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  • Le Mali, le Burkina-Faso et le Niger se retirent de la CEDEAO

    Le Mali, le Burkina-Faso et le Niger se retirent de la CEDEAO

    Dans un communiqué commun, les trois pays du Sahel dirigés par des juntes militaires ont annoncé, sur la télévision nigérienne, leur décision de quitter la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Ils accusent cette organisation multilatérale d’avoir mis en place des « sanctions illégitimes, illégales, inhumaines et irresponsables » contre leurs trois pays à la suite des coups d’Etat militaires qui s’y sont déroulés ces derniers mois pour faire face à des « hordes de terroristes instrumentalisées et téléguidées… »

    La CEDEAO sous l’influence des puissances étrangères s’est éloignée de ses principes fondateurs est devenue une menace pour ses Etats-membres et ses populations dont elle est censée assurer le bonheur…
    [les trois présidents] prenant toutes leurs responsabilités devant l’histoire et répondant aux attentes, préoccupations et inspirations de leurs populations décident en toute souveraineté le retrait sans délai… de la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest…

    https://twitter.com/AESinfos/status/1751594957754728816

    Après le coup d’Etat au Niger, la CDEAO s’était distinguée en demandant à ses chefs galonnés loyalistes d’étudier les voies et moyens pour rétablir le président nigérien démocratiquement élu, au besoin par la force. Bien entendu cette menace n’avait jamais été mise en œuvre et l’institution multilatérale s’était juste décrédibilisée sur le plan de ses convictions mais heureusement pas sur le terrain de combat.

    Il semble que statutairement le retrait ne soit effectif qu’un an après réception d’une lettre par le siège de la CEDEAO mais, qu’importe, les trois pays sahéliens ont pris le parti de s’isoler de l’Occident et de l’embryon de communauté économique auquel ils appartenaient.L’accusation de « téléguidage » du terrorisme vise clairement la France avec qui les relations sont d’ores et déjà rompues ou très sérieusement dégradées. Il est maintenant souhaitable que ces trois pays sortent de la zone monétaire du « Franc CFA » puisque son démantèlement déjà décidé il y a plusieurs années tarde à être mis en œuvre.

    C’est ainsi, le divorce est prononcé, chacun repart avec ses acquis pour un avenir séparé. Les trois Etats ont même créé une Alliance des Etats du Sahel (AES) avec un compte X (anciennement Twitter, https://twitter.com/AESinfos) qui permettra de suivre les nouvelles aventures de ces pays qui, peut-être, seront rejoint par d’autres.

    Lire aussi : Mais de quoi se mêle-t-on ? – Total Blam Blam (rehve.fr)
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  • Annecy

    Annecy

    Le plateau des Glières

    Plateau des Glières, 1 400 mètres d’altitude, de grands pans de neige subsistent sur le plateau au pied des monts escarpés et bien plus enneigés. Les pistes de skis de fond croisent celles des marcheurs sur lequel se presse tout un petit monde en anoraks aux couleurs chamarrées qui se retrouve dans les anciennes fermes d’alpage transformées depuis en bars-restaurants servant fromage et charcuterie si fameux en Haute-Savoie.

    Le paysage est majestueux et l’atmosphère est douce. On en oublierait presque que ce plateau fut un haut lieu de la résistance durant la seconde guerre mondiale en 1943-1944. Difficile d’accès par les chemins, site idéal pour parachuter des armes, celles-ci étaient réceptionnées par les réseaux de résistance de la région jusqu’à ce que les Allemands se lassent et attaquent les Glières en mars 1944 avec des forces significatives faisant plus de 120 morts dans les rangs des maquisards.

    Un monument à leur mémoire est construit en 1973 par le sculpteur Emile Gilioli, inauguré par André Malraux, symbolisant le V de la victoire. Installés à la terrasse de « Chez Constance » dont la grand-mère nourrissait les résistants, souvenons-nous de ce moment d’histoire !

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  • « Danse Sinfonia Eroïca » sur la scène Bonlieu (Annecy)

    « Danse Sinfonia Eroïca » sur la scène Bonlieu (Annecy)

    Neuf danseurs, cinq femmes et quatre hommes (et un chien) se produisent au théâtre Bonlieu d’Annecy, sous la direction de la chorégraphe belge Michèle Anne de Mey. Une improbable tyrolienne est tendue au milieu de la scène dépouillée. Le fond musical est majoritairement composé de la symphonie Héroïque de Beethoven, parfois en alternance avec d’autres œuvres dont l’inattendu Foxy Lady interprété par Jimi Hendrix à grand renfort de feedback sur sa légendaire guitare.

    Les jeunes danseuses sont belles, leurs collègues masculins sont élégamment musclés, quatre couples se font et se défont mais, toujours, une femme reste seule. Le ballet est alternativement classique et moderne, les entrechats succèdent aux roulades hip-hop sur le sol et aux descentes en tyrolienne. A la fin de la soirée le sol est inondé à grands renfort de sceaux d’eau qui y sont projetés. Les danseurs sont torses nus, roulant des abdominaux, les danseuses sont habillées plus légèrement, tout ce petit monde se lance dans de grandes glissades arrosées, la soirée tourne au concours de T-shirts mouillés, ce qui n’est pas le moment le plus désagréable du show…

    Toute cette jeunesse est enthousiaste et souriante, professionnelle et entraînée. Même le chien courant après des balles de tennis est dans le rythme. L’idée subliminale de ce spectacle porte sans doute sur la question du couple, qui varie, se compose et se décompose au gré du temps avec toujours quelqu’un abandonné sur le bas-côté. Après cette prestation virevoltante les sexagénaires (et plus…), majoritaires dans les rangs, sortent de Bonlieu de bonne humeur.

  • ROLIN Dominique, ‘Moi qui ne suit qu’amour’.

    ROLIN Dominique, ‘Moi qui ne suit qu’amour’.

    Sortie : 1948, Chez : Editions Denoël.

    Dominique Rolin (1913-2012) est une écrivaine belge qui a beaucoup vécu en France où elle rencontra nombre des hommes de sa vie. C’est son aventure avec l’un d’entre eux qui aurait inspiré le roman « Moi qui ne suit qu’amour ».

    Publié en 1948 ce roman d’amour se déroule dans une petite ville de province qui paresse autour d’un fleuve et où vit Colombe avec son mari et ses deux enfants. Une vie bien rangée et sans trop d’originalité jusqu’à ce que Colombe rencontre un sculpteur installé non loin de sa maison familiale. Elle rentre alors dans une folle histoire d’amour qui se termine par la chute finale et la trahison de son amoureux. Pendant cette embardée sentimentale elle affronte la rébellion et la fuite de son fils aîné, la passivité de son mari qu’elle aurait voulu voir se révolter et, bien sûr, l’injustice qu’elle subit à sa naissance quand sa mère est morte en couches.

    Le roman date de 1948, son style est un peu suranné mais la tragédie amoureuse est éternelle. Elle est narrée avec finesse par la romancière qui use même de termes un peu crus pour l’époque lorsqu’elle aborde les phases charnelles de cet amour fou. Elle analyse avec la même lucidité le reflux de l’amour, la panique de celui qui est abandonné, la lâcheté de celui qui abandonne. C’est une très vieille histoire.

    Dominique Rolin est l’auteure de nombreux romans qui ont été régulièrement primés en France. Elle a entretenu une relation au moins littéraire avec Philipe Sollers et leur correspondance a été publiée après sa mort.

    Une lectrice attentive nous signale que cette relation n’a pas été que littéraire.

    Lire aussi : La France médaille d’or de la dépense publique – Total Blam Blam (rehve.fr)
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  • Ruralité bla-bla-bla…

    Ruralité bla-bla-bla…

    On ne dit plus « paysannerie » ou la « campagne », mais on emploie le terme « ruralité ». C’est mieux, plus moderne, plus « inclusif » et englobant, moins dénoté « plouc de campagne ». Le dictionnaire de l’académie française en donne la définition suivante :

    Didact. Caractère de ce qui est rural, de ce qui se rapporte à la campagne, par opposition à Urbanité, ou de ce qui se rapporte au monde agricole. La ruralité d’une région.

    https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9R3224

    quand la paysannerie est défini dans le même dictionnaire comme :

    L’ensemble des paysans d’une région, d’un pays ; le groupe social constitué par les paysans. (En termes économiques ou politiques, on dit plutôt Paysannat.) La paysannerie française sous l’Ancien Régime était composée de manouvriers ou journaliers, de métayers et de laboureurs. Petite, moyenne paysannerie. Une histoire de la paysannerie.

    https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9P1105

    Paysannerie ça fait « ancien régime », il faut donc changer de mot !

  • Donald Trump de nouveau en course pour la Maison Blanche

    Donald Trump de nouveau en course pour la Maison Blanche

    Les élections primaires du parti républicain aux Etats-Unis d’Amérique ont démarré et se sont déjà soldées par un triomphe de Donald Trump dans l’état de l’Iowa où il a écrasé ses concurrents en remportant 51% des suffrages. On apprend d’ailleurs ce matin que l’un d’entre eux, Ron DeSantis, vient de jeter l’éponge et de se rallier à l’ex-président. L’Amérique reste très divisée mais côté Républicains les pro-Trump semblent à la manœuvre. En dépit des menaces de procès qui s’amoncellent contre leur mentor, malgré l’insurrection contre le capitole du 06/01/2021 qu’il a largement provoquée par ses déclarations vengeresses en refusant de reconnaître la victoire dans les urnes de Joe Biden, malgré ses théories de Café du commerce il semble avoir de bonnes chances d’être réélu président des Etats-Unis en novembre prochain, et avec lui son cortège de simplismes assénés par lui-même et un entourage à sa mesure.

    Trump (77 ans) présente plutôt un bilan économique flatteur pour sa première présidence (2017-2021), au moins sur le court terme. Ses jugements à l’emporte-pièces sur l’immigration, la Corée du nord, l’Europe, ses adversaires démocrates et quasiment tous les sujets relevant de la présidence, lui ont assuré un solide soutien dans l’électorat populaire au point qu’une bande de furieux a pris d’assaut le capitole en 2021 pour tenter d’empêcher la certification de l’élection de son successeur Joe Biden. L’opération a échoué mais a tout de même fait cinq morts dont un policier. Il s’en est fallu de peu que les émeutiers empêchent la validation de l’élection du nouveau président. Les images de l’évacuation des sénateurs et des représentants par les sous-sols du bâtiment ainsi que celles des furieux saccageant et pillant des bureaux des élus qu’ils haïssent sont hallucinantes. Les insurgés voulaient « pendre Mike Pence » le vice-président chargé de la validation de l’élection et qui avait écrit qu’il n’avait pas les moyens constitutionnels de s’y opposer, se désolidarisant ainsi de son président. On n’ose imaginer ce qui se serait effectivement passé s’il était tombé aux mains de la foule hystérique ? Nombre des militants insurgés impliqués dans les violences ont depuis été lourdement condamnés par la justice américaine. Il n’est pas exclu que si leur héros revenait au pouvoir leurs peines puissent être adoucies, voire annulées.

    Le camp républicain est toujours animé des mêmes convictions et, en son sein, les anti-Trump sont très minoritaires. Il semble donc probable que s’il est investi par son parti l’ex-président affronte à Joe Biden (81 ans) avec de sérieuses chances d’être réélu. C’est ainsi, le parti démocrate n’a pas su identifier un candidat plus jeune et charismatique susceptible de faire face au populisme trumpiste et d’emporter le ralliement des électeurs démocrates. Le cas des Etats-Unis n’est pas unique en Occident. Non loin de Washington on vient de voir un nouveau président libertaire élu en Argentine affichant une tronçonneuse comme symbole de sa politique économique consistant à « réduire » le rôle et les dépenses de l’Etat. En France, les politiques en quête de voix aux élections se font interviewer par Cyril Hanouna. Au Royaume-Uni, les électeurs croyant aux billevesées des brexiteurs ont voté et obtenu la sortie de leur pays de l’Union européenne. Et l’histoire n’est sans doute pas finie. Nous l’écrivions déjà dans ces colonnes il y a quatre ans c’est : Le crépuscule des bobos, l’envol des ploucs !

    Donald Trump n’a pas dit son dernier mot :

    Riss / Charlie Hebdo (13/01/2021)
  • L’académie française travaille

    L’académie française travaille

    L’académie française a été créée en 1635. L’article XXIV de ses « Statuts et Règlements » n’a pas changé, il stipule que :

    « La principale fonction de l’Académie sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possibles à donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences »

    C’est ainsi que l’académie a décidé que l’on disait « la » Covid et non « le » Covid. Cette décision du 07/05/2020 est documentée et justifiée mais quasiment personne ne suit cette directive, disons plutôt cette « recommandation ». On notera l’utilisation du conditionnel dans la dernière phrase : « …l’emploi du féminin serait préférable… »

    Covid est l’acronyme de corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation. On dit ainsi la S.N.C.F. (Société nationale des chemins de fer français) parce que le noyau de ce groupe, société, est un nom féminin, mais le C.I.O. (Comité international olympique), parce que le noyau, comité, est un nom masculin. Quand ce syntagme est composé de mots étrangers, le même principe s’applique. On distingue ainsi le FBI, Federal Bureau of Investigation, « Bureau fédéral d’enquête », de la CIA, Central Intelligence Agency, « Agence centrale de renseignement », puisque dans un cas on traduit le mot noyau par un nom masculin, bureau, et dans l’autre, par un nom féminin, agence. Corona virus disease – notons que l’on aurait pu préférer au nom anglais disease le nom latin morbus, de même sens et plus universel – signifie « maladie provoquée par le corona virus (“virus en forme de couronne”) ». On devrait donc dire la covid 19, puisque le noyau est un équivalent du nom français féminin maladie. Pourquoi alors l’emploi si fréquent du masculin le covid 19 ? Parce que, avant que cet acronyme ne se répande, on a surtout parlé du corona virus, groupe qui doit son genre, en raison des principes exposés plus haut, au nom masculin virus. Ensuite, par métonymie, on a donné à la maladie le genre de l’agent pathogène qui la provoque. Il n’en reste pas moins que l’emploi du féminin serait préférable et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour redonner à cet acronyme le genre qui devrait être le sien.

    https://www.academie-francaise.fr/le-covid-19-ou-la-covid-19

    Dans le même ordre d’idée, cette noble institution a émis une déclaration à l’unanimité de ses membres le 26/10/2027 concernant l’écriture inclusive :

    Prenant acte de la diffusion d’une « écriture inclusive » qui prétend s’imposer comme norme, l’Académie française élève à l’unanimité une solennelle mise en garde. La multiplication des marques orthographiques et syntaxiques qu’elle induit aboutit à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité. On voit mal quel est l’objectif poursuivi et comment il pourrait surmonter les obstacles pratiques d’écriture, de lecture – visuelle ou à voix haute – et de prononciation. Cela alourdirait la tâche des pédagogues. Cela compliquerait plus encore celle des lecteurs.

    Pus que toute autre institution, l’Académie française est sensible aux évolutions et aux innovations de la langue, puisqu’elle a pour mission de les codifier. En cette occasion, c’est moins en gardienne de la norme qu’en garante de l’avenir qu’elle lance un cri d’alarme : devant cette aberration « inclusive », la langue française se trouve désormais en péril mortel, ce dont notre nation est dès aujourd’hui comptable devant les générations futures.

    Il est déjà difficile d’acquérir une langue, qu’en sera-t-il si l’usage y ajoute des formes secondes et altérées ? Comment les générations à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre patrimoine écrit ? Quant aux promesses de la francophonie, elles seront anéanties si la langue française s’empêche elle-même par ce redoublement de complexité, au bénéfice d’autres langues qui en tireront profit pour prévaloir sur la planète.

    https://www.academie-francaise.fr/actualites/declaration-de-lacademie-francaise-sur-lecriture-dite-inclusive

    Il est de bon ton au Café de Flore de taxer l’académie française d’être un repaire de gens âgés qui somnolent gentiment dans une enceinte bien chauffée au bord de la Seine. Ces deux recommandations picorées au hasard du site web de l’académie semblent frappées au coin du bon sens, même si écrites par des académiciens « âgés ». La lecture de la rubrique « Dire, Ne pas dire » est un délice de l’esprit et un plaisir des sens tant la réflexion sur l’usage de la langue française est une espèce de conquête de l’inutile qui laisse rêveur.

  • TABARLY Eric, ‘Mémoires du large’.

    TABARLY Eric, ‘Mémoires du large’.

    Sortie :1997, Chez : Editions de Fallois.

    Éric Tabarly (1931-1998), grand navigateur des années 1960-1980, donne ici quelques éléments biographiques de sa vie sur toutes les mers du globe, surtout, et, parfois aussi sur la terre ferme. On se souvient du côté taiseux de sa personne quand il paraissait sur les médias à la suite de ses brillantes victoires, on ne s’étonne donc pas que ces « Mémoires » ne soient pas particulièrement intimistes.

    C’est l’histoire d’une passion, celle d’un homme pour le grand large et un bateau, le Pen Duick, construit en 1898, le seul qui ne porte pas de numéro. C’est pour remettre celui-ci à flot qu’il rentre dans la marine militaire. Une fois diplômé de l’aéronavale il fit un séjour en Indochine où il pilotait des avions de transport. Il restera officier toute sa carrière mais le ministère des armées le détache auprès du ministère des sports pour qu’il puisse défendre les couleurs de la France dans les compétitions maritimes internationales. En réalité c’est un statut préférentiel car il concourt en son nom et non en celui du pays, mais qu’importe la Royale sera souvent présente pour lui donner un coup de pouce pour certaines de ses courses.

    Tabarly a couru à une époque où les marins calculaient leur route avec un sextant et n’utilisait pas de radio pour communiquer avec la terre… Et à ce jeu il était très fort, remportant nombre de courses grâce aux astucieuses innovations techniques dont il a équipé ses différents bateaux qui tous s’appelaient Pen Duick X (pen-duick veut dire « petite tête noire » et désigne la mésange noire en breton). Assez rapidement il s’est associé avec un fidèle équipier qui s’est occupé de la recherche de financement et de l’intendance pendant qu’Éric courrait sur les océans contre les éléments. Pour les courses en équipage, il a embarqué et formé des équipiers qui ont ensuite pris sa succession sur les sentiers de la gloire.

    Son cœur était tout entier offert à la mer et à la navigation hauturière, c’était celui d’un marin sans attache terrestre. Il aborde en quelques lignes l’arrivée de Jaqueline, martiniquaise, et Marie leur fille. Incroyable coup du sort, quelques mois après la publication de cet ouvrage, Tabarly trouve la mort dans la Manche lors d’une manœuvre dirigée à bord de son Pen Duick favori qui se rendait en Angleterre. Renversé par un coup de la baume, son corps sera retrouvé des semaines plus tard. Le héros avait aussi ses faiblesses, notamment celle de ne jamais porter de harnais de sécurité.

    Lire aussi : Moitessier Bernard, ‘La longue route’.

  • En passant

    En passant

  • SIMON Claude, ‘Le cheval’.

    SIMON Claude, ‘Le cheval’.

    Sortie : 2015 (1958), Chez : Les éditions du Chemin de fer.

    Publié pour la première fois en 1958, ce roman de Claude Simon (1913-2005) parle du traumatisme des hommes de son temps qui ont vécu l’effondrement moral de l’Europe qui voit le fascisme y prendre le pouvoir dans les années 1930 et mener le continent à sa destruction au terme de la seconde guerre mondiale. Il a, de plus, perdu son père tué au cours de la guerre de 1914-1918. L’écrivain a fait son service militaire en 1934/1935, a voyagé ensuite, notamment en Espagne pour écrire sur la lutte à mort des Républicains contre le régime franquiste. Mobilisé en 1940, il est fait prisonnier par les Allemands en juin de la même année, s’évade, termine la guerre à Paris avant de mener son brillant destin d’écrivain qui le mènera jusqu’au prix Nobel de littérature en 1985.

    Ce court roman se déroule dans une unité de cavalerie (à cheval et non pas avec des chars), le narrateur, sans doute proche de Claude Simon lui-même, raconte les convois interminables de ces longues files de chevaux et de leurs cavaliers sur des routes improbables, souvent de nuit et sous une pluie glacée. Les dialogues entre les soldats sont courts, parfois légers dans cette atmosphère guerrière. Mais il n’y a pas de combats, seulement la possibilité de la mort qui rode. On ne sait pas où vont ces cavaliers. Ils ne le savent pas eux-mêmes, suivant le convoi qui, parfois, s’arrête de longs moments, comme lors d’un bouchon sur la route, avant de redémarrer lentement, sans doute vers Dunkerque et, pour les plus chanceux, une évacuation vers le Royaume Uni, ou vers de nouveaux combats dont ils sortiront morts, blessés ou prisonniers.

    Il y a des escales dans ce long cheminement vers l’inconnu. Parfois la troupe s’arrête dans un hameau où elle trouve un abri précaire dans des granges pour les hommes et les chevaux. Elle s’y mêle aussi à la vie des habitants qui continue. Les petits conflits locaux, des femmes qui passent et les émeuvent, des souvenirs de leur vie d’avant et des leurs laissés au village. Les guerriers partagent leur vie avec celles des chevaux qui les portent et leur sont indispensables. Une nuit l’un des chevaux, malade, agonise, couché sous un abri, veillé par les hommes qui ne sont pas complètement indifférents à sa fin. Il symbolise aussi la douloureuse défaite de l’armée française en cette année 1940.

    Avec ce récit Claude Simon a posé les bases de « La route des Flandres » qui sera publié en 1960. Son style est un merveilleux équilibre entre concision des thèmes et richesse des mots (le lecteur lambda doit régulièrement consulter son dictionnaire…). Le choix des termes et des phrases dénote comme la mélancolie de cet exode à travers un pays à la dérive. La camaraderie de soldats exilés est touchante malgré leur détachement face aux évènements. Nous sommes en pleine débâcle, mais on ressent comme une certaine douceur tragique dans cette atmosphère de pré-apocalypse.

    Sur leurs chevaux hagards les cavaliers-soldats parlent de Dieu !

  • Des élus à la double nationalité

    Des élus à la double nationalité

    La France avait déjà Manuel Valls, ancien maire, ancien ministre et même ancien premier ministre de la République, titulaire d’une double nationalité franco-espagnole ce qui lui permit d’aller tenter de planter ses choux à Barcelone lorsqu’il estima la politique française ne lui réservait pas la place qui lui revenait, puis, de revenir en France lorsqu’il échoua à se faire élire maire de Barcelone en 2019, où il échoua de nouveau à se faire élire député des « français de l’étranger » en 2022, avant « d’abandonner la vie politique française » une énième fois.

    Elle a maintenant Meyer Habib, citoyen franco-israélien, député des « français de l’étranger », ami du premier ministre israélien et de la frange dure des partis au pouvoir à Tel-Aviv, de celle qui considère que la Bible est son titre de propriété et l’autorise donc à occuper Gaza et la Cisjordanie, le concept du « grand Israël », puisque c’est écrit ainsi dans la Genèse de l’ancien testament qui se place au-dessus des résolutions des Nations Unies, bien entendu.

    Le député Habib, né à Paris, est originaire d’une famille juive de Tunisie. Il a fait des études supérieures en Israël. A la tribune de l’assemblée nationale française il prend fait et cause pour Israël dans la guerre en cours à Gaza et prend bien soin de ne jamais parler de « Cisjordanie » ni de colonies israéliennes dans cette région, comme cela est reconnu par la communauté internationale, mais de « Judée et Samarie » comme cette région est désignée dans la Bible. Comme il est polémique et ultra, il est devenu un bon client des plateaux télévisés en ces temps de guerre au Proche-Orient où il expose ses vues partisanes et extrémistes sans vergogne.

    Lire aussi : Des Palestiniens au Congo ?

    Il a bien entendu le droit de croire que la Bible s’impose au droit international mais son cas pose une nouvelle fois la question du concept de double nationalité. Que ce soit Manuel Valls ou Meyer Habib, à qui ces doubles nationaux font-ils vraiment allégeance ? Comment se dépatouillent-ils de cette double appartenance ? Plutôt mal si l’on en juge leurs prises de position dans le cadre des responsabilités politiques pour lesquelles ils ont été élus. Au mieux ils défendent les positions d’un de leur Etat d’appartenance dans le cadre du mandat pour lequel ils ont été élus dans l’autre Etat dont ils ont la nationalité, au pire ils utilisent cyniquement les avantages que leur procurent leurs deux Etats, se faisant élire dans l’un ou l’autre au gré de leurs intérêts.

    La France devrait réfléchir sur la compatibilité de la double nationalité avec le statut d’élu français, à l’image du Sénégal qui n’autorise pas la double nationalité, notamment pour se présenter à l’élection présidentielle, et où Karim Wade, candidat au scrutin de 2024 a dû renoncer à sa double nationalité française pour se présenter. Il a été « libéré de son allégeance à l’égard de la France » par un décret paru aujourd’hui :

    Fils de l’ancien président sénégalais, il est né à Paris et a donc choisi d’être « uniquement » sénégalais pour essayer de succéder à son père. La lecture de ce décret qui montre 17 pages d’individus naturalisés français et deux noms seulement renonçant à ladite nationalité, semble indiquer que la France reste un pays attractif et accueillant.

  • « Les lavandières de la nuit » par le chœur de chambre Melisme(s) au Sémaphore de Trébeurden

    « Les lavandières de la nuit » par le chœur de chambre Melisme(s) au Sémaphore de Trébeurden

    Le chœur de chambre Melisme(s) présente un charmant spectacle musical mêlant les traditions bretonnes avec la musique classique (Verdi, Berlioz…). Sous la direction de Jérôme Pungier qui joue de la clarinette, un quatuor de chanteur, un accordéoniste et une diseuse-soprano chantent et racontent les « Lavandières de la nuit » qui battent leur linge sous les étoiles en prédisant la mort qui rôde autour de tous.

    C’est bien emmené, bien joué, bien chanté, parfois en breton, parfois dans des harmonies un peu modernistes pour une oreille classique. La soirée est douce.

  • Des ministres de l’éducation nationale mettent leurs enfants dans l’école privée

    Des ministres de l’éducation nationale mettent leurs enfants dans l’école privée

    Un nouveau sujet fait l’actualité du microcosme politico-médiatique français. Les enfants de la nouvelle ministre de l’éducation nationale, une ancienne joueuse de tennis d’orientation centre-droit, sont dans l’enseignement privé au collège Stanislas. Ceux de son prédécesseur, plutôt de centre-gauche, étaient également dans le privé, à l’école alsacienne. Le premier établissement est catholique, fondé par des ecclésiastiques « comme maison d’éducation chrétienne de garçons » Le second a été fondé après la perte de l’Alsace et la Lorraine en 1870 pour réformer l’enseignement français qui a amené la France à la défaite face aux Prussiens.

    Sur le site Internet de Stanislas on peut lire le compte rendu des célébrations du 8 décembre :

    En ce 8 décembre, Stanislas a célébré l’Immaculée Conception, sainte patronne de notre établissement. La journée a commencé à Saint-Sulpice pour les élèves du collège, du lycée et des classes préparatoires avec une messe solennelle, célébrée par le nonce apostolique en France, et suivie d’un petit-déjeuner avant le retour en cours.  Les élèves de maternelle et de CP ont déposé au pied de la Vierge du Rocher qui veille » sur notre établissement les fleurs blanches qu’ils ont apportées ce matin. Les élèves du Ce1 au CM2 ont célébré Marie lors d’une messe à Notre-Dame des Champs cet après-midi.

    https://www.stanislas.fr/letablissement/lhistoire-de-stanislas/

    On y apprend aussi que l’enseignement est mixte depuis 1992, et que l’internat est ouvert aux filles en 2018 via un lieu dédié :

    En septembre 2018 Stanislas a inauguré l’ouverture du foyer de jeunes filles Sainte-Claire afin d’accueillir davantage d’élèves internes filles en classes préparatoires.

    https://www.stanislas.fr/vie-pastorale/8-decembre-fete-patronale-de-stanislas/

    Il ne doit pas y avoir de toilettes « non binaires » à Stanislas.

    Evidemment, il n’est pas interdit par la loi qu’un ministre mette ses enfants dans une école privée mais cela montre son rejet de l’enseignement public qu’il est chargé d’administrer et, si possible, d’améliorer. Bien sûr cela n’en fera pas forcément un mauvais ministre mais à une époque de transparence obligatoire et où tout doit être justifié devant tout le monde, et spécialement les non-sujets, il est plus que prévisible qu’un ministre de l’éducation nationale ayant ses enfants dans l’enseignement privé sera soumis à un harcèlement sur le sujet par une presse avide de polémique. Le temps du « faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » n’est plus d’actualité dans ce monde d’aujourd’hui.

    Sur 65 millions de français il devrait tout de même être possible d’identifier des candidats compétents pour ce poste de ministre qui, soit n’ont pas d’enfant, soit mettent leurs marmots à l’école publique ! Cela éviterait les pertes de temps considérables auxquelles donnent lieu ces débats inintéressants. Cela devient désormais un critère de la fiche de poste du ministre de l’éducation nationale : avoir ses enfants dans l’enseignement public. Si on refuse ce nouvel état de fait, l’autre solution pour le ministre mis en cause et sa hiérarchie est de refuser de répondre aux questions sur le sujet que journalistes et opposants ne cessent de poser, et de voir qui renoncera le plus rapidement du ministre ou de ses questionneurs.

    Hélas, hélas, hélas, la politique recule souvent sur le fond pour protéger son image. Il n’est pas sûr que l’actuel ministre arrive à tenir face à la polémique !

  • A peine nommé, le premier ministre accroît la dépense publique

    A peine nommé, le premier ministre accroît la dépense publique

    Un nouveau premier ministre a été nommé en remplacement d’Elisabeth Borne, dont on ne sait pas exactement ce qui lui était reproché. Elle a passé les clés de l’hôtel de Matignon aujourd’hui en début d’après-midi à Gabriel Attal dont la principale qualité semble être sa jeunesse, il a 34 ans, et le fait qu’il ne passe jamais beaucoup de temp dans les postes qu’il occupe car il est constamment aspiré toujours plus haut…

    Cet après-midi, avant même d’installer ses petites affaires dans sa nouvelle demeure il est allé rendre visite au Pas-de-Calais en proie à des inondations interminables depuis la fin de l’année 2023. Bien sûr, une fois arrivé sur place, et devant les malheurs des citoyens de cette région, il a glosé sur « la solidarité nationale » et, donc, procédé à l’annonce de nouvelles dépenses publiques, sans un mot bien sûr sur la façon dont elles seront financées, ou les économies qui seront faites ailleurs pour faire jouer cette solidarité bienvenue.

    C’est une nouvelle fois l’application du syndrome de la politique française dont les membres n’existent que s’ils annoncent de nouvelles dépenses publiques. Sans remettre systématiquement en cause l’opportunité de telles dépenses, il serait opportun de préciser à chaque annonce son mode de financement. Il n’y a que trois possibilités : l’augmentation des impôts, la compensation avec la baisse d’une autre dépense ou l’augmentation de la dette publique si on ne peut pas appliquer l’une des deux premières méthodes. Toute le monde est capable de comprendre cette information. A défaut, les citoyens s’imaginent que « l’Etat paiera » et qu’il suffit de passer à la caisse en faisant venir un ministre. C’est ce qui se passe depuis des décennies en France et explique la situation financière délicate du pays par rapport aux autres pays d’Europe de l’Ouest.

    Lire aussi : La France pas assez raisonnable

  • Des Palestiniens au Congo ?

    Des Palestiniens au Congo ?

    La guerre entre Israël et le Hamas dure maintenant depuis plus trois mois avec son cortège de destruction et de barbarie et quelque chose entre 10 et 20 000 morts des deux côtés, très majoritairement palestinien. Après la libération d’une centaine de citoyens qui avaient été pris en otage et emprisonnés à Gaza, il resterait environ 130 israéliens toujours « disparus » depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre. Une partie est probablement gardée en otage par le Hamas et ses groupes affiliés. Il est en effet traditionnel que ces groupes se revendent leurs otages entre eux. On ne sait pas bien le nombre de ces « disparus » qui seraient encore vivants, sans doute pas la totalité.

    En attendant, l’armée israélienne continue à bombarder méthodiquement cette enclave au bord de la Méditerranée avec le but de guerre affiché de « détruire le Hamas ». Trois mois plus tard ledit Hamas continue à envoyer des missiles sur Israël et ses membres à se battre contre l’armée israélienne sur le terrain. Le mouvement doit certes être affaibli, on le serait à moins, mais il est toujours là. Il est probable que quelle que soit l’étendue des destructions effectuées dans la bande de Gaza, l’idée anti-israélienne subsistera et survivra sous une forme ou sous une autre à l’issue de la guerre, voire renaîtra renforcée tant la haine entre les deux peuples, ravivée par ces évènements, est féroce.

    Hélas, il n’y avait sans doute pas d’autre issues envisageables que de laisser parler les armes après le pogrom lancé par les Palestiniens ce 7 octobre tant ses réminiscences de Shoah parlent aux juifs israéliens. La simple question « qui a commencé ? » est impossible à poser et à trancher puisque chacun se relance la balle sans vouloir compromettre le moins du monde avec la parie adverse. La force brute d’Israël a les moyens de détruire les infrastructures gazaouis, ce qui est effectivement en cours en ce moment, de tuer un certain nombre de dirigeants du Hamas, mais elle ne suffira pas à éliminer l’idée de la résistance palestinienne à son encontre, pas plus qu’elle n’a réussi à neutraliser l’OLP ou le Hezbollah au cours des décennies passées malgré tous les efforts du peuple israélien en guerre quasi-permanente depuis sa création.

    Anticipant justement l’inefficacité de la guerre actuelle sur le long terme, certains des ministres religieux de la droite dure du gouvernement israélien prônent la recolonisation de Gaza par Israël et la déportation de la majorité de ses 2,2 millions d’habitants vers un autre pays. Les pays arabes avoisinants, Egypte ou Jordanie, n’envisageant pas une seconde d’accueillir un nouveau flux de réfugiés palestiniens, des négociations seraient menées entre Israël et… le Congo à ce sujet, c’est du moins ce qu’affirment les ministres en question. On a du mal à croire à la réalité d’une telle négociation avec le Congo (il semble s’agir de la République populaire du Congo, ex-Zaïre, pas du Congo Brazzaville), on voit mal un pays africain, ni quelque pays que ce soit d’ailleurs, s’engager dans un tel marchandage d’êtres humains au XXIème siècle, parfaitement irréalisable, sans compter la volonté des Gazaouis qui n’est sûrement pas de s’exiler où que ce soit ce qui ne serait pas sans rappeler la « Nakba », le grand exil des Palestiniens en 1948 après la création de l’Etat d’Israël et la guerre qui s’ensuivit. On ignore comment les promoteurs de cette idée saugrenue feraient pour transporter de force 2 millions de personnes sur un autre continent ?

    Tout ceci est parfaitement incongru et même nauséabond venant d’Israël. On se souvient que dans les années 1940, l’un des projets allemands, avant d’adopter la « solution finale » (l’extermination), était de déporter les juifs sur l’île de Madagascar pour les éloigner des territoires « aryens »… Mais aujourd’hui, l’idée d’une négociation avec le Congo, dont on ne sait même pas si elle a connu un début de réalisation (Kinshasa ne semble pas avoir démenti une telle hypothèse), confirme que la frange dure et religieuse de la politique israélienne n’a plus aucune volonté d’aller vers une solution politique et pacifique du conflit et n’envisage que la force pour régler ses problèmes de cohabitation avec ses voisins. Ces gens aux idées guerrières sont élus lors d’élections démocratiques et reflètent sans doute les idées d’une partie de la population ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour l’avenir de cette région qui empoisonne la planète depuis plus de 70 ans, ainsi que leurs propres populations. Cette croyance aveugle en la force pour régler un problème de territoire se heurte à la vraie vie. Depuis 70 ans, malgré les guerres, les actions antiterroristes, les assassinats ciblés, les résolutions des Nations Unies, les murs construits, la technologie mise en œuvre pour parquer les Palestiniens derrière des barrières électroniques, et même malgré les accords de paix avec l’Egypte et la Jordanie, il y a toujours des terroristes palestiniens pour se lever un matin comme celui du 7 octobre et aller massacrer 1 200 juifs. La simple recherche d’efficacité devrait pousser à chercher une solution politique à ce conflit qui va bientôt devenir centenaire. Des pistes avaient pourtant été initiées avec les accords d’Oslo de 1983 mais jamais suivis d’effets, emportés par les errements des extrémistes des deux bords, Yitzhak Rabin, le premier ministre israélien signataire de l’accord fut même assassiné en 1995 par un étudiant juif israélien extrémiste.

    Le pogrom anti-israélien qui s’est passé le 7 octobre, et ce qui se déroule depuis, a rechargé la haine entre Israéliens et Palestiniens pour plusieurs générations. Difficile de rester optimiste sur le court terme, la mésentente entre ces deux peuples va continuer à polluer la planète pour encore longtemps !

  • DUBOIS Jean-Paul, ‘ Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon’.

    DUBOIS Jean-Paul, ‘ Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon’.

    Sortie : 2019, Chez : Editions de l’Olivier.

    Prix Goncourt 2019, ce roman de Jean-Paul Dubois relate la vie ordinaire de Paul, dont on apprend dès les premières pages qu’il est en prison, élevé dans les années 1960 par une mère libertaire-soixante-huitarde et un père pasteur danois, plus rigoureux. Cet étrange mélange produit un homme qui mène sa vie comme il le peut, de Toulouse au Québec, avec quelques sommets, son amour pour sa femme indienne et sa chienne Nouk, mais aussi des désastres. Libéré de prison par anticipation des deux années auxquelles il a été condamné, n’ayant plus grand monde à aimer autour de lui, il retourne aux sources léguées par son père et le roman se termine sur son arrivée dans un village du grand Nord danois.

    Un roman bien fait, plein d’humour qui se lit agréablement. La fatalité qui semble cerner la vie de Paul ne l’empêche pas finalement de la poursuivre sur des bases positives qui devraient lui permettre de transcender les bonnes et mauvaise choses qui lui sont arrivées jusqu’ici.

  • « Chéri Samba dans la collection Jean Pigozzi » au musée Maillol

    « Chéri Samba dans la collection Jean Pigozzi » au musée Maillol

    Délicieuse rétrospective de l’artiste congolais (ex-zaïrois) Chéri Samba, né en 1956 dans un village proche de la capitale Kinshasa qu’il rejoint dans les années 1970. D’abord peintre publicitaire autodidacte pour devantures de coiffeurs et de tous ces petits commerces qui maintiennent tant bien que mal la tête du peuple à peine hors de l’eau de cette ville tentaculaire où la misère fraye avec une incroyable frénésie culturelle s’exprimant via la musique, le dessin, la peinture, la mode… il est aujourd’hui un artiste internationalement reconnu. Il sait rendre avec talent la joyeuse confusion qui enveloppe Kinshasa, tournant parfois à la farce sanglante sous la botte de satrapes comme Mobutu ou Kabila père, qui ont vainement tenté de gouverner ce pays gigantesque et ingouvernable.

    Dans ses peintures Chéri Samba introduit humour et couleurs éclatantes mais sous leur aspect naïf ses toiles déclinent la vision qu’il a des dérives de son pays : les enfants-soldats, la bière Primus tiède dans les nuits de Kinshasa, l’argent obsessionnel, le poids de la « fraternité » à l’africaine qui transforme la masse des inactifs en véritables sangsues consommant le salaire de ceux qui travaillent et qui ne peuvent rien refuser à leurs « frères dans le besoin », les infrastructures en ruine…

    Enfant soldat (kadogo) dont un effectif important a été employé pour le renversement du dictateur Mobutu par le satrape Kabila en 1997

    Samba se met souvent en scène dans ses tableaux dénotant sans doute une petite faiblesse narcissique mais dont il joue, comme toujours, avec humour. Les « sapeurs » étant une spécialité locale, ses personnages sont représentés avec des vêtements tape-à-l’œil aux couleurs voyantes, des grosses montres et tous les ustensiles propres aux m’as-t-vu qui font la réputation de Kinshasa. Il représente son fils en enfant soldat comme ceux, nombreux, que le président Laurent-Désiré Kabila a recrutés et armés pour renverser son prédécesseur le président Mobutu après 32 ans de pouvoir. Kabila, lui, a fini assassiné trois ans après son accession à la présidence, pour être remplacé par… son propre fils ! Tous ces évènements tragi-comiques font le miel de l’inspiration du peintre dont l’œil affuté sait croquer toutes ces scènes de la vie congolaise. La plupart des toiles sont de grande taille et les couleurs flashy sont percutantes mais irréelles ; quiconque connait un peu l’Afrique centrale sait qu’elle est plus souvent sous la poussière ou la pluie que sous un ciel bleu. Qu’importe, sa peinture traduit les excès d’un pays et rien n’interdit de rêver qu’il évolue sous un ciel pur et le sourire de ses citoyens dans une ambiance optimiste et rigolarde.

    L’une des spécificités de Samba est de peindre aussi des textes sur ses toiles pour diffuser ses idées, souvent rédigés de façon aussi naïve que la peinture qu’ils illustrent. Dans une interview diffusée sur un grand écran, on voit l’artiste expliquer que c’est aussi un bon moyen pour que les visiteurs restent plus longtemps devant ses toiles, un objectif plutôt atteint.

    Samba a commencé à exposer en dehors de l’Afrique dans les années 1980 pour devenir aujourd’hui un artiste mondialement connu de l’art africain contemporain. Les quelques 50 toiles exposées au musée Maillot sont extraites de la collection d’art africain financée par Jean Pigozzi via la Contemporary African Art Collection (CAAC) avec l’aide d’André Mangin qui parcourt le continent africain à la recherche d’œuvres intéressantes.

  • « Shttl » d’Ady Walter

    « Shttl » d’Ady Walter

    Nous sommes en 1941 dans un village juif d’Ukraine soviétique au cœur duquel s’oppose les juifs orthodoxes et les juifs « soviétisés » dans l’éternel lutte entre les anciens et les modernes. Dans la tradition juive les orthodoxes défendent des comportements d’un autre âge vis-à-vis des femmes, du travail et de l’interprétation de la Bible ? Ce sont les mêmes aujourd’hui qui défendent le droit d’Israël sur la Palestine puisque le concept de « grand Israël » est mentionné dans l’ancien testament depuis 4 000 ans… Au cœur de ce village perdu une partie des jeunes a été embrigadée par l’idéologie communiste qui, outre qu’elle refuse le fait religieux, prône des concepts généralement en totale opposition avec la Bible…

    Dans le film, Mendele qui fait des études de cinéma à Moscou sous uniforme militaire revient au village pour enlever son amoureuse Yuna des griffes rétrogrades de Folie, cultivant un judaïsme hassidique particulièrement rétrograde, qui fut son ami lorsqu’ils étaient enfants et qui se prédispose à devenir le rabbin de la synagogue lorsque l’actuel, père de Yuna, quittera ses fonctions. Ils en sont là lorsque l’armée allemande entame l’opération « Barbarossa » et envahit l’ouest de l’Ukraine où est situé le village. Il s’en suit le pogrom du village représentatif de la « shoah par balles » qui précéda l’extermination industrielle mise en œuvre dans les camps nazis d’extermination. Mendele le moderne est alors tiraillé entre sa fidélité aux siens et son amoureuse. Les Allemands mettent fin à leur manière à la querelle des anciens et des nouveaux et c’est sur cet épilogue dramatique que se termine le long métrage.

    Ce film intimiste se déroule entre ce pauvre village de masures en bois et la forêt attenante. Le noir-et-blanc est utilisé pour l’année du retour de Mendele au village et la couleur est réservée à la jeunesse des protagonistes, marquant sans doute ainsi la noirceur de cette année 1941. Réalisé par le franco-ukrainien Ady Walter, le tournage du film a été effectué en yiddish en Ukraine et a été perturbé par les bruits de bottes russes qui annonçaient l’invasion de février 2022, comme une tragique confrontation entre l’histoire et l’actualité. Le massacre d’israéliens commis le 7 octobre 2023 en Israël par le mouvement religieux Hamas est venu aggraver encore la funeste cruauté de la réalité, lorsque se mêlent les ambitions de pouvoir et la haine religieuse !

  • SUREAU François, ‘Le chemin des morts’.

    SUREAU François, ‘Le chemin des morts’.

    Sortie : 2013, Chez : Gallimard / Folio n°6410.

    François Sureau, né en 1958, haut-fonctionnaire ancien élève de l’ENA, passé du conseil d’Etat aux fauteuils bien rémunérés des « conseillers » du CAC40, avant de devenir avocat et écrivain, a été élu membre de l’accadémie française en 2021 au fauteuil n°24, libre après le décès de Max Gallo. Le garçon est brillant, la barbe bien taillée, le verbe juste, l’écriture précise et fluide, mais le garçon a parfois des remords sur ses actions passées.

    Dans ce court récit il raconte son expétience d’auditeur au conseil d’Etat dans les années 1980, chargé de rédiger des avis à la commission de recours de réfugiés. A ce titre, il eut à traiter le cas d’un ancien militant basque, réfugié en France depuis vingt ans après avoir participé à des actions violentes contre le franquisme. L’Espagne étant revenue à la démocratie après la mort de son dictateur galonné en 1975, la France a décidé de refuser désormais le statut de réfugié aux demandeurs de nationalité espagnole. En réalité, le nouvel Etat espagnol était certes « démocratique » mais il continuait de tolérer, voir de manipuler, des commandos de la mort, plus ou moins activés par la police, qui réglaient, le plus souvent violemment, les comptes du terrorisme espagnol, et bien sûr, tout particulièrement basque.

    Lorsque la décision de refus de renouvellement de son statut de réfugié en France dont il disposait depuis 1969 est notifiée à Javier Ibarrategui, suivant ainsi l’avis rédigé par le conseiller Sureau, il s’exprime calmement pour dire qu’il ne restera donc pas en France, contre la loi, mais rentrera en Espagne où il risque fortement d’être assassiné par les « groupes anti-terroristes de libération (GAL) ». Le même jour la commission accordait le statut de réfugié « à un Zaïrois dont nous devions découvrir ensuite qu’il s’était déjà présenté trois fois à la commission sous des identités différentes. Il avait un beau talent d’acteur et revendait ensuite -à un prix abordable- le précieux papier à ses compatriotes. »

    Quelques mois plus tard Ibarrategui est assassiné en Espagne, très probablement par les GAL. François Sureau s’interroge bien sûr sur l’opportunité de cette décision qu’il a initiée. Il n’est d’ailleurs pas sûr que s’il avait proposé l’inverse il eut été suivi, mais le sort vengeur et funeste qui fut réservé à Ibarrategui continue de le hanter, et sa responsabilité, même très indirecte, dans sa mort de l’obséder. Il explique comment l’image noble d’Ibarrategui la dernière fois qu’il le vit sous les ors du conseil d’Etat fut devant lui à toutes les (nombreuses) étapes de sa brillante carrière, sans préciser toutefois si ce souvenir indélébile a fait évoluer sa vision du monde et des dossiers qu’il eut à traiter, au barreau de Paris où dans les salons du CAC40. Il pose de façon claire et percutante, à son petit niveau, le problème de la responsabilité morale des décisionnaires d’un Etat démocratique, qui sont souvent confrontés aux choix cornéliens de devoir arbitrer entre l’intérêt général et le particulier, entre la raison d’Etat et l’émotion. Ce n’est certainement pas facile à vivre pour quiconque dispose d’un esprit bien fait, mais aussi d’une âme et de convictions.

  • Des nouveaux venus dans la lutte contre l’Occident

    Des nouveaux venus dans la lutte contre l’Occident

    Voici un nouveau venu sur la scène actuellement très active de la communication d’états-majors : Yahya as-Saree, sanglé dans un uniforme rutilant, le verbe haut, fort et saccadé, il est le porte-parole de « l’armée Houthi », la rébellion yéménite pro-iranienne qui contrôle la moitié du Yémen, y compris sa capitale officielle Saana. Le Yémen fut un terrain de conquêtes coloniales menées par les empires Ottoman et Britannique jusqu’au XXème siècle et sur lequel l’Arabie-Saoudite frontalière au nord a toujours gardé un œil attentif. Après les décolonisations le pays est resté divisé en deux. Il y avait un Yémen du sud, constitué en République populaire et démocratique du Yémen autour du port d’Aden, pro-soviétique, et la République arabe du Yémen, mieux intégrée dans la région arabe environnante.

    De guerres civiles en rébellions, de tribus en protectorats, de prébendes en famines, les deux Yémen n’ont cessé de se chamailler, parfois par les armes, situation largement attisée par les puissances environnantes dont l’Arabie-Saoudite pas vraiment raccord avec l’idéologie « révolutionnaire » prônée à Aden. C’est la raison pour laquelle Ryad a pris la tête d’une coalition arabe-sunnite en 2015 pour « libérer » le Yémen de l’emprise houthi à grand renfort d’armes achetées à l’Occident. Ce fut un échec comme l’illustre les actions encours des Houthis contre Israël.

    Les deux Yémen se réunissent pour fonder la République du Yémen en 1990 mais la paix ne dure que quelques années et dès 1994 la bataille reprend entre les marxistes et les unionistes et n’a quasiment pas cessé depuis. La rébellion Houthi est largement soutenue par la République islamique d’Iran. Les Houthi sont plus ou moins musulman-chiite, comme leur protecteur, mais il semble que ce soit une version particulière de cette tendance. Ils ont en tout cas pris le parti de la cause palestinienne dans la nouvelle guerre qui oppose Israël au Hamas depuis le pogrom commis par ce dernier mouvement le 07/10/2023 (plus de 1 200 morts israéliens, dont beaucoup de civils assassinés dans la plus grande barbarie). Leurs moyens d’action sont le lancer de missiles en direction d’Israël et de bateaux militaires ou commerciaux occidentaux navigant en Mer Rouge en direction du canal de Suez. Ils ont même réussi à prendre des navires en otage en déposant des commandos amenés en hélicoptère sur le pont.

    Cette tactique porte ses fruits puisque le trafic vers le, et en provenance du, canal de Suez est perturbé ce qui oblige les navires à faire le tour de l’Afrique. Les armateurs expliquent que l’augmentation des coûts de transport générée par cette route plus longue est à peu près compensée par l’économie des droits de passage sur le canal. Les à-coups sur la fluidité de la chaîne internationale de transport sont néanmoins patents ce qui réjouit les Houthis.

    Le problème du jour est que ces milices Houthi que l’on assimilait jusqu’il y a peu à une bande de va-nu-pieds dépenaillés sont maintenant organisées en armée presque nationale (la prise du pouvoir et de la capitale par cette rébellion n’est pas officiellement reconnue par les Nations Unies) et capable d’envoyer des missiles balistiques vers Israël ou l’Arabie-Saoudite, ce qu’elles ne se privent pas de faire. Si les guerres claniques internes sont millénaires, les armes utilisées ont évolué… Pour bien comprendre ce pays, il est recommandé de relire « Fortune carrée » de Joseph Kessel, écrit en 1932 ; rien n’a vraiment changé sur le fond si ce n’est la portée des missiles.

    Selon Wikipédia, la traduction de la devise du mouvement est :

    Dieu est le plus grand, Mort à l’Amérique, Mort à Israël, Maudits soient les juifs, Victoire à l’islam.

    Vaste programme ; il y a encore quelques progrès à faire pour ramener la paix dans la région semble-t-il…

    L’ambassade de France au Yémen est fermée, comme celle au Niger, ce qui apparaît comme une mesure raisonnable. Il semble en revanche que l’ambassade du Yémen en France soit toujours opérationnelle dans le XVIème arrondissement parisien. On peut se demander si elle est bien utile, voire opportune ?