« Au boulot » de Gilles Perret et François Ruffin

François Ruffin, journaliste-documentariste-député du groupe écologiste, après s’être fâché avec Jean-Luc Mélanchon, le patron propalestinien de LFI (La France Insoumise), avait réalisé en 2016 un documentaire hilarant sur le combat gagné d’un salarié licencié du groupe LVMH contre le capitaine d’industrie Bernard Arnault.

Il rempile cette année avec moins de réussite sur le thème de la « réinsertion des riches ». Ce documentaire lui a été inspiré suite à une émission de radio, « les Grosses Têtes », à laquelle il participait, et au cours de laquelle une des animatrices, Sarah Saldmann, prononce des mots violents contre les chômeurs qu’elle traite de « feignasses, d’assistés, de glandus, de gens qui ne foutent rien et qui sont entretenus par mes impôts ».

Mme Saldman s’affiche juriste mais semble passer bien plus de temps sur les plateaux médiatiques populaires qu’a étudier le code civil. Elle est située à mi-chemin entre Nabilla (avec moins de poitrine et un peu plus de neurones) et Nadine Morano. Elle ajoute un « grave » devant ses adjectifs dans une phrase sur deux. Elle est jolie et affiche une langue bien pendue, d’où son statut de chroniqueuse sur les ondes pour lesquelles elle a tout de la « bonne cliente ». Sa vie semble organisée entre CNEWS, les cocktails chez les grands bijoutiers et les brunchs au Royal Monceau. Devant l’impossibilité de dialoguer avec elle sur le thème des « assistés », François Ruffin lui propose à l’antenne de partager la vie des smicards à 1 300 EUR/mois pendant quelques mois. Avec un certain courage, elle accepte la proposition mais pour une semaine seulement. C’est cette plongée dans un univers inconnu d’elle que Ruffin va filmer.

Leur première rencontre se déroule à l’hôtel Plaza Athénée où elle commande un croque-monsieur à la truffe coûtant 54 EUR ce qui laisse Ruffin coi. La suite la voit livrer des paquets, nettoyer des toilettes dans maison d’accueil pour personnes précaires, faire le ménage avec une aide de vie chez un malade, etc… mais aussi dans un rendez-vous de haute couture où elle se sent manifestement plus à l’aise qu’avec les pèlerins d’Emmaüs.

Le documentaire est surtout intéressant en ce qu’il montrer une Sarah Saldmann dont on se demande vraiment si elle fait des efforts pour paraître aussi nunuche ou si c’est son état naturel. Était-ce prévu dans le scénario qu’elle débarque en talons hauts et couverte de bijoux pour faire la livreuse ou s’est-elle habillée ainsi « naturellement » pour sa première journée avec les smicards ? Elle verse malgré tout quelques larmes devant l’engagement de la garde-malade qu’elle seconde quelques heures durant. Ruffin joue son rôle, toujours malin, privilégiant l’humour à l’invective. On comprend mieux son divorce avec LFI…

Le spectateur reste indécis, et un peu déçu par le documentaire, comme Ruffin affiche l’être devant l’échec de sa tentative de réinsertion de cette nunuche des beaux quartiers et des plateaux télévisés.