Bruce Springsteen et son E-street band sont de retour à Paris-Bercy dans le cadre d’une tournée anniversaire de l’album The River sorti en 1980. Du coup ils rejouent intégralement ce disque de légende, l’hymne d’une génération, plus quelques « bricoles » légendaires de leur immense répertoire, soit trois heures et demie d’un show endiablé devant une assistance déchainée et aux anges.
Un concert de Springsteen est un puissant antidépresseur tant l’énergie dépensée, la magie de ce rock puissant et la justesse des textes portent à vouloir profiter de chaque instant pour aller jusqu’au suivant, mais c’est aussi un moment d’émotion car quarante ans de vie sont passés bercés par cette musique. Alors si Bruce et les siens ne produisent plus vraiment de nouveautés de cette envergure, on les remercie sans fin de continuer à être pour jouer et rejouer ces morceaux marqueurs de nos existences !
C’est le deuxième show parisien, celui du 11 juillet a été interrompu de longues minutes par une panne d’électricité totale. Rien de tel ce soir malgré des pics de consommation quand les 15 musiciens sont sur le front de scène face à 15 000 spectateurs qui reprennent en chœur Hungry Heart… Sur I Wanna Mary You il fait monter deux amoureux sur scène qui se demandent ne mariage l’un l’autre, sur The River, bouleversant hommage à la vie de working class hero de sa sœur il sort son harmonica déchirant et nous brise le cœur une nouvelle fois, puis Roy déploie des arpèges un peu clinquantes sur son piano à queue pour introduire le poignant Point Blank, et le double vinyle est ainsi déroulé de bout en bout devant une foule assoiffée de rock.
Comme ils n’allaient pas s’arrêter là, les musiciens enchaînent ensuite un medley de hits interplanétaires, de Badlands à Born to Run en passant par Dancing in the Dark, avant, épuisés et sereins, de rendre les armes après 32 chansons, 3h40 de concert. Le Boss revient pour un seul rappel acoustique sur Thunder Road :
Climb in back Heaven’s waiting on down the tracks Oh-oh come take my hand Riding out tonight to case the promised land Oh-oh Thunder Road, oh Thunder Road oh Thunder Road Lying out there like a killer in the sun Hey I know it’s late we can make it if we run Oh Thunder Road, sit tight take hold Thunder Road.
De la sueur, de la poésie, de l’électricité et de l’amour, Bruce Springsteen continue à transcender les foules et les générations. Quel bonheur, quelle puissance, quelle beauté !
Setlist
Iceman (tour debut)/ Lucky Town/ The Ties That Bind/
The River
Sherry Darling/ Jackson Cage/ Two Hearts/ Independence Day/ Hungry Heart/ Out in the Street/ Crush on You/ You Can Look (But You Better Not Touch)/ I Wanna Marry You/ The River/ Point Blank/ Cadillac Ranch/ I’m a Rocker/ Fade Away/ Stolen Car/ Ramrod/ The Price You Pay/ Drive All Night/ Wreck on the Highway
Le reste
Badlands/ The Promised Land/ Growin’ Up/ Because the Night (Patti Smith Group cover)/ The Rising/ Born in the U.S.A./ Born to Run/ Dancing in the Dark/ Tenth Avenue Freeze-Out/ Shout (The Isley Brothers cover) Encore: Thunder Road
Ciné-concert dans le cadre du festival Days Off à la Philharmonie de Paris, le groupe écossais Mogwai joue en direct sur la présentation du film « Atomic : Living in Dread and Promise » réalisé par Mark Cousins. Film étrange et terrifiant sur l’énergie nucléaire dans ses bons et pires aspects. Habitué des bandes-son, le groupe avait déjà mis en musique un documentaire sur le footballeur Zidane. Aujourd’hui, le sujet est plus grave.
La musique est à l’unisson avec la puissance malfaisante et inquiétante de l’atome. Habitués des longues plages instrumentales, les musiciens de Mogwai trouvent ici l’occasion rêvée d’exprimer leur inspiration électronique, parfois planante, parfois vigoureuse. Et alors que défilent à l’écran les images de la propagande nucléaire, ils jouent cachés dans l’obscurité sous l’écran, un peu à la façon du cinéma muet d’antan lorsqu’un orchestre mettait en musique des films alors que la pellicule ne savait pas ajouter le son à l’image.
Le groupe s’est produit à Hiroshima il y a quelques années et en est revenu concerné par l’atome. Sa réalisation de la bande-son de ce film en est aussi la conséquence. Leur musique pure et éthérée sait dire l’espoir et la dévastation qui sont la marque du documentaire qu’ils font parler, ajoutant leur propre interprétation et guidant celle de l’audience.
Les musiciens s’éclipsent à la fin du film et laissent les spectateurs face à leurs pensées. On ne sait plus trop sur quel pied danser après ce spectacle bionique.
Au jour et à l’heure d’un match de ballon entre une équipe de France et on ne sait plus trop qui, il restait encore quelques citoyens pour préférer assister au festival Chopin au jardin du Luxemburg plutôt que de déguster des pizzas molles devant leur télévision. Ils purent ainsi écouter le délicat récital de Jean-Marc Luisada installé sous le kiosque à musique.
Trois ans après son dernier passage à Bercy avec les Crazy Horses, revoici Neil Youg avec les Promise of the Real, un groupe de gamins (deux guitaristes [tous deux fils de Willie Nelson], un bassiste, un percussionniste et un batteur) qui pourraient être les petits-enfants du Maître et qui entourent celui-ci dans la deuxième partie du show avec tendresse et efficacité.
Neil est vêtu d’un ample T-shirt siglé « EARTH » (le titre de son dernier disque live, son combat de toujours finalement) sous son inévitable chemise de bucheron canadien et de son inénarrable chapeau feutre noir sur cheveux filasses, rouflaquettes blanches et opulentes. Il apparaît seul en scène, avec guitare et harmonica, pour un set acoustique qui donne la chair de poule à un public qui a connu le rock des années 70. Et c’est un doux retour sur Harvest avec After the Goldrush et Heart of Gold, la voix nasillarde fredonne ces refrains d’une génération dans l’émotion générale : I want to live/ I want to give/ I’ve been a miner for a heart of gold… Quelques chansons sont jouées aux claviers, dont un vieil harmonium sur lequel trône une botte de femme de mauvaise vie. De même que traîne sur la scène tout un fatras de totems indiens et d’amplis entassés les uns sur les autres.
Et lorsque les Promise of the Real débarquent après le passage d’une simili-équipe de désinfection grimée en techniciens malfaisant de Monsanto qui enfument la scène comme s’ils déversaient des pesticides dans nos champs (son dernier disque studio s’appelle The Monsanto Years), le groupe continue sur la lancée de Harvest avec notamment le célébrissime et mélancolique Old Man. Et Neil de raconter comment il a apprécié la vision des campagnes françaises lors des voyages dans le bus de tournée. Après quelques mots en français il précise qu’il eut une girlfriend québécoise tout en levant les bras au ciel l’air de dire : « désolé » ou plutôt : « Mon Dieu, que le temps passe ! ».
Et puis l’électricité se met à parler et l’on retrouve le Neil Young teigneux et pugnace, guitariste de génie, qui allonge à l’infini ses morceaux, accroché à sa guitare. Le son est puissant, les riffs lourds, les trois guitaristes unis s’échangent le front de la scène pour des solos de vieux grognards de la 6 cordes, laissant tout de même avec respect le Maître sous les spots qui lui réussissent si bien. Mais au cœur de l’ouragan électrique on retrouve son souffle alors que Neil se rapproche de son micro pour assumer de sa voix chevrotante ses paroles de révolté.
Et lorsque le groupe se laisse aller à un rock furieux qui envahit Bercy de sons stridents, Neil Young déploie tous ses talents de guitariste grunge sur une Gibson élimée aux sons étranges, bien loin des ballades romantiques qui débutèrent la soirée et animent encore nos plus vieux souvenirs de l’artiste canadien. Trois heures plus tard, c’est sur le refrain repris à l’infini dans un délire de guitares « Keep on Rockin’ in the free World » que se termine un show éblouissant :
…Got a man of the people,/ says keep hope alive/ Got fuel to burn,/ got roads to drive./ / Keep on rockin’ in the free world,/ Keep on rockin’ in the free world/ Keep on rockin’ in the free world,/ Keep on rockin’ in the free world…
Setlist
Solo intro to the set After the Gold Rush (After the Goldrush – 1970)/ Heart of Gold (Harvest – 1972)/ The Needle and the Damage Done (Harvest – 1972)/ Comes a Time (Comes a Time – 1978)/ Mother Earth (Natural Anthem) (Ragged Glory – 1990) with Promise of the Real Out on the Weekend (Harvest – 1972)/ Old Man (Harvest – 1972)/ Human Highway (Comes a Time – 1978)/ La vie en rose (Édith Piaf cover) (Piano and vocals Lukas Nelson)/ Someday (Freedom – 1989)/ Alabama (Harvest – 1972)/ Words (Between the Lines of Age) (Harvest – 1972)/ Winterlong (Decade – 1977)/ If I Could Have Her Tonight (Neil Young – 1969)/ Love to Burn (Ragged Glory – 1990)/ Mansion on the Hill (Ragged Glory – 1990)/ Western Hero (Sleeps with Angels – 1994)/ Vampire Blues (On the Beach – 1974)/ After the Garden (Living with War – 2006)/ Country Home (Ragged Glory – 1990)/ Everybody Knows This Is Nowhere (Everybody Knows This Is Nowhere – 1969)/ I’ve Been Waiting for You (Neil Young – 1969)/ Rockin’ in the Free World (Freedom – 1989) Encore: Like an Inca (Trans – 1982) Warmup : Charles Pasi
La kronic de Julia :
On a sweltering evening, Bercy’s Arena filled up with thousands of people – mostly in their fifties and sixties – ready to welcome one of the last living legends of the 20th century rock music history. Fresh beer does its best to cool throats in the moist air, and so, at 8.20pm it begins. Neil Young appears on stage, alone, as if he has just returned from work in a field. Dressed in faded black, a shapeless t-shirt with the word EARTH that covers his round belly, whilst an old dusty hat hides his face. Sat at the piano in the left corner of the stage, Neil Young strikes up the first notes of After the Goldrush, the iconic song of the Harvest album (1972). Then he switches for an old acoustic guitar and for 20 minutes strings together some of his most famous folk songs. Alone on stage and with no words for his audience, the 70year old Canadian musician and environmental activist doesn’t seem to care about us at all, which doesn’t foretell anything good…
This is without taking into account his band, Promise of the Real, composed of two guitar players – Lukas and Micah Nelson, sons of country legend Willie Nelson –, a bassist, a drummer and a percussionist. With an average age around 25 – they could all be his grandsons – they bring a sudden freshness to the stage. Surrounded by this bunch of young guys in slim jeans and long hair, Neil Young seems boosted by a new energy and grabs a frayed Gibson Les Paul. Three hours of electric rock concert ensues, during which we all fear that he might suddenly fall onto the stage, laid low by a heart attack.
However, nothing like this happens. On the contrary, Neil Young has never looked so young (forgive the unintentional pun). Despite several technical issues – out of tune guitars, broken pedals and so on – the show responds to all our hopes. At some point, one of the Nelson brothers sits at the piano and gives a heart-breaking rendition of La vie en rose. Bercy is in tears and is taken back to that evening of Friday 13 November 2015.
The gig reached its peak when the band played a 20-minutes long rendition of Rockin’ In the Free World, Young’s political and environmental manifesto from 1989:
I see a woman in the night With a baby in her hand Under an old street light Near a garbage can/ Now she puts the kid away,/ and she’s gone to get a hit / She hates her life,/ and what she’s done to it/ There’s one more kid/ that will never go to school/ Never get to fall in love,/ never get to be cool./ Keep on rockin’ in the free world,/ Keep on rockin’ in the free world/ Keep on rockin’ in the free world,/ Keep on rockin’ in the free world./ We got a thousand points of light/ For the homeless man/ We got a kinder, gentler,/ Machine gun hand/ We got department stores/ and toilet paper/ Got Styrofoam boxes/ for the ozone layer/ Got a man of the people,/ says keep hope alive/ Got fuel to burn,/ got roads to drive…
The stage is electrified; Corey McCormick, the bass player is jumping on the spot, reminding me of a young Flea in the best years of the Red Hot Chili Peppers. It all comes to an end after a 15-minutes long encore. The band, like the audience, is exhausted, but they still find enough energy to form a circle and bounce like a group of kids. Neil Young is one of them and proves one more that he is not ready yet to join this Earth that he loves and defends so ardently.
A l’occasion de la sortie mondiale du dernier disque de Radiohead, un magasin turc d’Istanbul organisant des écoutes de A Moon shaped Pool est attaqué par des religieux musulmans mécontents de cette dérive culturelle et musicale pendant le mois de ramadan. Encore un drame de la bêtise crasse… L’intelligence vaincra, d’ailleurs le chroniqueur va de ce pas acheter A Moon shaped Pool en vente depuis hier dans les bacs.
Louise Attaque est de retour ce soir à la Cigale avec un nouveau disque : Anomalie. Ce groupe qui rencontra un succès fantastique dans les années 90’, mêlant avec bonheur rock et poésie (en français), a rencontré un immense succès qui ne s’est pas démenti ce soir, dix ans après leur dernier disque. Des spectateurs déchaînés ont transformé la Cigale en trampoline géant, reprenant tous en chœur la plupart des morceaux du groupe. Les trois membres historiques sont appuyés par un batteur et un claviériste plus récents.
Gaëtan Roussel, l’âme de cette formation, joue de la guitare, chante, gigue et affiche le sourire éclatant de son bonheur de la scène. Depuis A Plus Tard Crocodile (2005), il a vécu sa vie et mené de fructueuses collaborations musicales plutôt réussies, avec Bashung, Vanessa Paradis… notamment, ainsi qu’une carrière solo originale ponctuée de deux CD (Ginger et Orpailleur) et autant de tournées.
Son style reste le même : grande bringue au crâne glabre, voix érayée et sur-vitaminée si caractéristique, décrochant en bout de phrase, comme cassée pour avoir trop crié ; une voix qui sait aussi se faire romantique pour porter certains de ses mots plein de tendresse. Guitariste rythmique de talent, parolier délicat, funambule des mots, Gaëtan a retrouvé des vieux potes de Louise Attaque et leur bonne humeur fait plaisir à voir et à partager. Le groupe déploie tout ce que le rock pensé par des êtres sympas, intelligents et créatifs peut procurer.
Ce nouveau disque est aussi une excellente occasion pour revenir sur ces tubes qui nous ont dynamités il y a 20 ans Léa, Les Nuits Parisiennes, Ton Invitation… joués avec toujours le même enthousiasme débordant et communicatif. Mais le temps passe, tout de même, malgré les apparences, comme vient nous le rappeler le violon virevoltant sur L’Insouciance : …J’improviserai encore, c’est promis/ Qui a dit que c’est long la vie?/ Et l’insouciance qui me fuit / Voila le vide qui me réduit…
Ce groupe en pleine maturité continue à nous chanter la chanson de nos vies, elle est gaie ou elle est triste, mais elle nous accompagne au long de ces années plus ou moins insouciantes.
Vive Louise Attaque !
Setlist : Ton invitation/ Avec le temps/ Anomalie/ Si l’on marchait jusqu’à demain/ Il n’y avait que toi/ L’insouciance/ Léa/ La plume/ Du grand banditisme/ La chute/ Sur un volcan (La Maison Tellier cover)/ Tu dis rien/ Qu’est-ce qui nous tente ?/ Savoir/ Amours/ Les Nuits parisiennes/ J’t’emmène au vent
Encore : Si c’était hier/ Arrache-moi/ Chaque jour reste le nôtre/ Ta douleur
(Camille cover) (avec The Seasons)
Encore 2 : Un peu de patience (Acoustic)
Arno est de retour à Paris avec un nouveau disque Human Incognito, produit comme le dernier par John Parish, compagnon de route de PJ. Harvey. Vieux lion à la crinière blanchie dans les salles de rock et au hasard de ses illusions perdues, belge flamboyant (d’Ostende) parlant le langage du prolo sentimental en anglais, français comme en flamand, Arno nous revient avec sa gouaille et tout son cœur pour un album et un concert de choix.
On retrouve sur scène son talentueux et barbu guitariste habituel qui marque le coté rock du concert avec ses riffs hargneux mais aussi ses arpèges en mode mineur pour accompagner les morceaux nostalgiques dans lesquels Arno dévoile toute sa tendresse. Un bassiste, un batteur et un claviériste complètent l’équipe. Le light-show est tout en clair-obscur avec cinq gros projecteurs d’ambiance, suspendus et tournés vers l’assistance.
Arno, toujours vêtu de noir, comme à son habitude, nous dévoile ses sentiments à travers ses chansons aux textes souvent provocateurs, toujours délicieux. Parfois assis sur sa chaise il sort un harmonica. On le croirait sorti d’un bar à marins du port d’Ostende, dans une ambiance de cargos rouillés, de harengs fumés et de femmes de petite vie. De sa voix rocailleuse il sait nous émouvoir avec ses déclarations d’amour à la vie, à l’humanité, à ses femmes, et à sa mère avec ce bouleversant classique dédié à sa mère : Dans les yeux de ma mère/ Il y a toujours une lumière/ L’amour je trouve ça toujours/ Dans les yeux de ma mère.
Mais il sait aussi réveiller les foules avec ses accents de vieux punk et ses mots de hippie démodé, balançant son pied de micro d’une main à l’autre, hurlant comme si sa vie en dépendait, balançant de grands coups de cymbales. Le premier titre de son dernier disque se nomme : I’m just an old motherfucker… All to soon, smart too late/ Young too short stupid too long/ there time in life, you have to protest/ there time in love, you have to take a rest. Tout un programme !
Rugueux et tendre, le rocker flamand n’a rien perdu de son énergie et de son humour. Chroniqueur du temps qui passe, il jette un regard nostalgique sur une époque révolue et sur une humanité à la dérive. Entouré d’un vrai groupe de rock qui joue avec efficacité Arno représente une espèce d’OVNI dans le monde rock-variété francophone, une valeur sûre et originale.
Superbe exposition à la Philharmonie de Paris sur le Velvet Underground et son époque. Fin des années 60’ – début des 70’, entre guerre du Vietnam, assassinat du président Kennedy et de Martin Luther King, lutte pour les droits civiques… une contre-culture underground se développe dans la ville de New York ravagée par la violence et la crasse. Avec une créativité fantastique Andy Warhol, Alan Ginsberg, Lou Reed et bien d’autres vont laisser libre court à leur inventivité et leurs sentiments qui s’exprimeront par diverses voies, dont celle de la musique pour le Velvet Underground. Il en résulte un mouvement puissant qui marquera à tout jamais l’histoire du rock et de la poésie contemporaine.
L’exposition retrace magnifiquement l’atmosphère de ce temps. Sur des murs tapissés de noir se succèdent des photos, des paperboards à feuilleter, des projections tressautantes de la ville, des vidéos du groupe ou de l’Exploding Plastic Inevitable de Warhol, un salon de musique où des matelas sont disposés sur le sol pour l’écoute d’un live et cette musique inclassable du Velvet, sombre, déchirante et métallique sur laquelle se place la voix chevrotante chantée-parlée de Lou. Des écrans un peu partout permettent de brancher son casque et d’écouter de la musique ou des délires politiques, artistiques et poétiques des acteurs de ce temps. On accède notamment à une vidéo du fameux concert de l’Olympia, fruit d’une éphémère reformation du groupe en 1993 où ses membres apparaissent plein d’énergie et en grande forme.
Lou Reed fut un musicien de légende, disparu en 2013, capable d’écrire Pale Blue Eyes, parmi les plus belles chansons d’amour jamais produites, comme Metal Music Machine, un délire répétitif de 90 minutes de guitares sans foi ni loi ni parole. Il fut l’âme du groupe et poursuivit une brillante carrière solo après la dissolution du Velvet. Aujourd’hui seuls survivent John Cale (qui donna un concert à la Philharmonie dans le cadre de l’exposition) et Moe Tucker, la batteuse « debout ».
The Dandy Warhols à Paris : rien de nouveau sous le soleil du Trianon ce soir pour les cow-boys de l’Oregon, sinon un nouveau disque ‘Distorland’ ! Le quatuor états-unien adepte du rock garage fait maintenant figure d’institution. Ils traînent leurs bottes sur les scènes spécialisées du monde où ils réjouissent les initiés. Ce soir n’a pas dérogé aux bonnes habitudes l’assistance avec un mix bien choisis de leurs nouvelles compositions et des anciennes.
Zia est habillée d’un délicieux chemisier à pois qui masque ses tatouages et, avec ses cheveux longs, lui ferait donner le bon Dieu sans confession, ce qui n’est pas vraiment le genre de la maison… Ses trois acolytes sont à leur habitude chevelus et peu prolixes, déroulant leur musique un peu mystérieuse et si entraînante. Des guitares, des effets, des contre-jours et la voix de Courtney, une inspiration rock psychédélique de cordes et de sueur, il n’en faut pas plus pour enflammer le public parisien.
On se rappelle l’excellent film documentaire Dig (2004, à revoir) narrant les aventures croisées des Warhols et du Brian Jonestown Massacre dans les années 90’. Il y avait à l’époque beaucoup de violence et d’excès de toutes sortes dans ce rock expérimental-psycho, attisés par la concurrence artistique entre Courtey Taylor-Taylor et le toujours leader du Brian Jonestown : Anton Newcombe. Celui-ci continue sur sa lancée quand les Dandy Warhols ont sans doute un peu compromis avec leurs exigences premières, produisant une musique plus abordable et moins déstructurée, pour notre plus grand plaisir.
Setlist : Be-In/ Crack Cocaine Rager/ Get Off (listed as Shakin on setlist)/ Pope Reverend Jim/ STYGGO/ I Love You/ The Last High (Zia played bass)/ Plan A/ Search Party/ Every Day Should Be a Holiday (Courtney acoustic solo)/ The Grow Up Song (Courtney acoustic solo)/ Well They’re Gone/ Good Morning/ Baby, Come Back (The Equals cover)/ You Are Killing Me/ We Used to Be Friends/Solid/ Bohemian Like You/ Godless/ Pete International Airport / Boys Better / Zia Outroset
Warmup : Happyness
Le compositeur-guitariste-chanteur américain Prince est mort ce 21 avril, a priori d’une overdose médicamenteuse. Il avait 57 ans. Multi-instrumentiste de génie, l’un des plus doués de sa génération, il a produit une discographie phénoménale, touché à tous les genres : jazz, pop, rock, funk, RnB…, s’est investi corps et âme dans la musique, y compris dans son aspect business, et a modelé son personnage avec des looks successifs détonants, sans parler de son sex-appeal explosif se manifestant notamment sur scène par un talent de danseur hors pair.
L’orchestre de Paris dirigé par Tomas NETOPIL joue le Stabat Mater écrit par Antonin Dvorak entre 1876 et 1877, accompagné d’un nombre impressionnant de choristes composant le chœur de l’orchestre de Paris renforcé par le chœur de jeunes du même orchestre.
L’œuvre est connue pour avoir été inspirée au compositeur par une succession de deuils, dont trois de ses enfants. Sa couleur est donc sombre, comme son premier mouvement, Stabat Mater Dolorosa, l’illustre si bien :
Stabat mater dolorosa,
Juxta crucem lacrimosa,
Dum pendebat Filius.Cujus animam gementem,
Contristatam et dolentem,
Pertransivit gladius.
O quam tristis et afflicta
Fuit illa benedicta
Mater Unigeniti !
Quae maerebat et dolebat,
Pis Mater, dum videbat
Nati poenas incliti
Debout, la mère de douleur,
Se tenait en larmes près de la croix,
Où pendait son Fils.Son âme était gémissante,
Affligée et toute désolée,
Un glaive la transperça.
Oh ! Combien triste et affligée
Fut cette mère bénie
D’un Fils unique.
Elle gémissait et soupirait,
pieuse Mère,
en voyant les peines de son divin Fils.
L’œuvre est belle et tragique, parfaitement interprétée par ces musiciens professionnels qui la font vivre et la partagent de magnifique façon. Le chœur sait murmurer la douleur d’une mère et faire éclater l’espérance du jugement dernier. Un concert qui serre le cœur.
Mickey [3D] nous revient avec un nouveau disque, Sebolavy, qu’il présente au Trianon à un public parisien toujours fervent. Il s’agit de chanson française, douce et ironique, recyclée au rock de Montbrison, simple et élégant. 20 ans d’existence du groupe Mickey3D puis en solo sous le nom de Mickey [3D], des compositions sorties pour d’autres artistes, 6 ans depuis le dernier disque, bref il était temps de renouer avec ce musicien.
Mickey est toujours habillé de son éternel polo bleu et ne quitte pas sa guitare rythmique. Il est accompagné d’un guitariste, d’une claviériste-accordéoniste et d’une rythmique basse / batterie. L’atmosphère est rock, la voix profonde et posée, les riffs des guitares entraînants. La superposition des guitares électro-acoustique et électrique donne un caractère bluesy à cette musique fine et agréable. Le concert mène son rythme et passe au gré de chansons coupantes et délicieuses. Des mots tendres et parfois désabusés, une chanson intitulée François sous la Pluie marque gentiment ses déceptions politiques du moment et ses inquiétudes sur l’avenir.
La couverture de Sebolavy est composée d’une photo noir-et-blanc de Sophie Scholl à qui il rend hommage par la chanson La Rose Blanche, résistante allemande contre les nazis, exécutée à 21 ans pour trahison. Une chanson triste qui se termine tout de même sur une note peut-être un peu optimiste : Les idiots ne l’emportent jamais/ Et le ciel a tout filmé…
Le show d’un grand enfant (la quarantaine ?), un peu amer sur le temps qui passe et la jeunesse qui l’inquiète. Mais après tout le titre de son dernier album Sebolavy n’est qu’un clin d’œil au langage de cette jeunesse : C’est beau la vie, malgré tout !
C’est l’histoire du disque culte d’un groupe de légende : Television a écrit Marquee Moon en 1977 à l’orée de la période du protopunk américain, qui fut si productive, lorsque les poètes du rock underground new-yorkais se bousculaient au bar du Chelsea Hotel, entre Jimi Hendrix, Bob Dylan et les écrivains de la beat generation. Patti Smith et Lou Reed ont assisté aux premiers concerts de Television au CBGB’s, ils en ont assuré la promotion.
Sortis du bouillonnement culturel américain inouï d’une époque révolue, épris de poésie et de musique, auteurs-compositeurs-chanteurs-guitaristes, Thomas MiIller et Richard Meyer se rebaptisent Verlaine pour l’un, en hommage au poète Paul, et Hell pour le second, en référence à la Saison en enfer de Rimbaud, et ils créent ensemble Television en 1973 qui ne survivra que le temps de deux disques, mais aura une influence considérable sur les décennies rock qui suivirent. Chacun a continué ensuite une carrière solo avec plus ou moins de succès mais ils restent pour toujours au Panthéon des musiciens du XXème siècle.
Marquee Moon fut une étrange création venue de nulle part sinon des cerveaux suroxygénés de leurs auteurs. L’œuvre s’imbrique avec celle de Patti Smith, Horses, sorti l’année précédente. C’est d’ailleurs Mapplethorpe (compagnon de Patti) qui pris la photo de couverture des deux albums. On retrouvera ces deux-là tout au long d’un parcours poétique et musical. Efflanqués et fiévreux, « les poings dans leurs poches crevées », ils ont créé la musique de l’avenir.
Television a innové avec u jeu de deux guitares entremêlées déroulant des arpèges complexes avec une rythmique basique sur laquelle se pose la voix tendue et aigue de Verlaine. Pas d’électronique, aucun traitement, juste le naturel de l’électricité et la tension du chant. Les textes sont poignants et toujours récités/déclamés avec la voix plaintive si caractéristique de Verlaine :
Do I, Do I?/ belong to the night?/ Only only/ Only tonight./ All the ladies/ Stay inside./ Time may freeze./ A world could cry./ All this night running loud/ I hear the whispers I hear the shouts./ And tho they never cry for help… [Guiding light].
Alors ce soir, dans le cadre de l’exposition « The Velvet Underground – NewYork extraganza », Television vient rejouer Marquee Moon, intégralement, dans la petite salle de la Philharmonie de Paris devant un parterre de quinqua/sexa nostalgiques d’une époque et toujours admiratifs du foisonnement d’idées, de musiques, de rythmes, de poésies, bref de l’inspiration infinie qui a caractérisé les musiciens new-yorkais des 70’s. Il y a peu de survivants, le temps est passé, la drogue et sa destruction aussi.
Patti Smith rejouait Horses à l’Olympia l’an passé pour les 40 ans de ce disque clé. Television est là ce soir, il précède John Cale, dernier fondateur du Velvet Underground, qui sera demain sur la grande scène pour un hommage à son compère Lou Reed et à tout ce que ces pionniers ont su déclencher.
Ce concert est plaisant, cette musique est toujours passionnante, à peine datée, souvent copiée, mais nous sommes 40 ans après sa création, alors à défaut de surprise, elle provoque encore de l’émotion. Au terme de ces années underground volcaniques et mortifères, après les décès récents de Lou Reed et David Bowie, Patti Smith et Tom Verlaine sont en train de refermer doucement la page d’une époque musicale révolutionnaire.
Setlist : Intro/ See No Evil/ Elevation/ Prove It/ Torn Curtain/ Venus/ Friction/ Guiding Light/ Marquee Moon Encore: Sapphire
Keith Emerson, claviériste flamboyant du groupe Emerson-Lake-and-Palmer (ELP) s’est suicidé à 71 ans aux Etats-Unis. Le groupe ELP réunissait trois géants, dont Grek Lake, la voix de la première formation King Crimson. Plus ébouriffant que vraiment inspiré il a quand même marqué le prog-rock.
Acteur de premier plan du rock progressiste des années 80-90, de formation classique Emerson fut avec Rick Wakeman (Yes) un claviériste de génie et un show-man un peu excessif comme cette époque en produit quelques-uns.
Massive Attack publie un disque 4 titres : Ritual Spirit, dans un minimalisme d’une beauté froide, et consacre deux dates à Paris pour terminer sa tournée européenne. De nouveau ils viennent diffuser leur trip-hop aux relents si sombres à l’image de la confusion de notre monde. C’est le retour du son de Bristol avec ses hérauts du chaos sur fond de basses massives, d’électronique troublante et de voix susurrant une poésie de l’absurde. La puissance de ce groupe reste dévastatrice et fascinante. Elle est mise au service de l’engagement politique de ses membres et d’une vision musicale qui glace le sang.
En formation classique : double batteries, un bassiste (Winston Blissett), un guitariste (Angelo Brushini), 3D et Daddy G aux voix et claviers-machines, ainsi que Martina Topley Bird, Horace Andy et Shara Nelson en intermittents chanteurs de luxe pour des prestations époustouflantes.
Suivant le rituel désormais récurrent les messages-slogans défilent sur les immenses écrans électroniques du fond de scène tels les horaires d’avions dans un hall d’aéroport. Et les mots diffusés jusqu’à l’écœurement parlent de la barbarie en Syrie, de la désespérance des gigantesques mouvements de population qui enflamment le Moyen-Orient et autres contrées. Sur l’un des longs et lugubres instrumentaux du show, un dialogue entre un pilote de drone en train d’ajuster une cible humaine, et sa base, s’affiche sur les écrans alors que les guitares se déchaînent pour accompagner l’embrasement final. Les mots sont simples et soulignés par les images terribles de tous les conflits qui tuent sur cette planète dans le désert d’indifférence et d’égoïsme où vit le reste du monde plus préoccupé par les cours de la bourse que par la guerre.
Trois des quatre nouveaux morceaux sont joués avec la participation d’Azekel sur Ritual Spirit, un londonien dont la voix haut perchée réverbère et résonne à l’infini sous les arches métalliques du Zénith. Take It There déploie ses arpèges mineurs et son brouillard de mots. Sur le disque Tricky a repris du service mais c’est Daddy G qui entonne ce soir son refrain crépusculaire : She’s with me, we share the pain/ Treat the girl like licorice/ She’s so soft and ticklish/ Take you there, and take your time/ Take your time/ Take you there, you’ll lose you mind/ Take you there, and take your time…
Voodoo in My Blood a donné lieu à la sortie d’une formidable vidéo dans laquelle l’actrice britannique Rosamund Pike joue une danse ensorcelante avec un OVNI qui a pris possession d’elle qui n’est pas sans rappeler l’incroyable performance d’Isabelle Adjani en pleine crise d’hystérie dans un couloir de métro dans… « Possession ». Sur scène les Young Fathers qui assuraient la première partie viennent épauler leurs maîtres, y compris dans leur message politique.
Le reste de la set-list (identique pour les deux concerts) est plus classique avec quelques envolées éblouissantes sur Angel, Inertia Creeps et Future Proof, notamment, qui restent les marqueurs du groupe. Hélas celles-ci furent interrompues par les problèmes techniques le premier soir poussant le groupe à quitter la scène sur Future Proof, 3D plutôt énervé. En réalité les spectateurs n’ont pas vraiment identifié de changement dans les conditions soniques du show mais les musiciens ont sans doute l’oreille plus fine. Durant quinze minutes des ingénieurs trifouillent les câbles et les machines avant que le show ne reprenne. Le lendemain nous fûmes réconciliés avec des Massive Attack de meilleure humeur qui produisirent un show d’un excellent cru.
Martina Topley Bird a envouté le Zénith avec sa grâce intergalactique, ses tenues de guerrière du désert, son maquillage de squaw apache et surtout cette voix profonde et douce qui donne instantanément la chair de poule. Sur Paradise Circus, seule sur une ritournelle de clavier et la rythmique elle danse entre les couplets d’une manière mystérieuse et enfantine, rien que le cheminement de ses mains et ses doigts dans l’espace est un concentré d’élégance pendant que s’égrènent la mélopée lancinante sur laquelle elle pose sa voix : Love is like a sin, my love,/ For the one that feels it the most/ Look at her with a smile like a flame/ She will love you like a fly will never love you again.
Encore à l’affut de collaborations productives, cette année les Young Fathers et Azekel ont apporté un peu de jeunesse aux bases du groupe sans en dévier l’inspiration pour le son urbain et troublant qui remporte toujours le même succès en France.
Set list 27/02 : United Snakes/ Clock Forward/ Risingson/ Paradise Circus/ Ritual Spirit/ Girl I Love You/ Psyche (Flash Treatment)/ Future Proof/ Jupiter (with lyrics from Martina Topley Bird’s Poison)/ Teardrop/ Angel/ Inertia Creeps/ Safe From Harm/ Take It There/ Voodoo in My Blood/ He Needs Me/
Encore : Unfinished Sympathy/ Splitting the Atom
Warm up: Young Fathers
Set list 26/02 : United Snakes/ Clock Forward/ Risingson/ Paradise Circus/ Ritual Spirit/ Girl I Love You/ Psyche (Flash Treatment)/ Future Proof (band leaves stage due to technical issues)/ Jupiter (with lyrics from Martina Topley Bird’s Poison)/ Teardrop/ Angel/ Inertia Creeps (aborted, restarted then… more )/ Safe From Harm/ Take It There/ Voodoo in My Blood/ He Needs Me/
Encore : Unfinished Sympathy/ Splitting the Atom
Warm up: Young Fathers
Heather Nova passe à l’Alahmbra avec un groupe ramassé et plutôt acoustique, un garçon multi instrumentiste contrebasse/violoncelle/guitare/clavier et une batterie jazzy. Toujours simple et belle, des fleurs tropicales enroulées autour de son pied de micro elle chante et joue de la guitare avec grâce, une voix à la Joan Baez, très pure et un peu brumeuse, un folk poppy teinté de mélancolie. Cela fait un peu chapelle, un peu boyscout et fleure bon une ambiance hippie qui aurait pris un coup au moral. Heather a beau être née sous le soleil des Bahamas elle décline des balades plutôt tristounes que son vibrato rend parfois tragiques.
Qu’importe, tout ceci est beau et doux, cette voix nous porte comme une brise d’automne, légère mais déjà un peu fraiche : Hey don’t cry, the night is almost through/ And I’ll be here to hold and comfort you/ Sometimes you’ll look out on dark and stormy skies/ But darling remember the sun will always rise/ And bring the light, and bring the light (The Sun will always rise – 2005).
Setlist : 1. Treehouse/ 2. I Wanna Be Your Light/ 3. Girl On The Mountain/ 4. Island/ 5. Sea Glass/ 6. Paper Cup/ 7. The Archaeologist/ 8. Winter Blue/ 9. Walking Higher/ 10. Moon River Days/ 11. London Rain/ 12. Lie Down In The Bed You’ve Made/ 13. Fool For You/ 14. Sea Change/ 15. I’m Air/ 16. Like Lovers Do/ 17. This Humanness/ 18. The Sun Will Always Rise/ 19. Sugar
Warmup : Mishka
Sorti : 2004, Chez : Da Capo Press (version anglaise).
L’histoire mondaine de l’enregistrement de « Exile on Main St. » le disque légende des Rolling Stones qui fut enregistré dans une villa du sud de la France en 1971, plus exactement au sous-sol de la luxueuse villa Nellcote louée par Keith Richards et Anita Pallenberg.
Le livre raconte l’atmosphère de la villa où se côtoyaient musiciens mythiques et dealers corses, où allaient et venaient les cinq Rolling Stones, leurs enfants et un entourage pas toujours très recommandable. De ce marigot fécond est sorti un disque remarquable, dans la souffrance et dans l’ivresse. C’est l’histoire d’une époque fertile et dangereuse dont les Stones ont réussi l’exploit de sortir à peu près indemnes et surtout sont restés créatifs depuis des décennies grâce à ce duo de choc Mick Jagger et Keith Richards.
Le journaliste-auteur insiste bien sûr sur l’héroïne qui semblait couler à flot à Nellcote et est sans doute pour quelque chose dans la création de ce disque. Il tient la chronique des jours qui passaient et des phantasmes qui sont restés sur l’extraordinaire aventure de ce disque. On y parle pas beaucoup de musique mais plutôt de comportements, c’est intéressant aussi.
Tame Impala est au Zénith ce soir pour y dérouler sa musique psychédélique, un genre que l’on croyait un peu périmé amis que le groupe australien remet à l’ordre du jour avec brio. Originaire de Perth, sur la côte ouest sur l’océan indien, apparu en 2008, le groupe est celui d’un homme : Kevin Parker, sorcier de l’électronique et du home-studio, auteur-compositeur, guitariste et chanteur. Jeune, grand et mince, les cheveux longs sur les épaules, grand foulard autour du cou il joue pieds nus sur la scène du Zénith pendant que des images de synthèse sont projetées sur le fond. On croirait les fonds d’écran de Windows 95.
Le reste du groupe porte à peu près le même âge et d’identiques vêtements. Ils ressemblent à une bande d’étudiants poètes mais lorsque parle la musique c’est une toute autre histoire ! Ils sont de vrais pros et jouent un son très sophistiqué, traité à l’électronique à un niveau assez élevé. Les guitares se mêlent aux boucles de claviers pour enrober la voix haut placée de Kevin, qui paraît presque surnaturelle. Le son est fort et le rythme enlevé, le concert coule dans nos veines comme un fleuve de modernité. Cela ressemble à une sorte de mélange entre Pink Floyd et Supertramp, revu et corrigé à l’aune de l’électronique de notre siècle numérique.
Une fois passé le vent vigoureux de cette musique, il n’en reste plus grand-chose dans nos esprits, seulement le souvenir d’un show exécuté à la perfection et de cette voix planant très haut dans les octaves sur des boucles obsessionnelles en un résultat étrange et coloré.
Setlist : Intro/ Let It Happen/ Mind Mischief/ Why Won’t They Talk to Me?/ It Is Not Meant to Be/ The Moment/ Elephant/ Yes I’m Changing/ The Less I Know the Better/ Eventually/ Why Won’t You Make Up Your Mind?/ Oscilly/ ‘Cause I’m a Man/ Apocalypse Dreams
Encore : Feels Like We Only Go Backwards/ New Person, Same Old Mistakes
Paul Kantner est mort cette semaine. Il fut l’un des cofondateurs du groupe légendaire Jefferson Airplane qui déclina un rock psychédélique durant le summer of love, des scènes de Woodstock à celles Monterey. Compagnon de Grace Slick, chanteuse du groupe où jouaient également Martin Balin, ainsi que Jack Cassady à la basse et Jorma Kaukonen à la guitare qui fondèrent ensuite tous deux un fameux groupe de blues : Hot Tuna. Ils furent le rock de San Francisco à cette époque lointaine de la deuxième moitié de la décennie 60’. RIP Paul !
The Maccabees, une bande de rockers-beaux-gosses-créatifs britanniques, à faire tomber raide-dingue toute jeune fille passant dans un rayon de 100 mètres autour de l’un d’eux ! Mais ils sont bien plu que ça : un groupe de trois guitaristes, un bassiste, un batteur, assistés pour les tournées d’une claviériste-sampleuse, tous plein de fraîcheur et d’originalité. Le résultat est détonnant, jeune et électrique. C’est du rock indépendant enflammé et positif comme seul le Royaume-Uni sait en générer année après année. Alors on se régale à suivre les jeux de guitares nerveuses et saccadées de ces jeunes gens pressés qui accompagnent la voix chaude du chanteur, lui-même guitariste.
Ca pulse généreusement et sans complexe, ça riff à tout va, ça saute sur scène comme des gamins joyeux. Déjà bien connu outre-Manche les Maccabees ne font pas salle comble ce soir, c’est dommage, un problème de promotion bien plus que de talent. On aimerait découvrir de pareils groupes plus souvent, énergie punk et sourires ravageurs. Du rock excellent et sophistiqué, tout simplement !