio vendu pour 9,40 EUR à la librairie de musée) afin de retourner à la source.
Pierre Soulages (1919-2022), peintre français, est l’un des rares artistes pour qui un musée fut érigé de son vivant, à Rodez, sa ville natale. D’allure moderne, ce musée inauguré en 2014 est composé de bâtiments cubiques construits en acier « Corten », de couleur rouge-rouille, imbriqués les uns dans les autres face au majestueux paysage du plateau de l’Aubrac. L’entrée se fait par la place du Foirail, qui tenait lieu autrefois de marché au bétail, transformée aujourd’hui en un agréable jardin public. Contrairement à la vraie matière-rouille, l’acier « Corten » n’évolue pas et reste figé comme le temps dans les toiles de Soulages. La fixation du temps, l’une des obsessions du peintre.
L’exposition permanente commence avec des photos de l’artiste prises par Claude Gassian, photographe rock qui a figé sur sa pellicule Bowie, Dylan, les Rolling Stones et bien d’autres. Les portraits de Soulages ne sont pas posés, ils le montrent le plus souvent habillé de noir, très grand, un front puissant cerné par une chevelure blanche immaculée, le teint buriné, ridé par le temps qui passe. Le personnage en impose !
La première salle est consacrée aux œuvres peintes de jeunesse, formes abstraites que l’on croirait représenter des calligraphies japonaises, mais qui n’en sont pas. Tracées à grands coups de brosse enduite de peinture noire, de larges lignes s’entrecroisent dans d’étranges messages. On y trouve aussi les « brous de noix », des toiles assez similaires dans la forme mais où la peinture est remplacée par cette mixture à base de noix, produisant une couleur brune plus ou moins claire, développant des signes cabalistiques incompréhensibles mais sensibles.
Vient ensuite une série d’eaux-fortes et de lithographies, toujours aussi abstraites, montrant le sens de l’innovation technique qui animait l’artiste. Les formes étranges de fer ou de bronze, gravées puis trempées dans l’acide qui va en violenter les formes avant d’être encrées puis pressées sont présentées à côté des estampes-eaux fortes issues de leur pressage.
La partie la plus frappante et caractéristique de l’exposition permanente est celle consacrée aux tableaux de couleur noire, dont le fruit d’une donation faite en 2023 par la veuve du peintre, les précédentes ayant eut lieu du vivant de Soulages.
J’aime l’autorité du noir, sa gravité, son évidence, sa radicalité.
Pierre Soulages
Et l’on rentre dans le monde de ce peintre qui a travaillé cette couleur à l’infini ainsi que la matière dont il la constituait. Des tableaux grand format sont offerts aux yeux des visiteurs, souvent constitués de panneaux rectangulaires superposés, peints selon des concepts différents. Certains sont épais, construits à la spatule qui laisse des épaisseurs d’acrylique travaillées par Soulages pour leur impliquer un mouvement de rainures. Parfois des dépôts de matière ponctuent les vagues de peinture noire. D’autres panneaux, lisses, sont composés au rouleau et au pinceau ; ils sont plus reposants mais participent également au mouvement de l’ensemble. Les reflets produits par cette alternance du brillant et du mat, de l’épaisseur et de la finesse, varient au rythme de la lumière du jour ou de celle des projecteurs, la contemplation des œuvres n’est pas la même selon l’heure à laquelle on s’y consacre ou la position du regardeur par rapport à la toile, parfois le noir paraît blanc.
On est entré dans l’espace de « l’outrenoir » cher à Soulages où se mêle le temps et la matière.
Le temps est piégé par l’espace de la toile et tous deux sont là immobiles.
Pierre Soulages
Dans une vidéo disponible dans la salle il répond à une interview de son amie Agnès Varda qui propose d’assimiler « l’outrenoir » à l’outre-tombe ; en souriant il préfère une référence à l’outremer ou l’outre-Atlantique.
On y voit aussi l’artiste sur la terrasse de sa villa dans les collines de Sète, face à l’immensité bleue de la Méditerranée. Après avoir acheté ce terrain où il fit construire sa maison-atelier il dira « j’ai acquis un horizon » et c’est sans doute aussi ce bleu sans faille qui lui inspira le noir torturé qui est devenu sa marque. En revanche, son atelier est installé au rez-de-chaussée d’où il ne voit pas directement la mer qui est cachée par les pins. C’est depuis la terrasse à l’étage qu’il peut laisser son regard divaguer dans la perfection de l’horizon avant de descendre d’un étage et le traduire dans ses toiles.
Pierre Soulages (musée Soulages de Rodez)
Une salle entière est consacrée aux vitraux de l’abbatiale Sainte-Foy de Conques (à quelques kilomètres de Rodez) dont un guide enthousiaste présente les reproductions, les photos et les similitudes avec les toiles. Soulages y a vécu une illumination mystique à l’âge de 12 ans et il sera chargé par l’Etat de concevoir le remplacement des vitraux dans les années 1980. Il travaille intensément avec des chercheurs verriers pour concevoir un verre translucide qui laisse enfin entrer la lumière à l’intérieur du bâtiment pour en révéler la magnificence. Il fera réaliser 800 essais de verres différents avant d’arrêter son choix. Comme dans « l’outrenoir » la couleur du verre translucide évolue avec l’heure du jour illuminant l’architecture intérieure et présentant un léger aspect bleuté lorsqu’on observe les vitraux de l’extérieur. Ceux-ci sont parcourus de lignes noires, similaires à la trace des traits de plomb qui séparent et lient les panneaux de verre des vitraux. Elles marquent mouvements et ruptures sans masquer la lumière. Le résultat est probant, le projet aura duré sept ans !
C’est la journée du patrimoine alors l’entrée est gratuite. On en profite pour s’offrir un déjeuner entre bons amis au « Café Bras », intégré dans le musée, succursale lowcost du « Restaurant Bras » du Suquet, la fierté étoilée de l’Aveyron. Un régal ! Après ces agapes la majestueuse cathédrale Notre Dame de Rodez ouvre ses portes pour un instant bienvenu de recueillement face à la beauté des choses.
Sortie : 2003, Chez : Penguin Random House / Zulma.
Azar Nafisi est une écrivaine iranienne née en 1955, exilée aux Etats-Unis dont elle a obtenu la nationalité. Professeur de littérature à Téhéran elle démissionne de son poste en 1995 lorsque le régime religieux veut lui imposer le port du voile. Elle organise alors des séminaires privés chez elles pour des étudiantes avec qui elle se consacre à la lecture d’œuvres occidentales. Les quatre parties du ce récit autobiographique sont consacrés à « Lolita » de Nabokov, « Gatsby » de Fitzgerald, « Portrait de femmes » de James et « Orgueil et préjugés » d’Austen.
Il s’agit bien entendu de littérature (très) politiquement incorrecte pour le régime des mollahs au pouvoir. Ces livres « immoraux » sont l’occasion pour ces femmes de découvrir le monde occidental, les sentiments et attitudes universels y sont abordés, ceux qui restent « interdits » en Iran : l’amour, la liberté, la politique, le féminisme… Il n’y a pas d’hommes dans ces groupes mais certains apparaissent dans le roman, notamment Bijan, le mari d’Azar et « le magicien », une espèce de sage-poète auquel se réfère l’auteure pour échanger sur les sujets autant poétiques que politiques.
Mme. Nafizi anime ces groupes littéraires de femmes avec une grande affection et un professionnalisme dévoué. Ils sont aussi un moyen de résistance contre l’oppression délirante des religieux au pouvoir. Les évocations qu’elle en fait sont l’occasion de narrer la dégradation de la vie de tous les jours. L’emprisonnement puis la réapparition de certaines de ses étudiantes, l’exécution d’autres, illustrent la folie d’un régime régressif et répressif. La littérature occidentale, mais aussi la poésie perse, permettent de tenter de survire face à l’absurbe.
Toute œuvre d’art digne de ce nom, ai-je déclaré un peu pompeusement, est une célébration, un acte d’insubordination contre les trahisons, les horreurs, les infidélités de la vie. La perfection et la beauté formelle se révoltent contre la laideur et les désastres du sujet abordé. »
Azar essaye de donner à ses étudiantes les clés pour survivre face à leurs « geôliers » qui veulent à tout instant formater leurs gestes et leurs âmes. Elle aborde l’existence de la forte opposition au Chah d’Iran, d’obédience marxiste-léniniste qui s’opposa aux mollahs, perdit ce combat, alors que finalement ces deux mouvements « révolutionnaires » étaient tout aussi idéologiques et totalitaires. Elle parle de la guerre contre l’Iraq et des bombardements sur Téhéran et, surtout, elle narre la vie ordinaire de jeunes intellectuels vivant dans une capitale sous oppression religieuse. Tout ceci est terrifiant mais écrit avec humour et légèreté, rendant d’autant plus incompréhensible un régime d’une telle nature dans ce pays à la culture millénaire.
Issue d’une famille bourgeoise éduquée, son père fut maire de Téhéran, elle eut la possibilité de voyager à l’étranger au cours de ses études, puis de s’exiler pour fuir son pays et le régime d’un autre âge qui y sévit toujours. Dans un court épilogue elle parle bien sûr avec nostalgie de l’exil et de ses étudiantes qui ont connu des parcours divers mais qui, toutes, son restées inspirées par cette littérature rédemptrice.
A la suite de la mort d’un gendarme tué par un chauffard sous l’emprise d’alcool et de stupéfiants, multirécidiviste, sa veuve a prononcé quelques mots durant la cérémonie d’hommage qui lui a été rendue dans sa caserne du sud de la France à Mougins fin août. Elle a parlé de « laxisme », « d’excès de tolérance », affirmé que « la France a tué [mon] mari » et fait référence à l’année 1981, sans doute pour évoquer l’abolition de la peine de mort qui a été adoptée cette année-là.
Elle est depuis la cible de cyberharcèlement sur les réseaux dits « sociaux » où se déverse toute une logorrhée haineuse et vulgaire la visant ainsi que les forces de l’ordre. L’effet de meute joue à plein et chaque « auteur » rivalise de violence avec ses collègues. Cette veuve est traitée de « truie », menacée de mort, invitée à « rejoindre son mari », etc. Devant l’abjection de cette communication, le procureur général s’est saisi du dossier pour d’éventuelles poursuites. On arrive généralement assez facilement à retrouver les auteurs « anonymes » grâce aux adresses IP de leurs ordinateurs ce qui d’ailleurs montre leur naïveté et le côté naturel de l’insulte adopté comme mode d’expression. Et quand on les retrouve devant un tribunal on voit généralement M. et Mme. Michu, qui pourraient être nos voisins de paliers, expliquer « qu’ils n’avaient pas conscience de ce qu’ils faisaient » avec des mimiques d’angelots implorant l’innocence.
De telles attitudes sont le fruit d’une ou deux générations de citoyens laminés par l’irresponsabilité générale qui gouverne notre société, abrutis par une publicité envahissante, le fouteballe décérébrant, les influenceuses à forte poitrine, la télé-réalité, Cyrille Hanouna et Christine Boutin, bref un environnement où on a l’impression que la bêtise, l’inculture et la facilité sont érigés en modes de vie et largement valorisés. Evidemment on peut imaginer que si ces forbans de réseaux dits « sociaux » lisaient Balzac et Hannah Arendt au lieu de déverser leurs tombereaux d’injures numériques nous n’en serions pas là, mais tel n’est pas le cas. Comment inverser cette décadence ? Pas facile d’voir des idées efficaces pour sortir notre civilisation de ce marigot de la pensée.
En attendant, la veuve éplorée du gendarme et ses enfants subissent l’ignominie dans une indifférence largement partagée.
Fin juillet, le régulateur de la communication audiovisuelle et numérique, l’Arcom, n’a pas retenu les chaînes C8 et NRJ12 pour l’attribution des 15 fréquences de la Télévision numérique terrestre (TNT) qui cesseront donc d’émettre à partir de février 2025. C’est évidemment une mesure de salubrité publique quand on connaît le niveau de bêtise crasse d’au moins le premier des deux recalés. C8 appartient aux médias du groupe Bolloré et son animateur vedette, Cyrille Hanouna, bellâtre racoleur, vulgaire et bas du front, se vautre dans la fange depuis des années en subissant régulièrement les foudres de l’Arcom chargée de faire respecter les contreparties sur lesquelles s’engagent les attributaires de ces chaînes. Il s’agit majoritairement de conditions liées au pluralisme politique et à la dignité humaine. Ces fréquences qui sont des actifs publics sont attribuées gratuitement par l’Arcom, il n’est donc pas illégitime que ceux qui les reçoivent soient soumis à des contreparties.
Aussitôt la décision connue, tous les médias du groupe Bolloré et, globalement, l’intelligentsia de droite, ont crié à la violation de la « liberté d’expression ». En réalité les deux chaînes retoquées ont été remplacées par Réels TV appartenant à l’homme d’affaires Daniel Kretinsky et OF TV du groupe de presse Ouest-France. Ni les uns ni les autres ne sont véritablement répertoriés comme « de gauche » donc on ne voit pas bien en quoi la liberté d’expression est mise en cause quand on remplace des chaînes « de droite » par des chaînes « de droite ». Cependant, l’intelligence devrait y gagner mais la « faux-jettonerie » générale empêche les commentateurs d’utiliser cet argument car il est plutôt subjectif et risque de blesser les nombreux téléspectateurs de ces chaînes. En réalité on peut imaginer que les décideurs de l’Arcom se sont basés sur ce critère de l’intelligence pour exclure C8, mais sans le dire.
Les chaînes exclues des fréquences publiques de la TNT ne sont pas censurées ; personne ne les empêche de continuer à émettre via l’Internet ou des bouquets payants, simplement, dans ce cas, elles auront sans doute moins d’audience. Cyrille Hanouna pourra probablement se recaser sur une autre chaîne de la TNT à moins que cette situation ne serve de leçon et que plus personne ne veuille lui proposer un emploi. Dans ce cas il recevrait certainement des offres pour un autre média du groupe Bolloré, peut-être pas pour le même salaire.
Le film documentaire de Mati Diop évoque la restitution d’œuvres d’art africaines qui avaient été prélevées à l’époque coloniale. La réalisatrice se qualifie elle-même « d’afrodescendante », née d’un père sénégalais et d’une mère française. Son film porte l’ancien nom de l’actuelle République du Bénin avec laquelle le processus de retour des œuvres est le plus avancé avec un premier lot de 26 pièces sur 7 000 qui seraient encore détenues en France.
Finalement cette question [la restitution] traverse mon travail. Mais aussi les films que j’ai réalisés à Dakar entre 2009 et 2019 s’inscrivent dans une démarche de retour. Un retour vers mes origines africaines, vers une part de moi-même trop longtemps ensevelie sous l’hégémonie de mon environnement occidental.
La caméra suit la statue homme-oiseau du roi Ghézo depuis son emballage au musée du Quai Branly jusqu’à l’ouverture de la caisse au nouveau musée construit pour ce faire au palais présidentiel de la Marina à Cotonou. La statue parle d’une voix sépulcrale pour réciter un gloubi-boulga de proverbes africains et de considérations philosophiques de bazar. Plus intéressants sont les dialogues échangés dans un auditorium de l’université d’Abomey Calavi, rempli de jeunes discourant sur le thème de cette restitution. Certains crient au scandale que seulement 26 œuvres seulement sur 7 000 soient de retour au pays, d’autres rendent hommage au président béninois qui a lancé le processus, tous se plaignent d’une colonisation qu’ils n’ont pas connue, et de la France coupable de tous leurs maux.
Les sous-titres en français de la voix sépulcrale en langue fon sont en écriture inclusive, chacun se vautre dans la victimisation, le « décolonialisme » transpire de partout, la culture « woke » déborde sur le rivage de Cotonou. Quelques éléments historiques sur les royaumes du Dahomey, sur les personnages représentés par ces statues, sur la colonisation française dans ce pays auraient pu donner un peu plus d’intérêt à ce documentaire.
La bonne nouvelle est que la restitution des œuvres africaines détenues par la France a commencé. De la famille franco-béninoise Zinsou qui a initié ce retour, le film ne dit pas un mot.
De la non-réélection du président indépendantiste du congrès du territoire, Roch Wamytan qui a présidé cette institution environ une dizaine d’années, et son remplacement par une candidate modérée, Veylma Falaeo, jusqu’aux désastres économiques qu’affronte ce territoire pacifique, c’est une vague de mauvaises nouvelles qui déferle.
La non-reconduction du président indépendantiste
Contre toute attente le président indépendantiste Roch Wamytan a été remplacé à la tête du congrès calédonien par Mme. Veylma Faleo du parti l’Eveil océanien. Plutôt modérée, elle s’affiche comme « « ni indépendantiste, ni non-indépendantiste ». Son curriculum-vitae publié sur le site web du congrès (cv Veylma Faleo) déborde de bonnes intentions, d’engagements associatifs, de défense des droits de la femme et de « troisième voie » quant à « l’avenir institutionnel du pays ». Le terme « pays » est d’ailleurs systématiquement retenu dans la documentation émise par le congrès lorsqu’il parle du territoire.
Cette femme n’est sans doute pas vraiment formatée pour emmener l’archipel vers son indépendance, seule issue possible pour sortir de ses contradictions existentielles politiques et économiques.
La Nouvelle-Calédonie s’enfonce dans la crise économique
Les émeutes du mois de mai dernier ont dévasté le tissu économique et les troubles ne sont d’ailleurs pas vraiment terminés, un dixième mort étant à déplorer en juillet dernier, un jeune homme touché lors d’échanges de tirs avec des gendarmes. Le gouvernement calédonien se propose de mettre en place
Un plan de « sauvegarde de refondation et de reconstruction » (S2R) a été élaboré par le congrès. Les grandes lignes en sont présentées sur son site web (S2R) et l’article se termine par :
Le plan a vocation in fine à être transmis à l’État dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2025 (PLF 2025).
Il n’y a pas de montant affiché dans ce plan mais la presse a parlé d’une enveloppe de 4,2 milliards d’euros demandée par le gouvernement calédonien à l’Etat français, c’est-à-dire à ses contribuables.
Et comme une mauvaise nouvelle ne vient jamais seule, la compétition actuelle sur le marché du nickel a entraîné la fermeture, sans doute définitive, de l’usine « du Nord » détenue par des capitaux privés et l’administration indépendantiste de la région nord. A ce stade il n’y a pas de repreneur connu pour cette installation industrielle de toute première importance pour cette région et il est peu probable qu’elle puisse être gérée dans des conditions économiques acceptables par des intérêts uniquement publics qui n’auraient sans doute ni les compétences ni les ressources nécessaires.
Quelle voie de sortie de l’imbroglio ?
Difficile d’imaginer une porte de sortie positive dans une situation aussi désastreuse pour toutes les parties. Il semblerait qu’un certain nombre de personnes de la communauté non-canaque soient en train de liquider leurs affaires sur place pour émigrer soit dans la région, Australie ou Nouvelle-Zélande, soit pour revenir en France hexagonale. L’avenir politique à court terme est sombre, les émeutes vont certainement reprendre un jour ou l’autre, les besoins de financement sont considérables alors que la France est en grande difficultés financières et, le plus grave, personne ne sait bien par quel bout prendre le dossier.
Pas très loin de Nouméa, environ 500 km au nord, étaient le condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides qui obtint son indépendance en 1980 par suite d’un référendum qui se prononça en faveur de ce statut. C’était il y a 40 ans, les enjeux étaient sans doute moindres, 110 000 habitants seulement, pas de matières premières et, sans doute, des dirigeants locaux, français et britanniques plus visionnaires. Puisse la Nouvelle-Calédonie suivre le chemin apaisé montré par le Vanuatu dans les années 1980 !
Christine Boutin (80 ans), ex-députée, ex-ministre, ex-maire, ex-soutien de Mme. Pen aux élections présidentielles 2017 pour « faire barrage » à M. Macron, puis soutien de M. Zemmour à l’élection suivante en 2022, catholique radicale, occupe sa retraite à diffuser ses idées sur le réseau « X » où elle affiche tout de même 94 800 followers.
La lecture de son fil sur « X » permet de cerner ses sujets favoris :
La nocivité des vaccins contre la Covid19
La haine du président de la République Macron et de l’Europe
Et toutes une série de bondieuseries sans grand intérêt
Depuis les révélations sur la sexualité débridée de l’abbé Pierre, elle défend ce curé qu’elle admire malgré ses déviances. A priori elle était au courant de « son attirance pour les seins » et précise que « tout le monde le savait ». Le pardon étant l’un des piliers de sa foi, Mme. Boutin pardonne à son grand homme au regard de ses réalisations.
Le problème est surtout de savoir jusqu’à quand Christine Boutin va continuer à s’exprimer sur les sujets qui lui passent par la tête. Ne ferait-elle pas mieux de s’occuper de ses enfants et petits-enfants ? Encore un drame de l’addiction aux réseaux dits « sociaux ». Quand on pense qu’elle a exercé des responsabilités ministérielles on en frémit a posteriori.
La branche propalestinienne et majoritaire au sein de l’alliance électorale Nouveau front populaire (NFP), La France insoumise (LFI), a publié sur son site web les mots d’ordre retenus pour la manifestation organisée dans différentes villes de France pour contester « le coup de force de Macron ». En effet, le président de la République n’a pas retenu la femme haut-fonctionnaire proposée par le NFP pour occuper le poste de premier ministre. Les arguments des uns et des autres sont bien connus et restent irréconciliables, ce ne n’est pas utile d’y revenir.
Maintenant que le NFP est sûr de ne pas prendre la responsabilité du pouvoir, au moins à court terme, sa composante principale peut sans risque rappeler les éléments clé de son programme, d’où ces six mots d’ordre vigoureux dont quatre concernent l’augmentation des dépenses et deux sont plus sociétaux, dont la reconnaissance de l’Etat de Palestine.
Rien de bien nouveau si l’on se réfère au « contrat de législature » déjà publié par le NFP mais on note qu’il n’y a aucun mot d’ordre concernant les recettes à mettre en œuvre pour financer les dépenses mise en avant pour la manifestation.
Un simple retour au programme permet de compléter cette liste :
Abolir les privilèges des milliardaires
Adopter un projet de loi de finances rectificative le 4 août, pour se doter d’une politique fiscale juste avec notamment les mesures suivantes : • Accroître la progressivité de l’impôt sur le revenu à 14 tranches • Rendre la CSG progressive • Rétablir un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) renforcé avec un volet climatique • Supprimer la flat tax et rétablir l’exit tax • Supprimer les niches fiscales inefficaces, injustes et polluantes • Réformer l’impôt sur l’héritage pour le rendre plus progressif en ciblant les plus hauts patrimoines et instaurer un héritage maximum • Instaurer une taxe kilométrique sur les produits importés
Bien sûr l’appel à abolir les privilèges des « milliardaires » souligné en rouge satisfait presque tout le monde d’autant plus qu’il n’est pas précisé à partir de quel revenu joueront les nouvelles tranches d’imposition ni la progressivité de la CSG. On peut raisonnablement penser que ce ne sera pas que pour les « milliardaires ». Rester dans le flou permet de ne pas trop effrayer ceux qui devront immanquablement payer pour le programme de dépenses et qui sont probablement aussi les participants potentiels aux manifestations d’aujourd’hui.
Le ministère des finances français a remis au parlement une note de la direction générale du trésor, celle qui tient les cordons de la bourse, annonçant un déficit des finances publiques en 2024 de 5,6% du produit intérieur brut (PIB) si aucune mesure d’économie n’est prise pour freiner le paquebot de la dépense publique. La situation aurait été qualifiée par le ministre de « sérieux dérapage des finances publiques ». C’est le moins que l’on puisse dire…
Les dirigeants politiques au pouvoir passant leur temps à annoncer de nouvelles dépenses à tout bout de champ, de campagnes électorales en meetings politiques, il aurait été étonnant que la situation des finances publiques s’améliore ! Et les dirigeants politiques dans l’opposition passent le leur à exiger de nouveaux engagements financiers. Côté dépenses la République ne sait que les accroître, sans forcément s’interroger sur leur nécessité ou leur efficacité. L’organisation des jeux olympiques de PARIS 2004 est un bon exemple de ce paradoxe qui devrait d’ailleurs de poursuivre en 2030 puisque la France est la seule candidate pour organiser les jeux olympiques d’hiver de cette année. En ce qui concerne les recettes, les idéologies s’opposent entre les partisans de l’augmentation des impôts, « il suffit de taxer les riches », et ceux en faveur d’une « politique de l’offre » qui consiste à mettre les entreprises « qui créent la richesse » dans un contexte fiscal et juridique favorable en réduisant les impôts et en stabilisant l’environnement juridique dans lequel elles exercent leurs activités.
Quoi qu’il en soit, la France est l’un des pays de l’OCDE où la dépense publique est la plus forte en pourcentage du PIB, soit 57% en 2023 selon l’INSEE (https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381414), c’est-à-dire que l’Etat prend dans la poche des uns pour donner aux autres. On peut faire passer ce taux à 70 ou 80%, il suffit de le décider collectivement et de voir ce que cela donne.
Dans une récente interview sur la chaîne radio d’information en continue France-Info, la secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT) que pour financer les coûts qui seront générés par l’abrogation voulue de la loi qui a réformé les retraites en faisant passer l’âge légal de départ en retraite de 62à 64 ans, il suffisait de « taxer les dividendes et de revoir les aides octroyées aux entreprises sans contreparties ». Beaucoup de citoyens sont en accord avec ces propositions tant que « les riches [à taxer] ce sont les autres ».
Le dialogue ou les explications avec les tenants de ces théories économiques sont vains tant les positions sont idéologiques et imperméables aux réalités financières. La seule solution pour, peut-être, convaincre est de laisser faire. C’est ce qui s’est passé en 1981 après l’élection présidentielle qui a porté François Mitterrand à l’Elysée. Pendant deux ans l’Etat a appliqué un vrai programme de gauche : nationalisation d’une grande partie de l’économie, passage au 39 heures, retraite à 60 ans, instauration d’un ministère du temps libre, etc. et, dès 1983, il n’y avait plus de sous dans la caisse ni personne pour prêter à la République à des taux acceptables. Celle-ci s’est alors tournée vers la Commission européenne pour obtenir un prêt de trésorerie en échange de ce qui a été qualifié à l’époque de « plan de rigueur » mais qui n’était en réalité qu’un rééquilibrage des dépenses et des recettes publiques. Par la suite, la gauche mitterrandienne s’est convertie en social-démocratie et le ministre de l’économie et des finances Bérégovoy, fils d’un russe « blanc » menchévik exilé en France, lui-même ancien ouvrier métallurgiste, fut le ministre qui libéralisa les marchés boursiers et financiers français et mit fin l’indexation automatique des salaires sur l’inflation. Même dans ses rêves les plus fous, aucun ministre de droite n’aurait osé pareille révolution !
A l’époque la gauche eut tous les pouvoirs en 1981 pour mener sa politique économique socialiste, ainsi que pour inverser le balancier après 1983. Ce n’est pas tout à fait le cas aujourd’hui où la gauche réunie sous la casquette Nouveau front populaire (NFP) est loin d’être unie, n’a pas la majorité absolue et, pour faire passer tout ou partie de son programme, devra trouver des alliances à l’assemblée nationale. Son projet, un peu obsessionnel de ramener l’âge légal de départ en retraite de 64 à 62 ans (en attendant de viser 60) est partagé par le Rassemblement national (RN). Il n’est pas sûr que ces deux partis aux extrêmes arrivent à se retrouver sur un projet commun. Si malgré tout ils y parvenaient, eh bien, la réforme emblématique du macronisme ayant porté l’âge légal de 62 à 64 ans dans le bruit et la fureur serait abrogée. Et les discussions commenceront sur comment financer les coûts générés par cet aller-retour. Le peuple serait content… au moins pour un moment. A suivre.
L’exposition « Jardins du monde en mouvement » montre une forêt composée de lanières de station de lavage-auto fixées à des troncs d’acacias, « Les contes de la forêt, Soro Bardudo » ; des constructions solides faites à partir de champignons « C8H5NO5 » (le nom de la molécule utilisées ; un champ de fleurs en papiers posées sur des tiges métalliques retraçant les parcours et les interactions des résidents de la Cité, « Les reflets du vivant ».
Tout ceci fleure bon l’écologie et les idées saugrenues et sympathiques.
« C8H13NO5 »« Les contes de la forêt, Soro Bardudo »« Les reflets du vivant »
Sortie : 1933, Chez : Flammarion-Eibel / Le Livre de Poche.
Pa Kin (1904-2005), de son vrai nom Li Feigang, est un écrivain chinois qui a vécu tous les chambardements de son pays, de la République de Chine au maoïsme, des seigneurs de guerre à Sun Yat-sen, du Sichuan où il est né à la Place Tienanmen. Anarchiste-libertaire il est percuté par la dictature maoïste, doit dénoncer les siens avant de subir les avanies de la « Révolution culturelle » dans les années 1960 avant d’être réhabilité ensuite. Au moins aura-t-il sauvé sa tête.
Une partie de son œuvre volumineuse est consacrée au combat de la jeunesse pour se sortir des traditions ancestrales qui l’immobilise dans un mode de vie d’un autre âge. « Famille » écrit en 1933, suit le cheminement de trois frères issus d’une grande famille bourgeoise de Chengdu. Quatre générations vivent dans la vaste demeure du grand-père Gao et doivent suivre rigoureusement ses préceptes, ceux de traditions ancestrales, hermétiquement fermées aux lumières de la science et aux attraits de la liberté. Le héros qui est sans doute à l’image de l’auteur pousse tant qu’il peut pour vaincre ce refus familial de toute évolution. Il va y réussir en fuyant son environnement familial sclérosé pour rejoindre Shangaï et ses mirages, à l’image de la Chine elle-même qui a traversé ses révolutions pour devenir un pays moderne sans avoir réussi pour le moment à atteindre la liberté pour ses citoyens.
Le style de Pa Kin est assez naïf mais éclairant sur la Chine des années 1930. Une lecture simple et rapide.