La facture présentée par Moscou à la Syrie

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Riss/Charlie Hebdo (02/03/2022)

La présidence russe vient d’annoncer qu’elle lançait le recrutement de mercenaires syriens pour renforcer ses troupes en guerre contre l’Ukraine. On ne sait pas encore bien quel sera le profil de ces supplétifs : djihadistes, rebelles non-djihadistes, miliciens pro-régime Assad, militaires démobilisés… sans doute un peu de tout mais certainement pas des poètes romantiques. Ils viendront appuyer aussi les troupes tchétchènes également appelées à la rescousse par Moscou et connus pour leur sauvagerie.

Après le sauvetage du régime El-Assad en Syrie par l’armée russe, Moscou présente l’addition et demande l’aide de Damas. Celle-ci devrait lui être octroyée sans trop de difficultés d’autant plus que cela fournit des emplois (et des salaires) à des citoyens syriens vivant dans un pays à l’économie dévastée. Des supplétifs syriens seraient déjà utilisés par la Turquie en Lybie, et même à l’intérieur de la Syrie contre les Kurdes dans la bande territoriale nord occupée par Istanbul. Le mercenariat est en train de devenir une activité économique complémentaire pour la Syrie.

L’utilisation de mercenaires par les Etats est aussi vieille que la guerre elle-même. Dans l’histoire récente on a vu les Etats-Unis d’Amérique y recourir significativement en Irak et en Afghanistan, il s’agissait de sociétés privées, dont la fameuse compagnie Blackwater, mettant en œuvre des salariés américains. La Françafrique eut aussi recours à des mercenaires dans les années 1960 pour mener ses coups tordus dans son précarré, dont le fameux Bob Denard impliqué dans des coups d’Etat au Bénin, aux Comores, des participations à des guerres au Yémen, au Katanga, au Congo belge et bien d’autres. Denard c’était un mercenariat d’opérette dans les années 1960 qui n’a jamais dû faire beaucoup de victimes sinon de détrôner quelques satrapes locaux. En revanche, comme à leur habitude les Américains ont industrialisé le processus et très largement amélioré sa « productivité » lors des guerres du Proche-Orient. L’arrivée de supplétifs syriens et tchétchènes sur un terrain de guerre est-européen risque de réserver quelques surprises et innovations. L’une des questions qui se posera à la fin des hostilités est de savoir si et comment ces Syriens rentreront chez eux ?